Suffit-il que se rencontrent les ministres maghrébins de l’Intérieur pour que subitement les pays membres réussissent à agir ensemble et solidairement comme s’ils n’avaient pas passé toutes ces dernières années ( plutôt ces dernières décennies) à s’ignorer superbement ? Les premières années de la décennie 90 n’avaient pas été du tout celles de la coopération maghrébine antiterroriste. Idem pour la coopération arabe antiterroriste. L’Algérie a été bien seule.
Et pourtant, ce n’était pas faute de s’en être adressée à «ses» pays frères. Non pas pour qu’il y ait des aides unilatérales, une sorte d’assistance, mais pour qu’ensemble, ils puissent se doter d’une politique collective de lutte antiterroriste. Mais à l’époque, nos frères arabes et maghrébins, tant au niveau des ministres de l’Intérieur qu’à celui de nos polices réunies ensemble à Alger, refusaient de parler du concept de terrorisme comme ennemi commun à combattre collectivement.
Non, pas l’usage de ce concept. D’accord pour la criminalité organisée, mais pas pour le terrorisme. Evidemment, s’ils refusent même de prononcer ce mot de terrorisme, ils ne pourront pas coopérer. Peut-on lutter contre un mal qu’on veut ignorer ? Chacun des pays «frères» voulait faire croire qu’il n’est pas menacé par ce mal «étranger» à sa société. Evidemment, l’Algérie devait leur servir de «laboratoire». Evidemment, ces pays «frères» avaient fini par subir le terrorisme.
Et malgré ça, ils considéraient être victimes des services algériens. Le Maroc surtout. Suite à ces accusations évidemment non fondées, le royaume du Maroc avait joint le geste à la parole. Décision unilatérale de fermeture des frontières. Il y a des évènements qui ne s’effacent pas facilement des mémoires. Il y a aussi l’accusation de parrainage du Polisario. Quand bien même que toutes ces «accusations» répondent à un besoin consommation intérieure, car il faut bien se construire un ennemi stratégique extérieur qui sert à mobiliser l’opinion publique nationale et surtout à instaurer un climat interne de guerre qui justifiera des lois répressives, les populations ne sont pas dupes.
L’Algérie a mal à son voisinage immédiat. Elle sait que sa sécurité intérieure dépend de variables de l’équation de la situation de sécurité de nos pays voisins. La sécurité intérieure n’est pas en partie fatalement d’essence de politique interne, mais peut être mise en péril par des menaces extérieures, ce qui est le cas présentement avec la situation de crise chez nos voisins. La situation de sécurité en Algérie passerait pour être prise en otage par le rejet des principes jusque-là immuables qui fondent l’action diplomatique et intégrer à celle-ci des éléments d’inflexion à une évolution pratiquement linéaire de la ligne politique.
Accepter de ne plus s’en tenir à des principes ferait certainement courir des risques à la fidélité à la ligne stratégique et donc à la crédibilité de la politique extérieure et de défense. L’intégrité territoriale est à lier à l’unité nationale. Accepter une atteinte à l’intégrité territoriale risque de ressembler à une fission nucléaire dont on ne peut plus en contrôler le processus. Le chaos partout. Un chaos non constructif.