Par Farid Abdeladim
Décédé hier matin des suites d’une longue maladie, Fouad Boughanem, directeur-gérant du quotidien francophone Le Soir d’Algérie, a été inhumé hier au cimetière de Dély Ibrahim. Il a été accompagné à sa dernière demeure par une foule nombreuse. De nombreux confrères et des personnalités de différents horizons lui ont rendu un dernier hommage. Outre des professionnels des médias, entre patrons de presse et journalistes et personnels assimilés, plusieurs hommes et responsables politiques anciens et en exercice étaient présents aux obsèques. On peut citer, entre autres, le président du Conseil de la nation par intérim, Salah Goudjil, l’ancien président de l’APN, Karim Younès, l’ex-ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, le président du COA, Mustapha Berraf, les chefs des partis Jil Jadid et l’UDS, en l’occurrence Soufiane Djilali et Nordine Bahbouh, et le président de Talaie El-Houriat, Ali Benflis.
Fouad Boughanem a rendu l’âme, à l’âge de 65 ans, après avoir lutté plusieurs mois contre la maladie qui l’avait obligé à la convalescence. Le défunt, qui s’est investi totalement dans le journal, fait partie des membres fondateurs et actionnaires du Soir d’Algérie, aux côtés de Zoubir Souissi, de Maâmar Farah, du défunt Djamel Berdina et de Djamal Saïfi. Le Soir d’Algérie est l’un des premiers quotidiens de la presse privée née après la première ouverture dite démocratique de l’Algérie indépendante à la suite des événements douloureux d’Octobre 1988. Après de longues années à la tête de la rédaction de la publication, qui était d’abord un quotidien du soir, Fouad Boughanem a été nommé à la tête du journal à partir de 1999, en remplacement de Zoubir Souissi.
Des déboires avec la justice, il en aura connu, comme en vécurent d’ailleurs nombre de responsables de journaux et de journalistes. Des condamnations également. En 2003, il sera condamné en compagnie du chroniqueur du journal, Hakim Laâlam, pour son engagement politique. Les deux accusés avaient alors écopé de deux mois de prison ferme et de 250 000 DA d’amende pour… “offense au président de la République”, en l’occurrence Abdelaziz Bouteflika. Dans la même année, exactement en juillet, Le Soir d’Algérie a fait l’objet d’une suspension, avec cinq autres quotidiens, alors connus pour avoir des lignes éditoriales qui n’agréaient pas le pouvoir en place. Officiellement, il a été reproché à ces médias “le non-paiement de leurs dettes” auprès des imprimeries étatiques. Mais en réalité, ils avaient payé pour leur engagement politique. Cet épisode n’allait pas décourager l’équipe du Soir d’Algérie, à sa tête Fouad Boughanem. Bien au contraire. Le défunt poursuivit l’aventure, toujours plein de conviction et de la même rigueur, jusqu’à ce que ses forces l’abandonnent… et qu’il rende son dernier souffle.
À l’instar de la grande majorité des éditeurs de la presse privée, née au début des années 90, Fouad Boughanem est issu de la presse publique, la seule à avoir existé du temps du parti unique. S’il a eu l’occasion de voir naître, dans la douleur et non sans difficulté, la presse privée dont Le Soir d’Algérie qu’il a cofondé avec d’autres confrères, le sort a décidé qu’il parte. La mort l’a arraché aux siens, aux amis et à la corporation très jeune. Les confrères qui ont eu à le connaître et à le côtoyer retiennent de lui l’image d’un homme “correct, sobre et discret”. Toujours souriant, le défunt est aussi connu pour sa générosité et sa grande sympathie. Ce sont, en effet, les maîtres-mots répétés par ses proches, ses amis et les confrères rencontrés hier au cimetière. Tous ont témoigné de ses qualités humaines et de sa rigueur professionnelle. Tous reconnaissent en lui un homme de conviction. Fouad Boughanem est parti, laissant une veuve et une fille éplorées, et une corporation endeuillée.
Farid Abdeladim