Sadika Kadri, la plus jeune des moudjahidate au niveau national, âgée actuellement de 72 ans, a témoigné, dimanche à Bouira, de son engagement héroïque durant la guerre de libération nationale et des souffrances qu’elle a endurées avec ses compagnons d’arme à cette époque.
Née le 6 avril 1944 à Ouled Sidi Brahim relevant actuellement de la wilaya de Bordj Bou Arréridj, la moudjahida Sadika Kadri a, lors d’une rencontre organisée par la radio locale à l’université Akli Mohand Oulhadj à la veille de la célébration de la Journée mondiale de la femme, rendu un vibrant hommage à toutes les femmes martyrs et moudjahidate qui se sont jetées à plein corps dans la bataille pour combattre l’ennemi colonial et libérer le pays.
« Moi-même, malgré mon très jeune âge à l’époque, j’étais parmi ces femmes paysannes ayant un courage exemplaire et la détermination à m’engager aux côtés des moudjahidine dans les maquis pour combattre l’ennemi », a souligné cette moudjahida qui a rejoint les rangs de l’Armée de libération nationale (ALN) au début de l’année 1956, lors d’un entretien accordé à l’APS en marge de cette rencontre.
« En profitant de mon petit âge pour tromper la vigilance de l’armée coloniale, les responsables de l’ALN m’utilisaient comme agent de liaison puis collectrice de cotisations et de fonds pour financer la cause nationale alors que j’avais à peine 12 ans », s’est-elle remémorée devant un parterre de femmes responsables parmi lesquelles une chef de Sûreté, des enseignantes et deux directrices de centre psychopédagogique.
Selon ses témoignages, Mme Kadri, fille d’Ahmed Kadri, militant du Front de libération nationale (FLN) et officier de l’ALN dès 1955 dans la région puis à la Wilaya III historique (1958-1962), a participé à plusieurs opérations de ravitaillement et d’armement au profit des combattants de l’ALN notamment dans les régions de Bouaiche (Bechloul), ainsi qu’à Tizit, un village qui relève actuellement de la commune de Souk El-Had dans la daira d’Iferhounen.
« J’ai beaucoup travaillé à Tizit, la seule petite bourgade montagneuse qui n’était pas contrôlée à l’époque par l’armée française, et où j’apportais mon aide aux moudjahidine en leur donnant toutes les informations concernant les mouvements de l’armée coloniale, et en leur fournissant des armes et des munitions ainsi que de la nourriture », a raconté cette moudjahida, qui a survécu à plusieurs tentatives d’arrestation par l’armée française.
« Durant mes missions, j’agissais librement et sans que l’armée se rendre compte de mes activités de soutien à l’ALN, mais quelques mois après j’ai failli être arrêtée à plusieurs reprises par l’armée française n’était-ce ma vigilance et l’assistance apportée par certains citoyens de la région de Bechloul (est de Bouira) », a-t-elle confié.
Mme Sadika Kadri s’est rappelée en outre et avec amertume des tortures et « pratiques inhumaines » qu’exerçaient les soldats français sur les femmes suspectées de soutien aux moudjahidine. « Plusieurs femmes parmi mes compagnes ont été arrêtées et séquestrées dont deux d’entre elles avaient été brûlées vives devant les yeux des villageois de Thizzit après leur refus de divulguer les secrets des moudjahidine qui activaient dans cette région forestière et montagneuse », a-t-elle témoigné.
La moudjahida a saisi l’occasion de la rencontre organisée dans le cadre de la célébration de la Journée mondiale de la femme pour appeler l’assistance, notamment les jeunes étudiantes, à s’armer de savoir et de courage en vue de contribuer au développement et à la modernisation du pays et ce tout en préservant la mémoire nationale et l’histoire des martyrs