Comme le «scooter» du présumé tueur de Toulouse, l’affaire Mohamed Merah n’a pas été enterrée, bien au contraire. Après la poursuite en justice annoncée par la famille de Mohamed Merah contre le RAID (groupe d’élite de la police française), l’intention d’opter au même recours exprimée par le père d’une des victimes,
les juges d’instruction en charge de l’enquête ont, selon des médias français, demandé la déclassification de toutes les notes des services de renseignements français relatives à ce dossier.
L’affaire éclatée avant la récente élection présidentielle française refait surface après la défaite électorale de Nicolas Sarkozy. Les juges cherchent à faire la lumière sur d’éventuelles failles des services de renseignements français et aussi récupérer l’intégralité des conversations entre Mohamed Merah et les négociateurs de la police avant l’assaut du RAID, le 22 avril, au terme duquel Mohamed Merah a trouvé la mort.
A ces ingrédients, viennent s’ajouter d’autres. Celui, par exemple, des propos tenus par le nouveau ministre français de l’Intérieur, Manuel Valls, dans un entretien paru au journal Le Parisien, indiquant avoir demandé un rapport sur «ce qui a dysfonctionné dans cette affaire».
«Dès lors qu’un homme, peut-être seul, a pu commettre de tels crimes, nous sommes face à un échec : l’État n’a pas su ou pas pu protéger des Français», a-t-il ajouté. «Il s’agit d’en comprendre les raisons, ajoute le ministre. J’ai chargé la Direction générale de la police nationale (DGPN) et la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) de me fournir une étude très complète sur ce qui a dysfonctionné dans cette affaire».
«Il y aura nécessairement une réforme des services de police au sein de la préfecture de Paris», a conclu le ministre. On est loin de l’aspect catégorique exprimé par Nicolas Sarkozy, alors président de la République française.
Ajouté à tout ça, un livre intitulé Affaire Merah, présenté comme étant une enquête et qui paraîtra le 14 juin. Les auteurs, deux journalistes de l’hebdomadaire L’Express, reviennent avec beaucoup de détails sur l’affaire. Ils mettent notamment en cause les services de renseignements français.
Plainte déposée par le père d’une des victimes
Pour L’Express, qui a publié des extraits du livre, «Mohamed Merah aurait pu, Mohamed Merah aurait dû, être arrêté avant les meurtres».
«C’est l’organisation policière qui est en cause dans le suivi raté du cas Merah, tout comme elle l’est pour l’interminable assaut de la rue Sergent-Vigné», ajoute l’hebdomadaire dans un commentaire accompagnant la publication des extraits du livre.
D’autre part, l’avocate algérienne de la famille Merah, Me Zahia Mokhtari, qui a fait le choix de placer le débat sur le rôle des services de renseignements français dans cette affaire, est convaincue que «Merah a été manipulé et utilisé dans ces opérations par les services français et a ensuite été liquidé pour que la vérité ne voie pas le jour».
L’avocate a indiqué qu’elle remettrait à la justice française «une première liste de trois noms, ceux d’un responsable des services français et de deux autres personnes de nationalités différentes qui ‘travaillaient’ avec Mohamed Merah, pour qu’elles soient entendues dans cette affaire». Selon Me Zahia Mokhtari, qui se déplacerait en France pour le dépôt de plainte, Mohamed Merah avait «demandé à parler avec la presse mais cela lui avait été refusé». Mais plus de 40 jours après la mort de Mohamed Merah, Me Mokhtari n’a toujours pas porté plainte en France.
Mounir Abi