par Kamal Guerroua
Comment gérer cette situation compromettante pour les intérêts de la nomenklatura ? Comment sortir de cette crise, sans y laisser des plumes, trop de plumes, sa peau même ? Le pouvoir, sinon tout le système, est dans l’impasse. Une impasse qui l’oblige à revoir rapidement sa copie, avant qu’il ne soit tard. Pour preuve, malgré la démission forcée de Bouteflika, la rue n’a pas abdiqué ; elle continue encore de manifester pour se débarrasser de toutes ces têtes de l’hydre lesquelles, après avoir tiré le pays vers le bas, comptent maintenant se réinvestir dans le Hirak populaire, pour le parasiter et résister au vent de la révolte. Or, plus que cette image écornée d’une Algérie longtemps assise sur un fauteuil roulant et en retrait dans le concert des nations, les masses n’oublieront pas de sitôt les marques d’humiliation répétées à leur encontre par des élites nombrilistes, prédatrices et sans scrupules. Tourner la page et aller de l’avant semble être le refrain préféré de tous ces jeunes qui déferlent par millions dans les rues. Rivalisant d’humour et de génie, ils ont donné une leçon inoubliable à ces oligarques qui, apparemment, vivent sur une autre planète et ne conçoivent pas que, si les foules battent le pavé chaque vendredi, c’est parce qu’elles les rejettent en bloc et ne veulent plus désormais voir leurs visages ni entendre leurs noms. Pas de violence ou d’actes de vandalisme constatés, c’est tout autre chose que la jeunesse a inventé : la révolution du sourire made in Algeria. Une révolution de fleurs et du printemps, une révolution de paix et de rupture, portée en bandoulière par des millions de femmes et d’hommes convaincu(e)s que l’Algérie n’est ni un royaume ni une autocratie ou un califat, mais une démocratie sur fond vert-blanc, frappée de croissant rouge, appartenant à tous ses enfants sans exclusive. «Yetnahaou gâa!» (qu’ils s’en aillent tous !), lit-on sur les pancartes et les banderoles en plein Alger. Cela résume tout de la désapprobation populaire des manœuvres de ceux d’en haut ! Face à cette nouvelle réalité, les oligarques à la tête de ce système pourri tremblent, mais hésitent encore à descendre de leur piédestal pour concéder un geste symbolique en faveur de ceux d’en bas, ceux de l’Algérie de la périphérie. En revanche, les Algériens sont plus que jamais déterminés d’en finir avec cette ère d’autoritarisme et de corruption massive. Ils veulent un Etat de droit et de liberté qui puisse garantir l’équilibre des pouvoirs, la primauté du politique, la justice sociale, l’égalité des chances. Bref, ils aspirent à une Algérie qui avance !