L’Arabie saoudite tente de démontrer sa solvabilité dans une lutte contre un terrorisme que ses organismes sous-traitants n’ont jamais cessé de financer.
Il aura suffi que l’ Arabie saoudite annonce avec emphase la constitution d’une coalition musulmane pour la lutte contre le terrorisme pour que, tour à tour, le Liban exprime son étonnement de n’avoir à aucun moment été pressenti quant à la formation de cette nouvelle force armée et que d’autres pays comme le Pakistan, l’Indonésie et la Malaisie clament leur totale ignorance de cette initiative.
Cette inscription d’office que le gouvernement saoudien a opéré, au mépris des traditions diplomatiques internationales, pose de sérieux problèmes de crédibilité, d’une part, et de responsabilité, d’autre part.
A quoi rime, en effet, cette annonce impromptue d’une organisation sur le modèle atlantiste destinée à combattre le terrorisme? Quelles en seront les cibles et sur la base de quels critères? Embourbée dans le chaos yéménite où son intervention n’est plus cette promenade d’un jour que les stratèges saoudiens prédisaient, l’armée saoudite a certes besoin de forces suppléantes mais est-ce là sa seule motivation?
Le fait que les initiateurs aient écarté l’éventualité d’une adhésion de l’Algérie à cette coalition peut se comprendre dés lors que le dogme de notre pays, maintes fois réitéré dans les instances de la Ligue arabe et ailleurs, repose sur la Constitution qui interdit à nos forces armées de sortir du champ national, sauf cas exceptionnel comme en 1973.
Mais pourquoi d’autres pays comme l’Iran, l’Irak ou la Syrie ont également été oubliés sinon parce qu’il s’agit de pays où prédomine une importante communauté chiite? Donc, l’objectif de cette organisation est de combattre le «terrorisme chiite» présupposé et d’ouvrir la voie à une aventure sanglante entre chiites et sunnites au moment où Israël poursuit avec une morgue sans égal ses meurtres et ses exactions contre le peuple martyr de Palestine.
Inquiète des accusations qui ont cru ces temps derniers non seulement de la part des ONG mais également de gouvernements bien au fait des compromissions saoudiennes, l’Arabie saoudite tente de démontrer sa solvabilité dans une lutte contre un terrorisme que ses organismes sous-traitants n’ont jamais cessé de financer et d’encourager en Afghanistan, en Irak, en Syrie et même en Libye.
Les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis et ceux du 14 novembre dernier à Paris portent la même signature, qu’il s’agisse d’Al Qaîda ou de Daesh et les parrains ont beau clamer leur innocence, personne n’est dupe au final. Le problème est que les Saoudiens ne paraissent guère avoir tiré les vraies leçons des échecs antérieurs. Car ce n’est pas la première fois qu’ils enrôlent, sans leur consentement ni même leur consultation préalable, des pays dans leur guerre programmée. Riyadh avait ainsi mobilisé à son insu le Pakistan dans une coalition militaire contre les rebelles houthis, au Yémen. Sauf que le Parlement pakistanais s’était opposé à ce que l’armée participe à la coalition menée par Riyadh contre les rebelles chiites, Islamabad craignant de se retrouver impliqué dans un conflit à dimension confessionnelle, susceptible d’exacerber les tensions entre communautés au Pakistan, où les attaques contre les chiites ont cru depuis quelques années.
En tentant à la fois de se dédouaner de leur rôle nocif dans la montée du terrorisme depuis plus de vingt ans et en essayant d’instrumentaliser la communauté sunnite à travers le monde pour mener une croisade contre la communauté chiite, l’Arabie saoudite a ouvert une autre boîte de Pandore qui met à nu les inombrables errements du wahhabisme et la nécessité d’une recomposition de l’organisation de la communauté islamique (OCI), voire même de la Ligue arabe totalement déviée de son rôle naturel.
Sinon, comment comprendre cette sinistre stratégie alors que l’ennemi mortel écrase sous son joug Al Qods et des milliers de jeunes Palestiniens, abandonnés à leur désespoir?