Après avoir occupé le devant de l’actualité politico-médiatique durant de longs mois, le Forum des chefs d’entreprise (FCE) est entré dans une profonde hibernation. En plein débat sur la moralisation de la vie publique suite au scandale de la “cocaïne”, Ali Haddad devient de plus en plus inaudible. Silence calculé ?
Depuis quelques semaines, des rumeurs évoquent, en effet, des enquêtes judiciaires sur les activités d’Ali Haddad. L’information est difficile à vérifier, mais au sein de l’organisation patronale, certains adhérents n’hésitent plus à poser la question ouvertement. Ali Haddad est soupçonné d’avoir transféré des fonds à l’étranger. Comment ? Personne n’a de réponse. Mais personne ne peut expliquer, non plus, comment l’homme d’affaires à l’ascension fulgurante a réussi à acquérir des biens à l’étranger, lui dont les activités sont essentiellement concentrées en Algérie.
Contacté hier par téléphone, Ali Haddad n’a pas voulu répondre. “Je suis occupé. Je rappellerai plus tard”, a-t-il dit. Le contact n’a jamais été rétabli. L’homme n’a pas pour habitude de répondre aux journalistes, a fortiori quand cela concerne des affaires douteuses.
Mercredi dernier, le chef de la toute-puissante organisation patronale s’est contenté d’un message au peuple algérien sur sa page facebook. Ali Haddad, habitué à des adresses dithyrambiques sur le chef de l’État, n’a pas soufflé mot sur le débat en cours sur le 5e mandat. Cela est-il dû à un conflit interne au sein du FCE concernant le soutien ou pas à un “5e mandat” ? Ou alors s’agit-il d’une simple difficulté conjoncturelle ?
Au sein du FCE, on est convaincu que le “président” est dans de beaux draps. “Ali Haddad est invité à se taire, à se faire discret”, indique un membre de l’organisation patronale. Pourquoi ? “On ne sait pas encore ce que les autorités lui reprochent”, indique un homme d’affaires influent. “Une chose est sûre, il ne va pas être débarqué dans l’immédiat”, ajoute notre source qui révèle qu’Ali Haddad a “tout verrouillé” au sein du FCE. “À moins qu’une décision ne vienne d’en haut, les choses seront plus claires à la rentrée”, indique notre source qui rappelle que le congrès du FCE aura lieu en octobre ou en novembre prochains.
D’ici là, Ali Haddad ne doit pas être dans de meilleures dispositions. En plus de ces affaires personnelles, il vient de perdre un membre important du FCE. Mourad Hadj-Saïd, patron de la société Ad display, qui disposait d’un quasi-monopole sur l’affichage publicitaire dans la capitale, a été écroué la semaine dernière. Si rien ne dit qu’il existe une relation d’affaires entre les deux hommes, l’arrestation de Hadj-Saïd sonne comme un avertissement à d’autres membres du FCE. L’homme fait partie, comme la majorité des adhérents de cette organisation patronale, des bailleurs de fonds pour les différentes campagnes électorales pour le candidat Abdelaziz Bouteflika depuis 2004.
Ce n’est pas la première fois qu’Ali Haddad fait profil bas. Fin 2015, les incidents survenus lors du Forum d’affaires algéro-africain ont donné à l’homme d’affaires des sueurs froides. Le patron de l’ETRHB a même été donné partant de la tête de l’organisation patronale. Des médias avaient même annoncé le gel de certains des projets accordés à son entreprise, l’ETRHB. Une explication au bureau du FCE a tout réglé. Du moins momentanément. À l’été 2017, Ali Haddad avait subi des attaques de l’ancien Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune. Le bras de fer qui a duré deux mois a fini par éjecter non pas Ali Haddad, mais plutôt Abdelmadjid Tebboune, qui sera remplacé, en août de la même année, par Ahmed Ouyahia.
L’éclipse d’Ali Haddad de ces derniers temps est-elle l’expression d’une réelle difficulté ou le signe d’une stratégie qui vise à rebondir plus tard ?
Ali Boukhlef