Depuis le premier vendredi du 22 février, le mouvement social pacifique a résisté à toutes les manœuvres visant sa division, mais aussi à toutes les formes de répression et de dissuasion tentées par le pouvoir.
La révolte populaire qui perdure depuis la mi-février n’est nullement un coup d’épée dans l’eau. C’est encore moins “un chahut de gamins”, comme a été qualifié, mal à propos, le soulèvement du 5 Octobre 1988 par un officiel de l’époque, en l’occurrence un certain Ali Ammar, président de l’Amicale des Algériens de France — officine du FLN de l’époque. De l’aveu des spécialistes, l’actuel mouvement est considéré comme le plus important dans les annales de l’Algérie indépendante, aussi bien en terme de revendication qu’au plan de la mobilisation et de l’organisation.
Ce qui a permis de déjouer l’ensemble des manœuvres tentées jusque-là par les autorités contestées dans leur globalité. Depuis le premier vendredi du 22 février, précédé par la marche de Kherrata, le 16 du même mois, le mouvement social pacifique a résisté, entre autres, aux nombreuses manœuvres visant sa division et autre infiltration mais aussi à toutes les formes de répression et de dissuasion tentées par les différents services de sécurité.
Pour le sociologue Nacer Djabi, “la balle est désormais dans le camp des hautes autorités de l’armée”, lesquelles, dit-il, devraient, vraisemblablement, déclarer dans les tout prochains jours, l’annulation de l’élection annoncée pour le 4 juillet prochain. Rappelant que le mouvement avait fait avorter progressivement tous les plans tentés jusque-là par le pouvoir, à commencer par le projet du 5e mandat pour le président Bouteflika puis la conférence nationale et la non-reconnaissance du gouvernement Bedoui, M. Djabi est, en effet, quasi convaincu de l’impossibilité de cette élection. “Toutes les propositions faites, depuis le début, par le pouvoir ont échoué, et ce, grâce à la forte mobilisation populaire. Le peuple va, encore une fois, obliger les autorités à renoncer à ce projet d’élection présidentielle.
Aujourd’hui, la force du mouvement est telle que le pouvoir n’a d’autre choix que de plier devant les réclamations exprimées chaque vendredi par des millions d’Algériens”, analyse le sociologue qui se dit “optimiste et convaincu” que la révolution populaire ne prendra fin qu’après le départ de tous les symboles du système. “Les Algériens qui sortent depuis le 22 février sont plus que jamais déterminés. Ils ne vont pas rentrer chez eux avant que tous les rapaces disparaissent et qu’ils soient remplacés par les responsables que choisiront les citoyens après une période de transition obligatoire”, a expliqué le sociologue qui salue la “grande patience” du peuple. Qu’en est-il du facteur temps ? Le sociologue estime que la révolution populaire n’est pas un coup d’État à expédier en 24 heures, et que le changement profond du système réclamé, nécessite du temps.
D’où son appel à plus de patience et au maintien de la mobilisation dans son caractère pacifique exemplaire. L’endurance des citoyens engagés a été vérifiée notamment lors du premier vendredi du mois de Ramadhan, une période sur laquelle les autorités avaient misé pour voir le mouvement s’essouffler. Pour le sociologue, le premier vendredi de Ramadhan est similaire à celui 22 février, en ce sens, dit-il, qu’il aura donné un nouveau souffle à la révolution.
Farid Abdeladim