Avec El Watan week-end qui ne paraîtra plus, et de nombreux titres de presse qui mettent la clef sous la porte, une question se pose : jusqu’à quand la presse indépendante continuera-t-elle à souffrir ?
Ce n’est un secret pour personne, la publicité est la colonne vertébrale qui maintient un organe journalistique debout, ce n’est ni l’audience, ni le nombre de tirage ni le nombre de visites qui assurent la continuité d’un média, c’est grâce aux bannières, affiches et spots publicitaires qu’un organe journalistique arrive à être rentable et arrive à subvenir à ses besoins financiers et à ceux de ses employés. Toutefois les choses ne se passent pas aussi facilement que ça en Algérie. Connaissant sa vitalité pour un média, la publicité a toujours servi comme moyen de pression sur la presse, définissant sa ligne éditoriale, les lignes à franchir et à ne pas franchir.
Cependant bien des journaux ont pu résister à ce chantage et moyen de séduction. Ils ont pu garder leur objectivité, neutralité et professionnalisme, un choix non seulement audacieux, mais également risqué, en effet, nombreux sont ceux qui n’ont pas résisté financièrement en adoptant cette méthode de résistance.
Mis à part le favoritisme dans la distribution, un autre malheur a touché le marché de la publicité, suite à la crise économique qu’a connu le pays ses dernières années et qu’il continue à connaitre, le marché publicitaire public a été touché ce qui a induit la réduction des espaces publicitaires attribués aux journaux. Selon le site E-bourse Algérie, les budgets publicitaires auraient chuté de 61,675 milliards de dinars à 51,571 milliards de dinars entre 2016 et 2017, « Une différence de 10 milliards de dinars soit 100 millions de dollars provoquée notamment par la baisse des volumes annonces légales distribuées par l’agence officielle, l’ANEP » , détaille le site.
Pour garder la tête hors de l’eau, le quotidien El Watan a par exemple lancé récemment une édition numérique payante pour la somme de 300DA par mois, « El Watan a lancé hier ses premiers abonnements à son édition numérique, pour les détenteurs de cartes interbancaires CIB, en attendant d’élargir l’offre aux propriétaires de cartes Eddahabia d’Algérie Poste, dans les tout prochains jours. Ces abonnements permettront à nos lecteurs d’avoir leur journal quotidien en version PDF dès 6 h, directement sur leur smartphone ou leur ordinateur» a annoncé le journal en mars dernier.
Cette initiative n’a toutefois pas réussi à combler le vide financier causé par le manque de publicités.
Avec les lecteurs qui boudent l’information payante et l’inégalité dans la distribution, plusieurs journaux se voient contraints de mettre la clef sous la porte.
En raison de manque des recettes publicitaires, multiples journaux sont appelés à disparaître, aucune aide de la part de l’Etat grâce à l’ANEP et ce malgré les promesses récentes du gouvernement de «l’adoption de la transparence et de l’objectivité dans l’attribution de la publicité publique, sans exclusion ni discrimination aucune entre l’ensemble des médias publics et privés», et que «tous les médias auront leurs quotas équitablement et sans exclusivité.»
Des promesses dans le vent, de la poudre aux yeux, appelez ça comme vous voulez, une chose est sure, la presse algérienne agonise mais garde toutefois espoir, et continuera à assurer sa mission première : informer.
M.A.Y