La commission mixte des historiens algériens et français se réunit à Alger du 20 au 24 mai. Benjamin Stora, président de cette commission côté français, précise que les discussions de cette cinquième réunion porteront principalement sur la conquête coloniale du 19e siècle. L’objectif de ce travail est de « réconcilier les mémoires » et de « regarder vers l’avenir ».
Benjamin Stora, interviewé sur les ondes de la radio nationale hier, a répondu à une question sur la prochaine visite de Abdelmadjid Tebboune en France. Il a déclaré qu’il s’agissait d’«une nouvelle occasion pour la France de reconnaître son passé colonial» ainsi que les «massacres» commis durant cette période. Il a souligné l’importance de regarder vers l’avenir.
Stora a insisté sur la nécessité d’engager des efforts, particulièrement du côté français, pour atteindre une réconciliation mémorielle. Il qualifie cette étape d’essentielle pour établir des relations stables et saines entre les deux pays. Selon lui, l’Algérie, en tant que grand pays, offre un terrain propice à l’essor de partenariats significatifs et représente un acteur incontournable à l’échelle africaine.
Sur les aspects techniques, Benjamin Stora a expliqué que les deux parties s’attelleront à établir une chronologie précise des massacres, des déplacements de populations et des dépossessions foncières. Ces événements ont laissé place à une colonisation de peuplement, entraînant une déstructuration de la société algérienne.
Stora insiste sur l’impératif de se pencher sur les origines de la colonisation. « Si l’on ne se confronte pas à l’origine de la conquête coloniale, nous serons incapables de saisir les événements ayant marqué la fin de cette période coloniale. » Il souligne la nécessité d’identifier les personnages historiques importants, d’élaborer des biographies, de localiser les lieux des grandes batailles et des massacres. Il insiste aussi sur l’importance de faire l’inventaire des archives autour de toutes ces questions.
La question des archives à l’ordre du jour
L’historien a détaillé qu’environ deux millions de documents d’archives relatifs à cette période ont été numérisés en France. Les discussions portent principalement sur la restitution des archives authentiques, notamment celles liées à l’émir Abdelkader. Cela inclut ses biens personnels tels que ses épées, son burnous, ses écrits religieux et son exemplaire du Coran.
Benjamin Stora a exprimé son avis d’historien, soulignant que c’est au président français de trancher cette question. Concernant la restitution des documents originaux, Stora a expliqué que cette démarche nécessite l’adoption d’une loi en France. « Je sais qu’une loi est en cours de préparation, concernant un ensemble de documents et d’objets. Cette loi ne se limitera pas à l’Algérie, mais concernera également d’autres pays africains. »
Il ajoute qu’« en attendant l’adoption de cette loi, je suggère que des gestes soient accomplis, notamment en ce qui concerne la figure de l’émir Abdelkader ». Stora a aussi demandé la restitution de divers traités, tels que celui de la Tafna et le traité Desmichels, ainsi que la bibliothèque de l’émir Abdelkader, qui comptait environ 3000 volumes.
L’approche Stora pour la reconnaissance
En revenant sur les recommandations de son rapport de 167 pages remis au président Emmanuel Macron, Stora a évoqué un travail visant des objectifs clairs et tangibles. Il a notamment mentionné la reconnaissance des assassinats de Maurice Audin et de Boumendjel. « J’ai formulé des demandes très concrètes. Je ne me suis pas contenté de généralités », a-t-il déclaré.
Il a aussi posé des questions sur les circonstances entourant l’assassinat de Larbi Ben M’hidi et sur le nombre de personnes disparues. Stora insiste sur la nécessité d’un travail rigoureux pour avancer vers une véritable réconciliation entre la France et l’Algérie.
La commission mixte des historiens algériens et français continue de travailler pour une meilleure compréhension mutuelle et une réconciliation des mémoires. Les discussions à Alger marquent une étape importante dans ce processus complexe mais essentiel pour les relations futures entre les deux nations.