Intitulé « Abstraction et avant-garde », le deuxième ouvrage de Ali El Hadj Tahar sur « La peinture algérienne » présente près de soixante et un plasticiens, dont Belhachemi, Boucetta, Guita, Khelloufi, Khimoune, Arezki Larbi, Larouk, Arslane Lerari, Nedjaï, Driss Ouadahi, Kamel Nezzar…
Consacré à l’art abstrait et aux expériences de recherche et d’avant-garde, ce livre présente les créateurs qui posent des questions d’ordre esthétique et technique, sans pour autant négliger le sujet. La forme faisant partie de leur problématique, ces artistes ne cherchent ni la délectation ni l’imitation de la réalité ou sa représentation, mais l’expression ; leur art se voulant une recherche permanente pour faire avancer la peinture elle-même.
Ils sont généralement abstraits, au sens large du terme, et leurs sujets inspirés du vécu, du réel, de la nature, de l’observation du monde tout simplement, issus de leur imagination.
À partir des années 1980, les questionnements des artistes algériens deviennent beaucoup plus personnels, sociaux et philosophiques que nationaux, avec un intérêt plus grand aux aspects esthétique et technique liés à l’espace du tableau, mais aussi à son sujet et à la manière de le traiter, en ce sens, fondés sur des préoccupations d’un art de leur temps », écrit l’auteur.
Fatiha Bisker, Benmohamed Djamila, Abdelmadjid Chaïr, Salah Malek, Arezki Larbi, Akila Mouhoubi, Noureddine Belhachemi, Amine-Khodja, Hadjira Preure, Mustapha Goudjil et Ali El Hadj Tahar forment ce premier noyau de la peinture non figurative algérienne ainsi que Mohand Saci, Rachid Madani, Nadjia Mehadji, Mélik Ouzani, Rachid Khimoune et Kacem Noua qui, eux, vivaient et travaillaient en Europe dans les années 1980.
D’autres artistes émergent dans les années 1990, notamment Kamel Nezzar, Sadek Amine-Khodja, Hamida Chellali, Nacer Benmissi, Hakim Abbaci, Mourad Messoubeur, Ali Ali-Khodja… qui, eux aussi, ont conscience que les pictogrammes traditionnels ne disent pas le Moi individuel de l’artiste mais un Moi collectif. Dès le début des années 1980, la peinture algérienne passe de préoccupations collectives aux préoccupations personnelles, ceux de l’artiste avant tout.
Une avant-garde diversifiée par les styles et les thématiques
Globalement non figurative, l’avant-garde algérienne inclue aussi des semi figuratifs, dont Ammar Briki, Adlane Djeffal, Mustapha Nedjaï, Hamida Chellali, Karim Meziani, Abdelmalek Madjoubi, Kamel Nezzar, Moncef Guita, … Beaucoup de ces artistes proposent une vision personnelle de la réalité ou de la nature. Parmi ceux qui se sont imposés dans les années 1990, ne privilégiant pas la figure, il y a aussi Noria Nedjaï, Djamel Larouk, Arslane Lerari, Yahia Bourmel, Yacine Hachani, Ahmed Hamidi, Kheïra Slimani, Mustapha Souadji…
Pour ces artistes donc, Ali El Hadj Tahar avise que « l’art est d’abord une remise en question perpétuelle des formes, des couleurs, de l’espace ». Posant des questionnements en termes esthétiques et plastiques avant tout, il exprime également des préoccupations politiques, philosophiques, sociales ou culturelles les plus variées.
L’auteur écrit que la génération apparue dans les années 2000 comprend des artistes puissants et créatifs comme Hocine Absi, Djamel Agagnia, Jamil Amhis, Noureddine Benazzouz, Kamel Benchemakh, Abdelghani Boumegoura, Saïd Rahmani, Smaïl Siaghi, Djamal Talbi, Mourad Abdellaoui, Ahmed Mébarki, Latifa Boulfoul, Meziane Boussaïd, Hocine Drici, Layachi Haddadi, Ghani Ghouar, Mohamed Djoua, Smaïl Ouchène…
Diversifiée par les styles et les thématiques, cette avant-garde, selon lui, aborde des sujets relatifs à l’homme, à la culture ou à la nature. Ainsi, Ali Ali-Khodja, Arezki Larbi, Yahia Bourmel, Larouk, Ghouar, Benazzouz, Djoua, Djamal Talbi ou Smaïl Ouchène sont des paysagistes abstraits en partant d’une connaissance profonde de la nature de leur pays, de ses couleurs et de ses lumières, qu’ils interprètent avec un souci poétique qui exprime un rapport charnel avec un sol, avec une terre mais surtout avec le souci de faire des images de leur temps.
Nedjaï travaille sur le social et le politique, usant d’une symbolique qui ne privilégie pas le discours sur l’esthétique, tout comme Jaoudet Gassouma, qui est dans la dérision, l’ironie, l’humour. Tahar Ouamane, quant à lui, fait avancer le signe qu’il investit de manière plastique. Original, installé aux États-Unis, Smaïl Siaghi travaille sur les circuits intégrés imaginaires dans un style hyper réaliste. Driss Ouadahi, qui vit en Allemagne depuis 1997, vient d’obtenir le « Dak’Art 2014 ».
