S’il n’épargne aucun pays, le phénomène des cours particuliers a pris ces derniers temps des proportions inquiétantes en Algérie. À telle enseigne que ces cours, qui se limitaient aux élèves des classes d’examen, maintenant, concernent malheureusement même les élèves du primaire.
C’est devenu une mode chez les parents. Si quelqu’un n’assure pas de cours particuliers à ses enfants, c’est comme s’il ne s’en occupait pas bien. Mais pour les spécialistes, cela pose problème, comme le souligne M’hand Hand Ouali, secrétaire national chargé de la pédagogie au Satef. Selon lui, “le premier problème qui se pose pour les cours particuliers est qu’ils doivent être un besoin, non pas une nécessité. Ils doivent être dispensés pour les élèves qui sont dans le besoin. Or, chez nous, malheureusement, les apprenants s’inscrivent à ces cours bien avant la sortie des grandes vacances”. De plus, estime-t-il, “ces cours ne sont pas dispensés uniquement par des enseignants qui travaillent dans des établissements scolaires. Des fois, ces cours sont donnés, soit par un enseignant, soit par un universitaire ou quelqu’un d’autre. Avant le mois de septembre, il prépare sa liste, et cela veut dire que c’est devenu une mode chez les parents”.
Et si l’on dit que cela devrait devenir un besoin, notre interlocuteur explique que “si vous avez 2 enfants, voire des jumeaux, l’un d’eux nécessite des cours, l’autre non. Donc, autant donner ces cours pour les gens qui les nécessitent. Ils n’ont pas les même besoins. C’est-à-dire, vous pouvez trouver un enfant qui a besoin d’un certain cours, mais pas de l’autre cours, même dans la même matière”.
Parmi les causes de ce phénomène, Hand Ouali a cité la surcharge des classes. Avec les nouvelles méthodes d’enseignement, nous disons que les enfants ne doivent pas être nombreux dans les salles de cours. Or, on retrouve cette surcharge-là dans les garages où sont donnés ces cours privés. “Un cours qui n’est pas réussi dans une classe, comment voulez-vous le réussir dans un garage où il y a absence de moyens pédagogiques ?”, s’est-il interrogé. Il y a aussi les conditions sociales de l’enseignant, c’est-à-dire un salaire inconsistant. Donc, il se rabat sur ces cours particuliers pour arrondir ses fins de mois. Ce qui est un phénomène mondial, que l’on peut trouver dans tous les métiers. Aussi, selon lui, “les parents ne font plus confiance à l’école publique, surtout à cause de la surcharge des classes. Les départs massifs à la retraite (40 000 durant l’année dernière, ndlr) ont engendré pas mal de problèmes, dont la baisse du niveau des enseignants, puisque les plus expérimentés ont été remplacés par de nouveaux enseignants qui n’ont pas une bonne formation, surtout depuis la fermeture des ITE. Donc, le niveau est devenu très bas, car on ne peut former un enseignant en 15 jours”. Résultat : “Les parents ne font plus confiance à l’école publique”, estime-t-il.
Si les cours particuliers sont devenus une réalité inexpugnable du secteur de l’éducation, qui par ailleurs arrange tout le monde, les parents qui cherchent la réussite de leurs enfants, et l’État, à travers ces cours privés, qui essaie de relever le taux de réussite lors des différents examens, il conviendrait plutôt de les réglementer, à l’instar de ce qui se fait ailleurs : fixer le nombre d’heures par semaine et le nombre d’élèves par salle, imposer le respect des normes de sécurité et d’hygiène (classes appropriées), et les soumettre au contrôle de l’État, par exemple, et au régime des impôts.
A. R.