Le problème de la cherté du prix des livres demeure posé. La 20e édition du Salon international du livre d’Alger, confirme si besoin est, que les bourses moyennes auront malheureusement beaucoup de mal à pouvoir acheter les livres qu’elles désirent. Quand bien même les visiteurs feront des économies pour ce faire, il n’en demeure pas moins que dans la majorité des cas les prix de certains livres sont tout simplement faramineux, pour ne pas dire astronomiques. Ce constat est particulièrement valable surtout s’agissant des livres d’importation.
Si dans les pays européens, particulièrement en France, la formule du livre de poche permet d’avoir accès presqu’à n’importe quel livre avec des prix plus que raisonnables (entre 3 et 7 euros), chez nous, même les livres de poche sont d’une cherté inouïe.
A titre d’exemple, lors du Salon international du livre, un stand représentant une maison d’édition française a proposé l’autobiographie de Nelson Mandela à pas moins de 1550 DA et ce, en format poche. Et jusqu’à, vendredi dernier, une remise sur ce genre de livres n’était pas encore à l’ordre du jour. D’ailleurs, tous les livres exposés dans ce même stand sont excessivement chers.
C’est le cas par exemple d’un livre de Benjamin Stora méconnu en Algérie, intitulé «Ils venaient d’Algérie», qui se vendait à, tenez-vous bien, 4400 DA. Pourtant, il ne s’agit pas d’un ouvrage d’art ou d’un livre comportant des couleurs qui aurait pu justifier un tel prix hors de portée. Un livre du célèbre philosophe français, Frédéric le Noir sur le Bonheur, pourtant en format poche et de moins de 200 pages est proposé dans le même espace à 1100 DA. C’est le cas de tous les ouvrages qui se trouvent dans ce stand: Hachette Livre International.
Le constat est également identique concernant le stand des Editions Gallimard, l’un des plus convoités par les visiteurs parce qu’il propose un catalogue particulier comportant les plus grands chefs-d’oeuvre de la littérature mondiale, dont une grande partie des prix Nobel, des Goncourts, mais aussi de philosophes ayant marqué l’humanité à l’instar de Freud, Kant, Platon, Adler… Dans cet espace également, malgré qu’il s’agisse de livres de poche, il n’en demeure pas moins que le livre le moins cher dans cette collection connue sous le nom de Folio est à 850 DA. Or, souvent les livres sont cédés ici à plus de 1000 DA pour atteindre les 3000 DA quand il s’agit de nouveaux romans en grand format.
D’ailleurs, les quatre romans de l’écrivain algérien Salim Bachi, «Le chien d’Ulysse», «Kahena», «Amours et aventures de Sindbad le marin» et son tout récent «Le consul» se sont vendus tous à plus de 2000 DA chacun. Des visiteurs s’étonnent même de découvrir que les mêmes livres proposés au stand Gallimard se vendent plus cher parfois le double du prix, que ceux exposés juste à côté dans les stands algériens. C’est le cas notamment des romans de Boualem Sansal qui ont été proposés au stand Gallimard à plus de 1000 DA alors que juste à côté un éditeur algérien les vendait à 450 DA seulement. «C’est à ne rien comprendre», commente un confrère, grand lecteur du reste. Au niveau du stand Gallimard, seuls les livres d’Albert Camus bénéficient d’un traitement de faveur puisque cet exposant fait une exception aux lecteurs en proposant l’ensemble de l’oeuvre du prix Nobel à 450 DA pour chaque titre. Au stand des Editions Flammarion, c’est également la même frénésie des prix. Malgré le fait que tous les livres ont été exposés chez le représentant de Flammarion tout au long des dix journées qu’a duré le Salon, il n’en reste pas moins qu’il a été impossible de trouver un ouvrage à moins de 1000 DA. Pourtant, ce stand propose des ouvrages très intéressants et d’auteurs connus et reconnus dans diverses disciplines comme la littérature, la psychologie, la philosophie et la spiritualité. Compte tenu du catalogue très riche et varié du stand Flammarion, une affluence record y a été enregistrée. Toutefois, les prix très rebutants constatés ont dissuadé la majorité des acheteurs quand bien même ils brûlaient d’envie d’acquérir tel ou tel ouvrage. Seuls les visiteurs qui ont les moyens de se le permettre s’en sont approvisionnés ici. A titre d’exemple, le stand de Flammarion a proposé les romans du célèbre romancier français lauréat du prix Goncourt, Michel Houellebecq à pas moins de 1500 DA et en format poche, sil vous plaît! Des livres de développement personnel très demandés par une catégorie de lecteurs algériens étaient aussi hors de portée de l’acheteur moyen. C’est le cas des livres de Stephen Covey, Eckhart Tolle, Wayne Dyer, Deepak Chopra et d’Anthony Robbins qui se sont vendus à pas moins de 1000 DA. Il n’y a que les romans de Paulo Coelho qui ont bénéficié d’une réduction des prix au niveau du stand Flammarion puisqu’ils ont été affichés à seulement 500 DA. Au début du Sila, le même stand avait affiché les livres de Paulo Coelho à 900 DA. Ce n’est que plus tard que les prix ont été réduits. Même certains éditeurs algériens n’ont pas fait preuve de générosité à l’égard des lecteurs à l’occasion de cette fête du livre en proposant de nouveaux romans et de nouveaux essais à pas moins de 1200 DA. D’autres en revanche, et ils n’étaient malheureusement pas nombreux, ont proposé des livres à des prix vraiment abordables.
Et s’il y a bien un éditeur au Sila dont aucun visiteur n’aurait pu se plaindre des prix des livres, c’est bel et bien celui des Editions Tafat de Béjaïa dirigées par l’écrivain Tarik Djerroud. Ce dernier a affiché des prix abordables et à la portée de tout le monde. Par exemple, le livre La «Politesse en Kabylie» de Bahia Amellal a été proposé à seulement 400 DA, le livre de l’humoriste Fellag à 500 DA, les romans de Tarik Djerroud à 300 DA, «Idir El Watani» à 260 DA… Il y a lieu de conclure en disant que si le Sila a été pratiquement un succès à tous points de vue, il n’en demeure pas moins que les prix des livres restent un élément de frustration pour la majorité des visiteurs. Et c’est le point noir de cet événement qui a fait le bonheur de plus d’un million d’Algérien malgré tout.