Des milieux politiques de l’opposition font état depuis des jours d’une large consultation auprès de certaines personnalités nationales, historiques et des entités partisanes et universitaires, ainsi que des associations et organisations de la société civile, autour d’un projet de création d’un front uni de boycott des prochaines élections législatives qui auront lieu dans sept mois.
Selon des informations émanant de ces milieux, il existe une forte volonté de la part de certains acteurs et animateurs qui refusent l’idée d’une participation à des scrutins qu’ils qualifient de « mascarade » et surtout sources « d’illégitimité », car issus de « fraude » caractérisée de la part des partis au pouvoir. Pour ces acteurs de l’opposition, la création de ce front ou bloc est le seul recours pour dénoncer des « pratiques » et tenter de convaincre l’opinion publique de la justesse de leurs thèses.
Cette nouvelle approche survient depuis que la majorité des partis politiques de l’opposition ont décidé ou s’apprêtent à le faire de participer sans conditions préalables aux futures échéances électorales que le gouvernement Sellal va organiser l’année prochaine.
D’abord, au niveau de la coordination nationale des libertés et pour la transition démocratique (CNLTD), ensuite au niveau du pôle des Forces du changement, le mot d’ordre semble être la participation à ces élections, en dépit des critiques acerbes à l’endroit du pouvoir.
Le RCD aura été le parti qui créa la surprise en annonçant qu’il cherchera des sièges au niveau de l’APN en printemps prochain, mettant fin à ses derniers boycotts de 2012. Le MSP ainsi que les autres partis islamistes « modérés » adhèrent à cette option et vont encore attirer d’autres Mouvements politiques.
Même le mouvement de Benflis, qui cherchent à « guider » la charrette de l’opposition, est bien parti pour rejoindre cette frénésie participationniste.
Tout le monde explique cette nouvelle approche par les contraintes des nouveaux dispositifs de la Loi électorale et les menaces qui vont peser sur leur existence en cas de boycott. Le patron du RCD est allé jusqu’à dire que la raison d’être d’une formation politique est de participer aux élections.
Cependant, cette option est vivement contestée par Sofiane Jilali du Jil Djadid, par exemple, qui pense que les principes de la plate-forme de Mazafran ont été trahis et qu’il est impensable qu’on revendique la création d’un organe autonome chargé des scrutins comme condition minimale dans tout processus démocratique et électoral et qu’on accepte d’y aller en connaissance de cause des actions de fraude qu’on va dénoncer plus tard.
Selon nos informations, l’ancien chef du gouvernement, Ahmed Benbitour, aurait été déçu par les récentes positions des partis politiques qui siègent avec lui au sein de la CNLTD, même s’il a confié qu’il comprend les « contingences » partisanes et organiques et les logiques des appareils des partis politiques.
L’autre intellectuel et chercheur en sociologie politique, Nacer Djabi, membre de l’instance de concertation et de suivi de l’opposition (ICS) n’a pas été tendre avec cette opposition, qui manque de « maturité » et recycle les travers qu’elle dénonce, selon ses analyses récentes.
D’après des informations, ces consultations sont menées par Benbitour, Sofiane Jilali, Karim Tabbou (transfuge du FFS), Amar Khebaba (un ancien chef d’Ennahdha) et d’autres militants connus de la société civile.
Des anciens moudjahids et des personnalités historiques seraient sur le point de les rejoindre. Leur objectif est la création d’une alliance politique nationale de différentes sensibilités qui appellent au boycott des élections.
Un manifeste politique serait sur le point d’être rédigé pour la circonstance, d’autant que certains veulent rééditer l’expérience du boycott de l’élection présidentielle de 2014 qui avait conduit à la création d’un front élargi de l’opposition en juin de la même année.
Rappelons que l’abstention en Algérie a atteint des sommets ces dernières années, en dépit des chiffres officiels mais largement contestés.
Les taux d’abstention frôlent les trois quarts dans les législatives, un peu moins lors des municipales. Cette tendance à « cracher » sur le vote ou le « mépriser » n’a pas cessé de prendre de l’ampleur depuis les fameux scandales de fraude massive lors des élections de 1997.
Même le chef de l’Etat, Abdelaziz Bouteflika, avait dénoncé après son investiture la fraude qui sévissait dans les opérations électorales, reconnaissant que le pays avait connu ses « Naeglan », en référence au célèbre gouverneur colonialiste qui avait organisé des élections « bidons » en 1947.