Plusieurs milliers de manifestants se sont rassemblés samedi matin dans le centre d’Alger, bloqué par un imposant dispositif policier pour tenter d’empêcher la manifestation à l’appel de la Coordination nationale pour le changement démocratique (CNCD), interdite par les autorités.
Toutes les rues menant à la place du 1er mai, à Alger, sont bloquées par une véritable armada policière essayant d’empêcher les manifestants d’accéder. Plusieurs milliers de manifestants sont tout de même parvenus à passer, scandant des slogans dont « Bouteflika dehors! », « Algérie libre et démocratique », « non à l’Etat policier », a-t-on constaté sur place.
De nombreux policiers faisaient mouvement, pour tenter de disperser et fractionner sans ménagement les groupes de manifestants, procédant à des interpellations. Le numéro deux de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), Me Moustapha Bouchachi, a souligné que « nous allons continuer à nous battre, l’exemple nous est donné par nos frères tunisiens et égyptiens ».
Selon le président de la LADDH, Me Ali Yahia Abdenour, qui se trouvait sur place, 10.000 personnes ont pu échapper aux barrages pour rejoindre la manifestation, mais 400 personnes ont été arrêtées, dont des avocats, des députés, des femmes et des représentants de la presse étrangère. Fodil Boumala, l’un des fondateurs de la CNCD, fait également partie des personnes arrêtées. Le ministère de l’Intérieur évoque le chiffe de 14 personnes arrêtées lors que les organisateurs parlent de centaines.
Le président du RCD, Said Sadi, s’est indigné que « le doyen de la Ligue de défense des droits de l’homme algérien, Ali Yahia Abdelnour, âgé de 90 ans, ait été malmené » par les forces de l’ordre, a-t-il affirmé par téléphone à l’AFP. Ali Yahia avait été blessé alors qu’il venait en aide à une femme malmenée par la police.
« Pour nous, la marche est une réussite en dépit du dispositif policier. C’est le début d’un processus parce que nous allons organiser d’autres manifestations jusqu’à ce que ce régime tombe », a-t-il déclaré
Une vingtaine de jeunes contre-manifestants criaient fort leur soutien au président Abdelaziz Bouteflika, criant « Bouteflika n’est pas Moubarak », en référence à la chute la veille du président égyptien Hosni Moubarak. Ces baltaguia algériens seraient manipulés par la police selon des témoignages sur place.
A Oran, la grande ville de l’ouest de l’Algérie où une manifestation a aussi été interdite par les autorités, un rassemblement a commencé sur la Place du 1er novembre et une dizaine d’interpellations ont déjà eu lieu, a rapporté un correspondant de l’AFP.
Les participants, au nombre de 400 à 500 personnes avant 11H00, comprenaient des artistes venus exprimer leur soutien et dénoncer la fragilité de leur statut. Vêtus de blanc en position de mime, deux d’entre eux, avec une croix rouge dessinée sur les lèvres, ont été interpellés.
Figure aussi parmi les interpellés à Oran, le correspondant du quotidien arabophone El Khabar, Djaafar Bensaleh, qui a répondu à un appel téléphonique de l’AFP dans le fourgon de la police.
A Bougie, en petite Kabylie, et plus loin à Annaba, principale ville de l’est algérien, la situation était calme, selon des correspondants de l’AFP. La marche de samedi avait été annoncée par la CNCD dès sa création le 21 janvier dans la foulée des émeutes meurtrières contre la cherté de la vie du début de l’année, qui ont fait cinq morts et quelque 800 blessés.
Les autorités ont pris des mesures draconiennes avec près de 30.000 policiers déployés dans la capitale sur le parcours prévu des marcheurs de la Place du 1er mai jusqu’à la Place des Martyrs, distante d’environ 4 km.