L’Organisation des pays exportateurs de pétrole a baissé ses objectifs de production afin de faire remonter les prix. Un revirement de la stratégie saoudienne qui imposait des prix bas pour contrer l’offre de son rival américain.
L’Arabie saoudite a cédé et tout le monde a été surpris. Après avoir joué pendant deux ans les chantres des prix bas pour le pétrole, le royaume wahhabite a accepté la décision de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), mercredi 28 septembre, de baisser les objectifs de production de pétrole afin de faire remonter les prix.
C’est la première fois, depuis 2008, que le club des pays producteurs rehausse le seuil et Riyad a dû avoir du mal à l’accepter. C’est, en effet, un virage à 180 degrés pour l’Arabie saoudite.
Le royaume s’opposait à cette option depuis près de deux ans pour chercher à « épuiser les investissements dans le pétrole de schiste américain”, rappelle Thomas Porcher, professeur associé à la Paris School of Business et auteur de « 20 idées reçues sur l’énergie ». Ce type de pétrole nécessite des investissements conséquents qui ne sont rentables que si le prix du précieux hydrocarbure est élevé.
Pourquoi ce revirement ? L’Arabie saoudite n’a pourtant pas gagné sa guerre de prix contre les États-Unis. “Les investissements américains ont certes ralenti, mais le pétrole de schiste a plutôt bien résisté”, souligne Thomas Porcher.
Sauvez le soldat Opep
Riyad a agi pour “ressouder l’Opep et éviter une scission”, assure l’expert français. Plusieurs pays membres du cartel souffraient économiquement de l’entêtement saoudien. Le Venezuela ou l’Algérie figurent parmi les pays au monde les plus dépendants des exportations de pétrole pour remplir leurs caisses publiques.
Entre les revendications des “partenaires” de l’Arabie saoudite au sein de l’Opep, la dégradation des finances publiques saoudiennes, la baisse de la demande mondiale de pétrole, Riyad a finalement lâché du lest.
C’est donc, avant tout, une défaite de l’Arabie saoudite face aux avocats d’une augmentation du seuil de production. Riyad assurait qu’il fallait tenir pour que le pétrole traditionnel ne perde pas de terrain sur le long terme face au pétrole de schiste.
Effets incertains sur le pétrole américain
Mais le danger de scission au sein du club des pays producteurs devenait trop pressant. “L’Arabie saoudite risquait de devenir le pays de référence d’une organisation qui n’avait plus ou presque plus d’influence”, résume Thomas Porcher pour qui la décision de baisser les objectifs de production relève avant tout de la volonté de “resserrer les rangs”.
Reste encore à constater l’étendue réelle des dégâts de deux ans de prix faibles sur le pétrole de schiste américain. “Les cycles d’investissement sont de deux ans, donc les effets de la politique de bas prix vont devenir apparents à partir de 2017 car, jusqu’à présent, si le secteur américain résistait bien, c’est aussi parce qu’il vivait encore sur les investissements passés”, conclut Thomas Porcher. Peut-être que sans le savoir, l’Arabie saoudite a mis un terme au bon moment à son agressive stratégie contre le pétrole américain.