“De 1962 à 2015, toutes les infrastructures publiques, dont les programmes de logements, ont été édifiées sans une étude de sol”, selon le président du Collège national des experts architectes, alors que l’État a débloqué une enveloppe financière dédiée à cet effet.
Dans l’affaire de l’effondrement de l’immeuble à la résidence Urba 2000 à El-Achour, les services techniques de l’APC estiment qu’ils ont fait leur travail à temps et se sont conformés à la réglementation. En adressant au promoteur trois procès-verbaux de contravention en 2014 et une décision d’arrêt de travaux datée de septembre dernier, l’APC d’El-Achour considère qu’elle a effectué toutes les procédures légales relevant de ses prérogatives et de ses compétences afin d’éviter les conséquences dangereuses qui pourraient surgir lors de l’édification du bâtiment en question. La commune voit que son intervention se limite à ce niveau de responsabilité. En d’autres termes, c’est à la wilaya-déléguée de prendre le relais. En dépit de toutes les mises en demeure et les avertissements adressés à l’entrepreneur, l’édifice a bel et bien été construit.
L’initiateur de ce projet n’a aucunement tenu compte des instructions des autorités locales. Il a achevé les travaux de sa construction en toute quiétude. Ils sont des milliers de promoteurs à imposer leur diktat au sein des communes et autres localités en Algérie. Tous les moyens s’avèrent efficaces notamment ceux liés à la corruption pour concrétiser leur projet… “Avec de l’argent on achète même des hommes”, ironise un citoyen avec qui nous avons abordé ce sujet. L’impunité s’est généralisée à travers le territoire national.
“Nous n’avons pas retenu la leçon du séisme de Boumerdès de 2003”, remarque un autre pour dire que la réglementation n’a jamais été appliquée dans notre pays. L’on dénombre quelque 1,2 million de bâtisses inachevées, construites hors normes, voire sans permis de construire. “De 1962 à 2015, toutes les infrastructures publiques, dont les programmes de logements et les équipements, ont été édifiées sans une étude de sol”, déplore Abdelhamid Boudaoud, président du Collège national des experts architectes (Cnea). Pourtant, regrette-t-il, pour chaque projet, l’État a débloqué une enveloppe financière dédiée aux études de sol. Autrement dit, c’est, souvent, le maître d’ouvrage qui triche en accaparant cette quote-part du financement. Pour M. Boudaoud, les responsables locaux ne font pas preuve de rigueur et d’intransigeance dans le traitement de ce type de dossiers de non-conformité. “En se contentant d’adresser un courrier à ces promoteurs indélicats, le service de l’urbanisme de l’APC n’a fait que jeter du papier à la poubelle”, affirme-t-il.
“Il existe un laxisme généralisé”, relève-t-il. Or, chaque commune devrait disposer d’une carte géologique que tout maître d’ouvrage devrait consulter avant de lancer son projet. L’on doit exiger du promoteur un cahier de chantier qui sert de feuille de route afin de suivre convenablement l’avancement des travaux. “Pour le cas de l’immeuble de la résidence Urba 2000, l’enquêteur devrait, de prime abord, demander à l’entrepreneur, qui a validé le fond de fouilles, les terrassements… ?”, explique le président du Cnea. Pour chaque réalisation, l’on doit sommer le promoteur de faire une étude géotechnique. Ce dernier doit également signer un contrat avec un bureau d’études chargé du suivi rigoureux du projet du début jusqu’à la fin. Cet expert avoue que l’architecte doit jouer son rôle de “pilote” de tous les segments de la construction. “Et si l’architecte commet des fautes, l’on doit transférer le dossier à la justice. Mais il faut d’abord le responsabiliser”, souligne-t-il. Par ailleurs, M. Boudaoud estime que le directeur technique et de l’urbanisme au sein de la commune ne doit plus être nommé par le P/APC. Car il demeurera sous l’autorité de ce dernier et ne peut, de ce fait, s’opposer à ses décisions. Il doit être ainsi désigné par le ministre de l’Habitat à qui il doit rendre des comptes…