Comme un lifting grossier qui se fissure soudainement de toutes parts, le masque trompeur de la « Révolution bleu Marine » a révélé son vrai visage sous les derniers coups de boutoir de Jean-Marie Le Pen, qui ont fait craquer ses points de suture très visibles à l’œil nu, à condition bien sûr de ne pas se voiler la face, laissant transparaître l’illusion du renouveau.
Egal à lui-même, le fondateur de l’extrême droite française qui n’entend pas jouer les octogénaires potiches, cantonné dans une présidence d’honneur insipide, nous a gratifiés d’une ses saillies verbales inimitables contre Patrick Bruel et en réaction à l’hostilité de certains artistes face à la percée du FN aux élections européennes, sur laquelle flotte le parfum d’antisémitisme qui n’a jamais cessé d’imprégner la base du mouvement, sauf bien entendu pour les irresponsables de tous bords qui ont préféré se boucher le nez pour mieux casser du musulman.
Nul besoin d’être grand clerc pour comprendre que Marine Le Pen, l’incarnation de cette illusion frontiste, aimerait bien tuer le père, symboliquement s’entend. Toujours est-il qu’elle ne peut pas le renier, même quand ce dernier nie la « faute politique » qu’elle lui reproche pour la forme, lui retournant le compliment en répliquant : « Je considère que la faute politique, c’est ceux qui se sont alignés sur la pensée unique. Ils voudraient ressembler aux autres partis politiques. Si c’est le voeu d’un certain nombre de dirigeants du FN, ils ont réussi. C’est eux qui ont fait une faute politique, pas moi. »
L’héritière du FN aspirait à lepéniser la République en douce, n’hésitant pas à déplacer le curseur de la haine d’un cran vers l’islam afin d’envoûter la France d’en haut, sous influence, et la France d’en bas, désenchantée… Mais c’était sans compter les dérapages antisémites intempestifs de son vieux briscard de père, ce multirécidiviste des provocations racistes et islamophobes, bourreau de l’Algérie française, nostalgique des chemises brunes et plaidant pour que les crânes rasés figurent à nouveau sur la photo de famille.
Reste à savoir si l’illusion de la renaissance du FN va encore opérer longtemps et notamment à Strasbourg où Marine Le Pen, arrivée en terrain conquis, a été refroidie par l’accusation d’antisémitisme proférée par certains mouvements nationalistes et europhobes qui refusent obstinément de rejoindre la coalition qu’elle doit former.
Seraient-ils donc plus lucides ou moins partisans que tous ceux qui, en France, ont loué la nouvelle respectabilité du FN ou ont braconné sur ses terres contre cet ennemi de l’intérieur commun, exutoire de tous les échecs, les immobilismes et les graves manquements : les citoyens français de confession musulmane ?