C’est une véritable réforme de l’école qu’a tracée le Premier ministre lors de son discours, hier, devant les cadres du secteur. Une ouverture sur le monde est préconisée pour former les générations futures surtout que les défis de la mondialisation imposent à l’Algérie une nouvelle vision.
“Même si le pays venait à revivre une crise économique, l’État n’abandonnera jamais les secteur de l’éducation, de la formation et de la santé.” Les propos sont du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui avait tenu à assister, hier, avec la famille de l’éducation, à la conférence nationale dédiée à la rentrée scolaire, prévue le 8 septembre prochain.
Abdelmalek Sellal, qui s’est refusé d’intervenir sur les questions pédagogiques, a tenu à lancer plusieurs messages à l’adresse de la famille de l’éducation à partir du lycée des mathématiques, qui a beaucoup plus fait parler de lui, en termes de problèmes de prise en charge des élèves, qu’en termes de performances.
Tout en rappelant les gros efforts consentis par l’État pour la réalisation de structures éducatives, mais aussi en direction des employés du secteur, le Premier ministre a réitéré la volonté de l’État à améliorer ce secteur “quel qu’en soit le prix”. Il indiquera que la rentrée scolaire constitue un événement majeur pour la société. Pour lui, l’école est le miroir d’un pays, de son développement. Il rappellera que l’objectif suprême, au lendemain de l’Indépendance, était la lutte contre l’analphabétisme, tout en se réjouissant qu’à présent 98% des enfants soient scolarisés.
Le Premier ministre insistera sur l’investissement ininterrompu de l’État dans l’éducation et la formation. “C’est le plus important investissement et il n’y aura pas de renoncement là-dessus et nous allons continuer à investir dans l’école et la formation.”
Ce sont les vrais bâtisseurs de la société algérienne
Le secteur de l’éducation emploie, à lui seul, quelque 470 000 fonctionnaires, “toute une armée !” s’exclamera M. Sellal, avant de saluer cette famille. “Ce sont les vrais bâtisseurs de la société algérienne.” Le Premier ministre refuse de parler de médiocrité de l’école algérienne et en veut pour preuve tous ces bacheliers partis à l’étranger et qui ont réussi partout où ils se trouvent. “D’où sont-ils sortis ?” s’interroge-t-il, avant de lancer : “Cessons d’être pessimistes. Nous avons, certes, des lacunes. Des réformes s’imposent, mais il est inadmissible de tout remettre en cause.”
À l’adresse des syndicalistes, qui maintiennent la menace de grève, il dira qu’il comprend leurs revendications, tout en les invitant à dialoguer sur la base des droits, mais aussi des devoirs. M. Sellal insistera sur le fait que le secteur devrait donner l’exemple aux autres secteurs en matière de gestion des conflits sociaux à travers le dialogue.
Ce qui est attendu de l’école algérienne, selon le Premier ministre, c’est d’éduquer et pas seulement d’enseigner, tout en critiquant le fait que l’on se cache éternellement derrière la démission de la famille. Pour lui, l’importance devrait être accordée au cycle primaire. Dans les pays civilisés, dira-t-il, les meilleurs enseignants se trouvent dans le cycle primaire. Et d’inviter le secteur à s’ouvrir sur les opérations de jumelage, d’autant plus que beaucoup de pays ont exprimé leur disponibilité à coopérer dans ce domaine. Il invitera les responsables du secteur à organiser une conférence, nationale ou internationale, autour de la réforme du cycle primaire.
L’école a été déviée de sa mission durant la décennie noire
Mais il insistera sur le rôle éducatif de l’école : “Durant la décennie noire, l’école nous a noirci les choses. Elle a été politisée et a dévié de sa mission”, avant de se féliciter du fait que l’école commence à rectifier le tir et à reprendre sa mission initiale.
Il interpellera les acteurs du secteur afin de se mobiliser pour bâtir la génération de demain en inculquant aux enfants des notions essentielles, à savoir : “La culture de la violence et du pessimisme ne mène à rien. Il faut renforcer la culture de l’optimisme. Il faut renforcer la culture de l’ouverture, notamment en ce qui concerne les langues étrangères.” Et de préciser : “Nous devons être ouverts, complètement ouverts sur le monde.”
À ce titre, il attirera l’attention sur le fait que la langue chinoise, par exemple, ne soit pas programmée dans le programme d’enseignement, contrairement à d’autres langues étrangères dont l’utilité n’est pas prouvée. “C’est l’économie mondiale qui le commande”, fera-t-il remarquer, histoire de secouer le cocotier de l’éducation, resté enfermé sur lui-même et sur des schémas éculés, révolus. Pour M. Sellal, “nous ne devons plus rester prisonniers du Moyen-Âge”.
La filière des mathématiques représente 8% du secteur, c’est inadmissible !
Il poursuivra ses critiques, en notant que la filière des mathématiques ne représente que 8% de l’ensemble du secteur. Ce qui est inadmissible, selon lui. “Ce n’est pas avec la poésie qu’on mettra en place une politique de défense nationale”, s’exclamera-t-il, avant d’ajouter qu’“un État qui ne base pas sa formation sur les sciences et les mathématiques n’a aucun avenir”. Il citera l’exemple du gaz de schiste que l’Algérie compte exploiter. “Il nous faut nos propres cadres.” Non content de la prédominance des matières littéraires, le Premier ministre insistera sur le développement et l’augmentation de la part des filières scientifiques et mathématiques.
Parmi les motifs de satisfaction, il citera les décisions prises, en ce qui concerne l’allègement de l’emploi du temps, notamment celui du cycle moyen, mais aussi l’allègement des cartables dans le primaire.
Il indiquera que des instructions fermes ont été données aux services de sécurité afin de protéger les établissements scolaires, mais aussi pour lutter contre les maux sociaux, notamment l’usage de la drogue dans les milieux scolaires.
M. Sellal n’omettra pas d’évoquer le scandale du bac 2013. “Pas question de revivre la mascarade du bac. Le bac est une référence, un seuil de formation qui doit être respecté. Il est inacceptable de faire du trabendo avec le bac. On peut tricher sur tout, sauf en matière de formation et d’éducation”, dira-t-il, avant de reconnaître qu’“on a inculqué à ces jeunes la culture de la triche. Ce problème est fondamentalement idéologique. On a l’informel partout, mais on ne peut pas inclure l’informel dans l’éducation”.