Dans un entretien accordé à Liberté, M. Abdelkader Zoukh, le wali d’Alger, évoque les opérations de recasement et les programmes de logements destinés à la résorption de l’habitat précaire. Il a également abordé la sécurité dans les écoles, la crise de la circulation automobile tout en rassurant que tous les projets inscrits dans la wilaya d’Alger n’ont pas été touchés par la rigueur budgétaire du gouvernement.
Liberté : depuis juin 2014, les services de la wilaya d’Alger ont procédé à plusieurs opérations de relogement qui ont touché de nombreuses familles des bidonvilles et des IMR, pouvez-vous M. le Wali nous dresser un premier bilan des opérations menées jusque-là?
M. Abdelkader Zoukh : Tout d’abord, je vous remercie de m’avoir accordé cette belle opportunité pour m’exprimer sur les colonnes de Liberté. Je voudrais vous dire à ce sujet que la wilaya d’Alger a bénéficié d’un programme de logements de 296 000 unités, sous différentes formules. Pour la formule AADL, on compte 82 000 unités. S’agissant d’ENPI, c’est 45 000 unités, 94 000 logements publics locatifs, il y a 42 000 logements sociaux participatifs (LSP). Les segments AADL et ENPI dépendent du ministère de l’Habitat, notre rôle consiste à les accompagner dans le choix du terrain ou dans le règlement des problèmes d’ordre public, ou coordonner et mener certaines actions qui relèvent de nos services. Mais la réalisation directe de ces logements, c’est l’AADL et l’ENPI. Cependant, nous sommes beaucoup plus concernés par ce qui touche le logement public locatif et LSP. Ces deux formules relèvent de la wilaya. Pour cela, il y a eu un recensement qui a été fait en 2007, le président de la République a alors affecté à la wilaya d’Alger un programme de 296 000 logements, parce que le programme global national du président de la République est de 3 millions de logements. La quote-part affectée à la wilaya d’Alger est destiné à l’éradication du logement précaire et les bidonvilles. L’opération de recensement a fait ressortir 72 000 familles, qui habitaient sur les terrasses, dans les chalets, des caves ainsi que des immeubles menaçant ruine et dans les gourbis. On a commencé le recasement en juin 2014. Donc, par rapport à la demande, qui est de 72 000, l’offre est passée à 84 000 unités. C’est dire qu’on était très à l’aise pour mener cette opération jusqu’au bout. Toutes les familles qui sont dans le besoin seront relogées. Ce que je dis à la population : patience et patience. C’est seulement une question de temps. Je peux vous dire donc qu’on a relogé au jour d’aujourd’hui 5 000 familles environ dans le cadre du programme LSP et 30 000 familles dans le cadre du logement public locatif (communément appelé logement social). D’ailleurs, nous sommes en train de préparer une opération pour la fin de ce mois et début décembre de 4 000 logements de type social et 2 000 autres participatifs. Ce qui fera un total de 40 000 familles relogées d’ici la fin de l’année.
Quand on aborde le dossier de relogement, se pose aussitôt la question des recours introduits par des familles exclues. Où en sont les examens de recours ?
-Les commissions de recours sont en train de travailler. Permettez-moi de dire à vos lecteurs qu’il y a des dossiers qui n’ont pas été encore complétés par les intéressés. Ceci dit, nous sommes en train de travailler afin de garantir à chaque citoyen ses droits. La commission est en train d’examiner les demandes cas par cas, puisque maintenant ce n’est pas comme par le passé. Les enquêteurs ont les moyens de vérifier les informations fournies par les demandeurs s’ils en ont déjà bénéficié ailleurs dans une autre wilaya. Ce qui nous échappe actuellement, ce sont les occupants des constructions qui ne sont pas régularisées, ou qui ne veulent pas régulariser. Ces cas pourraient échapper au filtre.
Dans le même registre, peut-on dire aujourd’hui à la faveur des résultats enregistrés que 2016 sera l’année de l’éradication définitive des bidonvilles dans la capitale ?
Effectivement, nous sommes en train de faire tout notre possible. L’éradication de la totalité des gourbis est du domaine du possible pour qu’Alger soit une capitale sans bidonvilles. Sans pour autant avancer une échéance.
Et quel est le sort réservé aux assiettes de terrain récupérées après démolition des bidonvilles ?
