Ce feuilleton du genre drama s’est démarqué grâce à l’originalité du scénario ainsi que par la justesse et la puissance des comédiens dans leur interprétation à l’instar des deux personnages principaux Abdelkader Djeriou et Youcef Sehairi.
Cette année, contrairement aux Ramadhans précédents, le grand public trouve son bonheur grâce aux productions proposées qui, pour la plupart, offrent enfin un contenu de qualité. Après le succès de la première saison d’El Khawa en 2017 du Tunisien Madih Belaïd (la deuxième saison était un flop en 2018), voilà qu’en 2019, des dramas algériens réalisés par des Tunisiens, des Syriens ou des Turcs enregistrent un énorme succès, comme cela est le cas du feuilleton Ouled lahlal (Les fils de bonne famille).
Né d’une idée originale de Ahmed Aymen El Djouadi et d’une réalisation du Tunisien Nasreddine Sehili, ce programme a conquis les téléspectateurs pour son authenticité. C’est l’histoire de deux frères orphelins Merzak (Abdelkader Djeriou) et Zinou (Youcef Sehairi), qui habitent dans le quartier populaire El-Bahia (Oran). Une sorte de “Robin des Bois” des temps modernes, ce duo pique l’argent des riches corrompus pour subvenir à leurs besoins ou à ceux des autres. Loin des “œuvres” proposées par le passé où l’on ne parle que d’amour et d’histoires à l’eau de rose, Ouled lahlal convainc quotidiennement- l’épisode enregistre pas moins de 3 millions de vus sur youtube- pour son contenu.
En fait, le téléspectateur ne suit pas seulement les aventures des frangins, il est également propulsé au cœur des bas-fonds d’El Bahia (en référence au quartier El-Darb) dans lequel plusieurs personnages sont proposés, notamment ces mères courage veuves ou mariées qui se battent au détriment de leur vie pour nourrir leurs enfants, ces jeunes filles qui tentent de survivre dans un milieu hostile, et ce, en travaillant ou en tentant de trouver un mari. Nous retrouvons également le problème des violences conjugales, de drogue, de kidnapping d’enfants… des ingrédients qui font notre société et qui ont été longtemps occultés par les réalisateurs télé. À travers des dialogues bien ficelés, de la cohérence dans le scénario et la trame, nous découvrons chaque jour un bout de notre réalité que nous ne connaissons pas forcément, seulement à travers les journaux ou les racontars des uns et des autres.
Aussi la particularité de ce feuilleton outre qu’il y a de l’intrigue et des rebondissements dans chaque épisode, est la capacité du réalisateur à faire ressortir la noirceur et la pureté de ses personnages. Dans un décor apocalyptique où la misère ronge les habitants jusqu’à l’os, ces derniers ne sont pas construits sur des stéréotypes du genre “les gens dans le besoin ne survivent que par le crime et la mendicité”. Ils ont des rêves et l’espoir d’un futur meilleur malgré l’amertume et la frustration. Oulad lahlal doit entre autres, sa réussite au casting bien ficelé.
Chaque comédien porte si bien son rôle qu’il nous fait oublier le fictionnel. Pour la plupart issus du théâtre, ces jeunes comédiens oùles plus confirmés se sont surpassés dans leur jeu, comme cela est le cas de Youcef Sehairi, Abdelkader Djeriou, Souhila Maâlem, Mohamed Khassani ou encore Malika Belbey, Imen Noël, Abdellah Bendjellab, Mustapha Laaribi…Cette alchimie entre les comédiens a fait naître une sorte de symbiose, qui a donné un bon résultat : le héros n’est plus le “personnage” mais le quartier en lui-même qui insuffle cette humanité au milieu du chaos.
Cette fiction inspirée de la réalité de la société algérienne, notamment de ces quartiers populaires marginalisés, a permis de concilier des millions de téléspectateurs, toutes classes confondues. Elle a aussi démontré que la scène culturelle regorge de comédiens et comédiennes talentueux, qui n’ont rien à envier aux vedettes étrangères, s’ils sont dirigés par un réalisateur professionnel et font face à des rôles de qualité et de composition.
Hana Menasria