BRUXELLES – Près d’une soixantaine d’organisations de la société civile sahraouie ont interpellé le président de la sous-commission droit de l’homme (DROI) au Parlement européen, Antonio Panzeri, sur la rencontre organisée mardi avec le président du Conseil national marocain des droits de l’homme (CNDH), affirmant que cet organe du gouvernement marocain n’est pas habilité à représenter les associations sahraouies de défense des droits de l’homme.
« (…) nous voudrions vous informer que le CNDH marocain ne peut pas représenter les organisations sahraouies des droits de l’homme et n’est pas crédible pour parler au nom des Sahraouis », ont-elles écrit dans une lettre adressée au président de la commission DROI du Parlement européen.
Cette commission a organisé mardi, au Parlement européen à Bruxelles, un échange avec le président du Conseil national marocain des droits de l’homme, Driss El Yazami, sur la situation des droits de l’homme au Maroc et au Sahara occidental occupé.
Selon les organisations sahraouies, les violations des droits de l’homme par les autorités marocaines ne cessent d’augmenter, non seulement dans les territoires occupés du Sahara occidental mais aussi au Maroc, en l’absence d’ONG indépendantes et crédibles de surveillance des droits de l’homme et de mécanismes de documentation des cas avérés.
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D’ailleurs, ont-elles poursuivi, les organisations « Amnesty International » et « Human Rights Watch » ont été contraintes, en 2015, par les autorités marocaines à arrêter leurs activités au Maroc en raison, principalement, de leur travail pour une meilleure connaissance de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental occupé.
Les organisations sahraouies de la société civile ont souligné, à ce titre, la « terrible » situation dans laquelle se trouvent les prisonniers politiques sahraouis (près de 60), détenus dans des prisons marocaines, rappelant qu’en décembre 2016, le Maroc a été condamné par le comité de l’ONU contre la torture pour de multiples violations de la Convention contre la torture dans le cas de l’activiste sahraouie Naama Asfari, condamné à la prison à vie.
Son épouse, Claude Mangin s’est vu le 16 avril dernier refuser l’accès au territoire marocain. Elle a entamé le 18 avril dernier une grève de la faim illimitée pour obtenir la restauration de son droit de visite à son mari.
« Comme l’ont signalé des ONG internationales de défense des droits humains, l’utilisation de la torture contre les activistes sahraouis et les prisonniers politiques est une pratique courante. Elle vise à faire taire les voix qui défendent le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination », ont-elles affirmé.
Ces organisations se sont dits « vraiment surprises » de voir la sous-commission DROI au Parlement européen donner la parole au président du CNDH, Driss El Yazami, pour présenter la situation des droits de l’homme, faisant remarquer que « la situation réelle est assez différente des récits officiels marocains ».
« En invitant le CNDH, un organe du gouvernement marocain, votre sous-commission s’est permis d’ignorer et de dissimuler les violations systématiques des droits de l’homme au Maroc et dans le Sahara occidental occupé par les autorités marocaines », ont-elles écrit.
Cette approche de la sous-commission DROI, ont-elles poursuivi, « mine sa crédibilité et nuit à sa réputation ».
Les organisations sahraouies ont appelé cette sous-commission à inviter, au cours des prochaines semaines, d’autres orateurs qui présenteront leurs points de vue sur la situation des droits de l’homme au Maroc et au Sahara occidental occupé.
« Nous vous recommandons fortement d’inviter des représentants de la société civile et des ONG sahraouies de défense des droits de l’homme pour permettre au Parlement européen de mieux connaître et d’évaluer la situation réelle sur le terrain », ont-elles écrit.
Le président de la sous-commission droit de l’homme au Parlement européen, Antonio Panzeri s’est dit mardi favorable à la proposition de l’eurodéputée Marie Christine Vergiat d’organiser un autre débat au Parlement européen avec les ONG de défense des droits de l’homme activant au Maroc et au Sahara occidental occupé. Ce débat devrait intervenir au cours du deuxième semestre 2018.