-Il importe de savoir à ce sujet qu’il y a deux catégories de terrains récupérés. S’agissant des assiettes récupérées et situées à l’épicentre, les instructions de M. le Premier ministre sont claires à ce sujet. Il nous a instruit de nettoyer et de ne rien faire pour le moment. Ce qui sont situés dans le périphérique et en extra-muros, ces terrains sont réservés pour les projets de logements. Les programmes de l’AADL ou promotionnels de l’ENPI sont lancés dans la capitale grâce à ces assiettes récupérées. Plus de 80% des terrains récupérés ont été affectés à des projets de logements. Il est aussi des terrains qui sont dégagés pour continuer des projets de routes, tel le viaduc de Bachdjerrah ou l’aménagement d’Oued El-Harrach.
Est-il vrai que la hauteur du minaret de la mosquée d’El-Djazaïr, qui est de 270 m, sera-t-il revu à la baisse, en raison du sol qui serait marécageux ?
Non, il n’y a rien de vrai là-dessus. Les gens racontent n’importe quoi. Il y a eu des études qui ont été élaborées sur le sol. Au lieu d’induire le citoyen en erreur, il aurait été judicieux de se rapprocher du ministère de l’Habitat ou de l’agence qui est chargée de la réalisation de la mosquée d’El-Djazaïr et de bureaux d’études et de vérifier sur le terrain. Sachez à ce sujet que la technologie qui est utilisée pour le parasismique au niveau de la Mosquée d’Alger est la première dans le monde. La hauteur du minaret est maintenue à 270 mètres.
Le cas de la surcharge des classes a été également posé cette année dans plusieurs établissements, notamment à Alger-Ouest ? Vos services ont-ils planifié la réalisation de nouveaux établissements pour faire face à ce flux de nouveaux élèves arrivés après les opérations de relogement ?
Nous avons au total un programme de 45 projets lancés et qui sont en cours de réalisation, entre groupes scolaires, cantines, CEM et lycées. Aussi, le gouvernement vient de nous accorder une vingtaine de programmes à réaliser dans ce sens. Ces projets viendront ainsi absorber le déficit en matière de scolarisation soit à l’est ou à l’ouest d’Alger. Le problème ne se pose pas au centre. Je remercie M. le Premier ministre de nous avoir accordé de nouveaux projets, comme CEM et lycées qui viendront prendre en charge tout le déficit au niveau des nouveaux pôles urbains.
Les écoles d’Alger sont-elles sécurisées ? Y a-t-il des mesures spéciales, voire exceptionnelles prises après l’affaire de l’enfant enlevé à quelque mètres du domicile familial à Dely Ibrahim?
-Dieu merci. Ce n’est pas uniquement celles d’Alger, mais ce sont toutes les écoles d’Algérie qui sont sécurisées. Par le passé, j’ai échappé personnellement à cinq attentats terroristes durant la décennie noire. Je n’oublierai jamais d’avoir perdu un chauffeur ainsi qu’un garde rapproché qui est actuellement handicapé et un policier handicapé à vie lors d’un attentat à M’sila. À présent, la sécurité est partout à l’aide des rondes. Dans le cas de problèmes particuliers, ils sont vite pris en charge. Mais, il faut avouer qu’il y aura toujours ces problèmes-là. Je dis seulement que Dieu guide dans le droit chemin ces gens-là. Mais prétendre à une sécurité à risque zéro, il ne faut pas rêver.
M. le Wali, il y a des écoles qui n’ont pas de cantines scolaires, alors que les pouvoirs publics ont dégagé des budgets conséquents pour cela ? Où se situe le problème ?
Normalement, la cantine scolaire est conçue essentiellement pour les zones défavorisées. Il faut avouer qu’Alger n’en a même pas besoin de cantines scolaires. Mais il y a des cantines partout pour des enfants qui ne sont pas bien pris en charge et issues des catégories modestes ou qui sont carrément dans le besoin.
C’est vrai de dire qu’on sert parfois des repas chauds et parfois des repas froids. Comme je l’ai évoqué plus haut dans le programme complémentaire, il y des cantines qui sont en cours de construction. Ajouter à cela, des cantines squattées durant la décennie noire par des indus occupants qui les ont transformées en habitation. Nous sommes en train de travailler pour les récupérer au fur et à mesure, pour les rouvrir aux enfants. Il y a même des classes et des unités de dépistage scolaire (UDS) qui sont squattées. Nous avons 450 établissements dont des classes étaient squattées. Nous sommes en train de faire les enquêtes que les gens qui n’ont pas où aller seront pris en charge. Et les gens qui ont leur bien, on doit les faire évacuer, pour récupérer ces classes.