L’entreprise publique, la politique et le management

L’entreprise publique, la politique et le management

C’est, peut-être, le premier acte de “gestion” qu’Air Algérie a connu depuis sa création. En se posant la question de l’utilité économique de sa pléthore d’agences, la “compagnie nationale”, comme aiment à l’appeler les adeptes du conservatisme rentier, se regarde, enfin, en entreprise économique.

L’argument du “pavillon national” en avait fait, jusqu’ici, un parti avec des agences-kasmas dont la fonction était d’assurer la présence territoriale du “pavillon” et l’entretien d’un personnel commercial pléthorique. À l’étranger, ses agences et représentations servaient à assurer une émigration prospère à des enfants de la nomenklatura.

Dans un système rentier et prédateur, la crise a du bon. Elle a du bon en ce qu’elle affecte plus les carrières parasitaires qu’elle ne sanctionne les professionnels qui vivent de leur mérite et de leur labeur.

Jusqu’ici, le transport international assumait, en plus de sa double mission économique et de service public, deux autres fonctions : entretenir le pavillon de souveraineté et financer la demande népotique de positions de rente. Le privilégié de rang moyen qui ne peut pas “hériter” d’un poste dans une ambassade ou un consulat est orienté vers une représentation extraterritoriale de Sonatrach, de la Cnan ou d’Air Algérie.

Cette conception politique de l’entreprise publique s’étend à son utilité sociale. Les collectifs s’y comportent en forces politiques, à chaque fois qu’ils s’en sentent… la force. Le cas de Sider et, surtout, celui de la SNVI sont significatifs de ce dialogue politique qui se présente sous forme de dialogue social. Le budget de l’État est sommé d’assurer la pérennité d’une entreprise qui n’arrive pas à s’imposer par son utilité économique. Le social, teinté de références souverainistes ou patriotardes, est brandi comme finalité de l’entreprise… économique. L’État doit renflouer le budget de la firme à chaque fois que nécessaire, assumant, en quelque sorte, la défaillance considérée, à tort ou à raison, comme le fait des gestionnaires qui, eux, relèvent de la tutelle politique !

Et une institution économique peut ainsi fonctionner en tonneau des Danaïdes. Indéfiniment. Alors même que le pays a officiellement adopté le principe de l’économie de marché. Ce qui, logiquement, le contraindrait à en accepter les sanctions. Mais “la paix civile n’a pas de prix”, n’est-ce pas ?

L’impossibilité d’évoluer vers une économie de performance découle de cette double interférence : l’usage népotique, clientéliste et rentier qui est fait des entreprises opérant à l’international, d’un côté, et la prise en compte des entreprises à fort effectif dans la stratégie de gestion de la “paix civile”, de l’autre.

Dans ce contexte, Air Algérie, en envisageant un tel dégraissage commercial et immobilier, s’engage dans une véritable révolution culturelle.