La délégation algérienne rentre saine et sauve au pays «Casser le blocus ou mourir en martyr»

La délégation algérienne rentre saine et sauve au pays «Casser le blocus ou mourir en martyr»

«D’autres flottilles vont se rendre à Ghaza», promettent à l’unanimité les membres et les parrains de la délégation algérienne.

Il était près de minuit, mercredi, quand l’avion rapatriant les 31 Algériens depuis la Jordanie, a atterri sur le tarmac de l’aéroport international Houari Boumediene d’Alger. Cependant, dans le hall d’arrivée, ils ne sont apparus que 20 minutes après leur débarquement de l’avion.

L’organisation de l’accueil a laissé à désirer. Tout les représentants des médias y compris ceux des radios publiques et les agences de presse étrangères étaient tout bonnement empêchés d’accéder au tarmac de l’aéroport. Le comble, devant l’insistance des photographes de presse et journalistes, la police a menacé de recourir à la force.

La tension était à son paroxysme d’autant plus que seulement quelques proches des rapatriés ont pu avoir accès à la salle d’attente. Les photographes ont même improvisé une action symbolique en déposant au sol leur appareils en guise de protestation Toutefois, à l’extérieur, des dizaines de citoyens se sont amassés dans les parkings de l’aéroport.

Très bruyants sont cependant les groupes de jeunes filles toutes vêtues de hidjab, acheminées depuis les cités universitaires de la capitale. Elles criaient à tue-tête: «Arabes, on ne veut pas de sommet, engagez vos armées» ou encore «Hébreux! l’armée de Mohamed est de retour».

Tout le monde était là

Plutôt sereins et calmes, les amis et proches des Algériens qui revenaient de leur expédition humanitaire, laquelle tourna court après l’agression des commandos israéliens, attendaient l’arrivée de leurs parents depuis la fin d’après-midi. «Je suis ici, pour accueillir notre imam officiant à la mosquée Al Aâtik à El Madania. Il est le représentant de l’association Al Aksa», nous déclara une femme d’un certain âge rencontrée sur les lieux. Quoi qu’on puisse dire, un climat empreint de ferveur religieuse a créé de l’ambiance à l’aéroport Houari-Boumediene. Tout l’aréopage d’obédience islamiste était là. Du secrétaire général d’En Nahdha, Djamel Ben Abdeslam, en passant par le chef de la délégation, Abderrezak Mokri du MSP, l’ex-ministre du Commerce, El Hachemi Djaâboub et le président du MSP, Bouguerra Soltani, chacun tente de tirer la couverture à lui.

D’autres responsables d’associations dites de la société civile, telle celle de Mme Saïda Benhabilès, figuraient aussi parmi le comité d’accueil. Les 31 membres de la délégation – le 32e, Mohamed Ouledi, membre de la direction d’En Nahdha, en charge du dossier palestinien, est resté en Jordanie pour soigner sa blessure à l’oeil gauche – sont accueillis par «Allah Akbar» et de «Labayka filistine Labayka», des youyous avant de passer aux traditionnelles longues accolades. Accosté par les journalistes, un des membres de la délégation, Yacine Bouteldja indique que «les Israéliens nous reprochaient la violation de leurs ´´eaux territoriales´´ sans autorisation».

La plus éloquente et la plus directe demeure cette femme originaire de Batna. Cette dame raconte qu’elle avait vécu plutôt «un long film d’horreur». La démonstration de force démesurée et l’excès de zèle de la marine israélienne rappellent à cette Aurésienne, d’une quarantaine d’années, la série des «Terminator» d’Arnold Schwarzenegger, actuel gouverneur de la Californie aux Etats-Unis. «Ce film je l’ai vécu en grandeur nature devant mes yeux. Le temps me paraissait interminable quand ils nous ont attachés avec des bouts de corde sur le navire sous un soleil brûlant. Pis encore, un soldat israélien a pointé son arme sur un bébé turc âgé à peine d’un an pour forcer le capitaine à immobiliser son navire», raconte avec beaucoup d’émotion Saliha Nouasria, directrice d’une maison d’édition à Batna. «Tous nos documents de voyage ont été confisqués», ajoute-t-elle.

Pour l’anecdote, cette dame raconte avec fierté que lorsqu’elle a décliné l’identité de son pays, «Algeria», «le soldat israélien a tiqué» indiqua-t-elle. Profitant de cette situation, la dame a usé de sa hardiesse propre aux femmes chaouias. «Je ne parle ni arabe ni français encore moins anglais, je parle chaoui! (traduisez le chaoui vous les puissants)», les nargue-t-elle. «On nous a réservés un traitement inhumain, on nous a même empêchés d’aller aux toilettes», indiqua de son côté Mustapha Mokri.

«Les Israéliens nous ont attaqués par des commandos déposés par hélicoptère sur le navire. Ils ont commencé par faire pleuvoir sur nous des bombes lacrymogènes, puis ont tiré sur la foule avec des balles réelles.» Racontant les péripéties de cette odyssée, Mustapha Mokri précisa: «On a recensé près d’une quarantaine de blessés dont des cas très graves. Je suis parti le 20 mai depuis Alger pour rejoindre Istanbul puis Antaliya. Le lendemain nous avons embarqué et navigué vers Chypre, puis nous avons attendu les autres pour repartir ensemble vers Ghaza. Après l’agression on nous a frappés, liés les mains, empêchés d’aller aux toilettes et nous ont laissés sans nourriture pendant trois jours», a déclaré tout de go cet étudiant.

«Mon objectif était d’aller à Ghaza, participer à la levée du blocus étouffant la population locale, sinon mourir en martyr. Avant le raid des commandos israéliens j’ai reçu un émail de ma fille. Quelques minutes plus tard, j’ai entendu des coups de feu venant de tous les côtés. Quatre victimes turques sont tombées sous mes yeux. A l’aube, les militaires israéliens ont investi le navire. Un fois au port d’Achdod, la délégation algérienne qui a refusé de signer le document écrit en hébreu, était dirigée vers la prison. Une fois dans les geôles, les enquêteurs n’hésitaient pas à nous malmener en nous insultant et nous bousculant», raconte un membre du bureau national du MSP, Massar Soltani.

«On a vécu une boucherie»

Le raid des commandos israéliens a été mené avec une violence inouïe. «C’est la seconde fois que je me rends à Ghaza après ma tournée faite en février dernier en compagnie de la délégation arabe. Sur le navire on était tous des civils, mais les Israéliens nous ont néanmoins agressés. Je peux vous garantir que les commanditaires de ce raid criminel seront poursuivis devant la Cour pénale internationale», a affirmé pour sa part le vice-président du groupe parlementaire du MSP à l’APN, Zine Eddine Ben Mokdad.

«Nous avons refusé de signer le document israélien consignant que nous avons fait une intrusion en territoire israélien. Une interdiction d’y remettre les pieds nous a été signifiée et par ricochet, nous étions classés dangereux», a, par ailleurs, témoigné notre confrère d’Ech Chourouk, Kada Ben Ameur.

Mohamed BOUFATAH