Après le vote, la fièvre est tombée
Les partisans de la LF 2016, comme ses opposants, se défendent au nom de l’intérêt de la nation. Mais les considérations idéologiques semblent prendre le dessus.
La loi de finances 2016 a été adoptée, avant-hier, par le Parlement. Sans surprises puisque les deux partis constituant la majorité, à savoir le RND et le FLN, l’ont soutenue infailliblement. Mais ce qui est surprenant, c’est cette opposition parlementaire farouche qui s’est exprimée d’une façon massive. En effet, plusieurs partis politiques, à leur tête le PT, le FFS, l’AAV et le FJD, ont signé un communiqué commun dans lequel ils s’élèvent comme un seul homme contre cette loi et prévenant contre ses retombées fâcheuses aussi bien sur l’économie du pays que sur le front social qui risque de s’enliser dans l’instabilité à cause des augmentations des prix qu’elle prévoit. Le FFS
, par le biais d’un de ses dirigeants, Rachid Halet en l’occurrence, considère que cette loi constitue aussi un reniement des engagements internationaux de l’Algérie en matière de développement durable. Que contient donc cette loi comme élément dangereux? Les différents députés de l’opposition que nous avons interrogés ont relvé principalement trois articles qui, selon eux, posent, le plus problème. Il s’agit des articles 2, 66 et 71. L’article 2 prévoit des augmentations du gasoil et de l’électricité. L’article 66 prévoit l’ouverture du capital des entreprises publiques aux privés résidant avec une possibilité que le privé acquiert la totalité des actions de l’entreprise après cinq ans. L’article 71, lui, prévoit, une possibilité pour l’Exécutif d’émettre des décret sans recourir à l’Assemblée nationale, en cas de détérioration des équilibres généraux. Ces trois articles reflètent visiblement la vision du gouvernement, laquelle vision est soupçonnée par l’opposition d’être trop «libérale». Un vision économique a, sans nul doute, une identité et celle du gouvernement actuel est libéral et le gouvernement et ses relais politiques l’assument publiquement. Au lendemain de son retour à la tête du RND,
Ahmed Ouyahia n’a pas hésité à crier «vive l’oligarchie algérienne». Amar Saâdani, secrétaire général du parti majoritaire dans toutes les assemblées élues, a lui aussi revendiqué cette option politique. Il a même appelé à la création d’un Front national pour soutenir la démarche de transition vers «une économie sociale de marché». C’est en résumé, un gouvernement libéral, qui s’assume ouvertement en tant que tel, qui a adopté la LF 2016.
Ce gouvernement n’a-t-il pas le droit d’être libéral? Ses choix sont-ils mauvais parce qu’ils sont libéraux? L’Algérie est-elle condamnée à se confiner dans les limites idéologiques de la Déclaration du 1er Novembre qui préconise une République démocratique et sociale? Si oui, pourquoi donc agréer des partis qui se revendiquent du courant libéral? La LF 2016 est-elle mauvaise parce qu’elle reprend certaines propositions du FCE?
La politique, n’est-ce pas d’avoir des visions et de les assumer? Pour rappel, à peine quelques éléments sur son contenu étaient-ils sortis dans la presse, par la force de quelque indiscrétion sans doute bienveillante, que la loi de finances 2016 a commencé à susciter des réactions de la part aussi bien des experts que de certaines formations politiques, notamment le Parti des travailleurs qui fait de son combat contre ce qu’il appelle «l’oligarchie» son cheval de bataille. Plus le temps passe, plus le ton devient virulent et plus le front d’opposition à cette loi s’élargit. C’est dans le ring où s’est transformée l’APN que ces virulences se sont exprimées avant-hier. Tout le monde évoque l’intérêt de la nation comme argument. Mais l’idéologie a pris le dessus.