Le Congrès américain menace de fermer la porte aux réfugiés syriens

Le Congrès américain menace de fermer la porte aux réfugiés syriens

Évoquant la découverte d’un passeport syrien près d’un kamikaze à Paris, les républicains du Congrès américain ont annoncé mardi leur intention de suspendre temporairement l’accueil de réfugiés syriens aux Etats-Unis, contrairement aux voeux du président Barack Obama.

Mercredi, M. Obama a dénoncé « l’hystérie » qui règne aux Etats-Unis à ce sujet, accusant l’opposition d’avoir peur des « veuves » et des « orphelins ».

« Nous ne prenons pas de bonnes décisions si elles sont fondées sur l’hystérie ou l’exagération des risques », a déclaré le président américain à Manille, en marge d’un sommet Asie-Pacifique.

« Mieux vaut prévenir que guérir », a déclaré mardi le président républicain de la Chambre des représentants, Paul Ryan, après trois jours d’escalade politique aux Etats-Unis.

En effet, plus de la moitié des gouverneurs des Etats fédérés et la plupart des candidats républicains à la Maison Blanche ont dit s’opposer à l’accueil de réfugiés syriens, reflétant un mouvement similaire dans certains pays européens comme la Pologne.

Le candidat en tête des sondages pour la primaire républicaine, Donald Trump, a dit mardi qu’il interdirait l’accès au sol américain à tous les réfugiés syriens, chrétiens comme musulmans.

De son côté, la Maison Blanche s’est employée à rassurer 34 gouverneurs lors d’une conférence téléphonique pour expliquer la politique d’accueil des réfugiés et les mesures de contrôle.

Outre le secrétaire général de la Maison Blanche Denis McDonough, des représentants notamment du ministère de la Sécurité intérieure ou encore de la police fédérale FBI ont discuté pendant 90 minutes, avec ces gouverneurs, a indiqué la Maison Blanche.

Paul Ryan a annoncé une proposition de loi rapide, peut-être dès cette semaine.

L’entourage du chef de la majorité Kevin McCarthy expliquait mardi soir que le texte imposerait une pause dans l’accueil de Syriens mais aussi d’Irakiens, en attendant que le FBI mette en place un meilleur système de contrôle des antécédents des demandeurs d’asile. Les élus veulent obliger l’exécutif à certifier que chaque réfugié ne pose pas de menace sécuritaire.

Les républicains, majoritaires à la Chambre et au Sénat, pourraient aussi utiliser les lois de finances qui doivent être adoptées avant le 11 décembre pour restreindre le programme d’accueil des réfugiés.

Le leader du Sénat, le républicain Mitch McConnell, a appelé parallèlement à un moratoire sur l’accueil de réfugiés syriens.

Seuls 2.159 réfugiés syriens ont été admis aux Etats-Unis entre octobre 2011 et le 14 novembre, selon le département d’Etat. Une goutte d’eau par rapport aux centaines de milliers de demandeurs arrivés dans l’Union européenne.

Après que l’image de l’enfant syrien Aylan Kurdi, noyé en Méditerranée, a fait le tour du monde, Barack Obama a déclaré en septembre vouloir en accueillir 10.000 avant la fin septembre 2016. Il a renouvelé son engagement lundi.

Déjà critiques de cette décision avant les attentats de Paris, les républicains ont promis d’agir vite, bien que le doute persiste sur l’identité réelle du kamikaze au passeport syrien.

« Notre pays a toujours été accueillant mais nous ne pouvons pas laisser des terroristes exploiter notre compassion », a justifié Paul Ryan.

Critiques contre l’UE

De hauts responsables américains insistaient mardi sur le fait que l’opposition des gouverneurs était déplacée, puisque le programme de réfugiés est une compétence fédérale, et que les réfugiés sont libres de déménager après avoir été installés dans un Etat.

La procédure d’admission est déjà très stricte, martèle l’administration. Les réfugiés sont d’abord sélectionnés par le Haut commissariat de l’ONU parmi les personnes les plus vulnérables (handicapés, victimes de tortures, mères seules avec beaucoup d’enfants…) abritées dans ses camps en Turquie, Jordanie et Egypte, et bientôt au Liban.

Suivent des entretiens avec des fonctionnaires du département de la Sécurité intérieure, une prise d’empreintes, et des vérifications par les services de renseignement et le FBI. Le tout dure entre 18 et 24 mois en moyenne, toutes nationalités confondues.

Selon un haut responsable américain, la moitié des réfugiés syriens admis aux Etats-Unis étaient des enfants, et seulement 2% étaient des hommes célibataires d’âge militaire.

Barack Obama ne peut même plus compter sur le soutien sans faille des démocrates. La plupart adhèrent à son objectif de 10.000 réfugiés, mais quelques uns commençaient à céder à la pression.

Une pause pourrait s’avérer « nécessaire », a lâché le numéro trois des démocrates du Sénat Chuck Schumer (New York).

Les élus citaient aussi de plus en plus une éventuelle retouche du dispositif qui permet aux ressortissants de 38 pays, dont des pays européens, de se rendre sans visa de touriste aux Etats-Unis.