Des milliers de figurants de toute l’Europe rejoueront dimanche «la bataille des Nations» à Leipzig (est de l’Allemagne), l’une des plus grandes confrontations des guerres napoléoniennes et une défaite marquante de l’empereur des Français il y a 200 ans.
Devant près de 30.000 spectateurs, ils devraient être 6.000 férus d’histoire à rejouer ces combats d’octobre 1813, qui furent parmi les plus sanglants de l’histoire européenne du 19e siècle.
A l’époque, les monarchies prussienne, autrichienne, russe, suédoise et britannique, alliées contre l’empereur, avaient remporté à Leipzig une victoire décisive qui marqua le reflux de la Grande Armée vers la France, après le désastre de la campagne de Russie.
Près de 100.000 soldats trouvèrent la mort sur un total de 600.000 mobilisés du 16 au 19 octobre 1813. Pourtant, la reconstitution de dimanche participe de la «réconciliation» des peuples, selon l’Allemand Michel Kothe, membre de l’Association «Bataille des Nations» qui organise l’événement.
«Contrairement à ce qui se passa à l’époque, des représentants de 28 pays bivouaqueront pacifiquement avant la bataille», insiste-t-il.
Star de la reconstitution, Frank Samson, un avocat parisien de 46 ans, spécialisé dans les infractions au code de la route, endosse régulièrement l’uniforme de l’Empereur depuis 2005.
Comme tous les figurants, ce passionné du 19e siècle est bénévole. «On a parfois proposé de me défrayer, mais pour moi c’est une activité de loisir. A Leipzig, je paye tout», a-t-il confié à l’AFP.
Selon lui, un uniforme de Napoléon coûte entre 1.000 et 1.500 euros, mais celui d’un maréchal est encore plus onéreux à environ 10.000 euros.
A l’image de Frank Samson, qui embarque son épouse et ses deux fils dans presque toutes ses aventures napoléoniennes, de nombreux figurants ont convaincu femmes et enfants de participer au spectacle.
Pour parfaire son rôle, M. Samson apprend depuis un an et demi le corse, la langue maternelle de Napoléon. «Je ne parlerai jamais anglais sur un champ de bataille car Napoléon ne savait pas cette langue», assure-t-il.
Et depuis sept ans, il pratique également l’équitation. M. Samson souligne qu’en tant qu’avocat il est habitué «à jouer la comédie».
Il affirme que pour imiter l’empereur, il faut être «de mauvaise humeur et colérique. Il faut marcher extrêmement rapidement, de telle manière que les officiers ne cessent de me courir après». Selon lui, Napoléon était quelqu’un de nerveux qui criait après ses officiers, «ce que les soldats adoraient». Mais le «drame» de M. Samson est de mesurer «deux centimètres de trop par rapport à lui».
Cet engouement pour les reconstitutions de batailles s’explique, d’après M. Kothe, par le fait qu’elles permettent de «revivre l’histoire», bien mieux que dans «un musée poussiéreux».
La victoire de Leipzig en 1813 qui sonna le glas de la domination napoléonienne sur les États allemands eut un immense retentissement en Allemagne. «Elle devint un puissant mythe national», souligne l’Allemand Martin Schulz, président du parlement européen, qui prononcera vendredi soir un discours dans la ville saxonne.
Après Leipzig, l’Allemagne, pendant des siècles constituée d’une multitude de petits États allait poursuivre sa longue marche vers l’unité, achevée en 1871 sous domination prussienne, avec la proclamation de l’Empire allemand, au terme d’une autre défaite de la France.
Si Frank Samson a pris «plaisir à galoper dans la neige à Austerlitz», l’une des grandes victoires napoléoniennes, il se réjouit pourtant déjà de perdre dans deux ans à Waterloo.