La question est de savoir si le renforcement de ses intérêts en Algérie passe par un partenariat stratégique avec Sonatrach.
Le président français, à l’issue de sa visite lundi à Alger, a annoncé le grand retour de la compagnie pétrolière tricolore en Algérie. Une annonce surprenante. Car elle intervient près d’un an après son retrait du gisement de gaz de l’Ahnet situé au sud-ouest sur qui reposaient les espoirs d’un développement rapide des intérêts de la compagnie française en Algérie. Total avait auparavant essuyé un échec dans ses négociations avec Sonatrach en vue de signer un contrat dans la réalisation d’un complexe de vapocraquage d’éthane à Arzew d’un coût estimé à 3 milliards de dollars destiné à l’exportation.
Une situation que n’arrivait pas à digérer la compagnie française puisque deux projets majeurs étaient rayés de son portefeuille d’intérêts en Algérie.
Question de sémantique, s’agit-il d’un grand retour ? En fait, Total n’a jamais quitté l’Algérie. Elle développe en partenariat avec Sonatrach le gisement de gaz de Timimoun situé au sud- ouest. Un champ modeste qui produira 1,6 milliard de mètres cubes de gaz par an en 2016-2017. Total détient également une part non négligeable des marchés algériens des lubrifiants et des bitumes. L’annonce de François Hollande signifie, en fait, un rebond de la compagnie française en Algérie, en direction de ses deux centres d’intérêts majeurs en Algérie : l’amont (l’exploration et le développement de gisements) et la pétrochimie.
Total pourrait négocier actuellement son entrée dans l’exploration et le développement du gaz de schiste ou d’autres ressources non conventionnelles comme le tight gas, ainsi que dans la pétrochimie. “Cela ne peut se faire en dehors de l’appel d’offres”, avertit Abdelmadjid Attar, spécialiste pétrolier. Mais la procédure de gré à gré prévue dans les amendements à la loi des hydrocarbures de 2013 peut être réactivée. En impliquant Total dans l’exploration du gaz de schiste ou dans l’exploitation d’un gisement en production ou en cours de développement. Dans le dernier centre d’intérêt, Sonatrach a dans son portefeuille trois projets pétrochimiques majeurs où pourrait s’impliquer Total : celui de déshydrogénation de propane et production de polypropylène à Arzew, un complexe de méthanol à Arzew, une installation de Linear Alkyl Benzène (Lab) à Skikda. Quant aux projets liés au développement d’une nouvelle capacité de raffinage, deux projets sont inscrits, celui du cracking de fuel à Skikda et une nouvelle unité, MBTE.
Total ne désespère donc pas. Elle veut faire du pays l’un de ses grands relais de développement en Afrique. Dans une vision à long terme. Mais l’Algérie devra-t-elle rester les bras croisés ? Elle peut faire du partenariat de Sonatrach avec Total et Gaz de France une opportunité d’accès au marché français du gaz, en contrepartie d’actifs gaziers en Algérie. Paris a jusqu’ici refusé d’ouvrir ses portes au gaz algérien. Sonatrach avait fermé à Total, à bon escient, le champ de Hassi-Messaoud et ceux de la région de Hamra au sud-est. On est donc loin, jusqu’ici, d’un partenariat stratégique entre les deux pays dans le secteur des hydrocarbures. Pourtant, les opportunités ne manquent pas, qu’il s’agisse d’aller ensemble à l’international, notamment en Afrique ou de faire accéder des produits pétrochimiques produits en commun aux marchés extérieurs. Mais, pour ce faire, une volonté commune est nécessaire. Si elle existe, elle reste jusqu’à présent insuffisante.
K. R.