Un suivi soutenu de la création nationale
« L’art est création et labeur, connaissance, compétence, intelligence, sérieux et exigence. C’est un domaine où des Algériens, de Mammeri à Hemche, en passant par Guermaz, Aksouh, Nédjaï, Larbi, Boucetta, Khelloufi, Belkhorisset, Djeffal, Djamel Talbi, Siaghi ou Ouamane ne cessent d’apporter du sens et de l’émotion articulés sur une pensée profonde, » poursuit Ali El hadj Tahar qui dit avoir basé sa sélection sur « la création, la production et la qualité des œuvres et non pas sur la réputation souvent surfaite .
Chacun des artistes de la série est présenté par au moins une page de texte et une reproduction de son travail ». Évidemment, prévient l’auteur, « les textes sur les artistes comme Issiakhem, Khadda, Mesli, Benanteur, Guermaz, Baya, Atlan, Mammeri, Dinet, Aksouh ou Benaboura font parfois plus de huit pages ». Aux artistes importants du second volume, l’auteur consacre aussi plusieurs pages, notamment à Larbi, Larouk, Belhachemi, Djeffal, Ouadahi, Nedjaï, Siaghi, Boucetta, Guita… Les artistes qui vivent et travaillent à l’étranger sont aussi représentés (Ouadahi, Hachani…) et qui s’inscrivent dans le circuit international de l’art.
Parce qu’ils sont articulés autour d’une approche pluridisciplinaire, les livres de la série « La peinture algérienne » sont incontournables pour la compréhension de l’art algérien qui, selon l’auteur, est « le domaine le plus vivant, le plus riche et le plus diversifié de nos expressions culturelles modernes ». Également artiste peintre, El Hadj Tahar s’est spécialisé dans la critique d’art dès ses débuts dans la presse, en 1974. Derrière cet ouvrage, il y donc « un suivi soutenu de la création nationale », à travers notamment la fréquentation assidue des galeries d’art, la rencontre des d’artistes, etc.
Des ouvrages qui font sortir de l’ombre plusieurs artistes
Prévus initialement dans la cadre de la manifestation « Constantine, capitale 2015 de la culture arabe », deux autres livres n’ont pas été publiés « Faute d’argent, le budget du ministère de la Culture ayant été entretemps réduit », nous apprend l’auteur. Intitulé « La Figure et sa présence », un autre titre supposé figurer dans la même série présente « les artistes figuratifs ou semi-figuratifs » toutes générations confondues, exceptés les fondateurs.
Sont présentés près cent dix artistes vivants ou décédés, résidant en Algérie ou à l’étranger, dont Brahim Achir, Allalouche, Belkhorissat, Belmekki, Bettina, Bourdine, Djeffal, Hakkar, Houamel, Hamidouche Layachi, Souhila Belbahar, Mokrani, Oulhaci, Salah Malek, Ismaïl Samsom, Sellami, Sid-Ahmed Stambouli, Hocine Ziani…
Quatrième ouvrage, « Le Signe » présente, quant à lui, une tendance qui interprète la lettre arabe et les signes et motifs de la cosmogonie berbère avec les outils de la peinture de chevalet. Trente-deux peintres y sont présentés dont Hamza Bounoua, Chegrane, Martinez, Koraïchi, Silem, Zoubir, Karim Sergoua, Tibouchi…Ali El Hadj Tahar dit prévoir d’autres livres dans cette série consacrée à la peinture algérienne, notamment « La Peinture naïve » qui sera consacrée à une tendance de l’art algérien développée dans les années 1960 et qui a connu ses heures de gloire ces mêmes années avec des artistes comme Gheddouchi, Nedjar, Kheïra Flijani, Souhila Belbahar, Aïcha Haddad, Boubekeur Hamsi… « Les nouveaux naïfs sont si nombreux que ce serait une gageure de seulement les inventorier… »prévient Ali El Hadj Tahar.
« La Miniature et l’enluminure », sixième ouvrage de la série, présentera des disciplines qui ont engendré de grands noms : Omar et Mohamed Racim, Temam, Hamimouna, Ranem, Bendebbagh… Les générations actuelles perpétuent cet art et sont représentées par des dizaines d’artistes qui suivent l’école de Racim et Temam ou celle, plus moderne, de Hachemi Ameur. Plus de cinquante miniaturistes, enlumineurs et calligraphes figurent dans ce livre.
Un dernier ouvrage, « L’Orientalisme en Algérie », une production riche, dense et variée des artistes voyageurs ou résidents qui ont capté des images saisissantes et fortes du pays du soleil. Selon l’auteur cet ouvrage mettra en valeur des artistes qui ont mis toute leur énergie, et parfois leur génie, leur audace et leur sens de l’aventure au service de l’exploration et de l’expression artistiques.