Naim Beneddra
L’Algérie a atteint dimanche sa première finale de la CAN depuis 29 ans. Une réussite rendue possible grâce à la réunion de plusieurs facteurs. Vendredi prochain, et pour la première fois depuis 1990, l’Algérie va disputer une finale de Coupe d’Afrique des Nations.
Les Fennecs sont montés haut en Egypte, au prix d’un remarquable parcours, loué de toutes parts et marqué par une succession de succès convaincants, dont le dernier en date survenu dimanche contre le Nigeria (2-1). Riyad Mahrez et ses coéquipiers ont déjoué tous les pronostics et cette belle épopée, qu’ils espèrent bien sûr achever en apothéose, est tout sauf le fruit du hasard. Si les Verts en sont là, à 90 ou 120 minutes d’une seconde couronne continentale, c’est parce qu’ils ont su réunir plein d’ingrédients nécessaires à un brillant parcours. En voici les cinq principales clés de la réussite, qui ont été citées sur Goal.com
Un coach juste et compétent
Tout le monde en conviendra; l’acteur numéro un de la renaissance des Fennecs c’est leur sélectionneur Djamel Belmadi. En place depuis le mois d’aout dernier, ce dernier a su apporter tout ce qui manquait à cette sélection : de la rigueur, de la discipline, de la solidité et un contexte de travail propice à la progression. Il s’est aussi démarqué par rapport à ses prédécesseurs par son côté consciencieux et son immense travail tactique. « On n’a plus autant bossé dans ce domaine depuis le départ de Christian Gourcuff », avait d’ailleurs ouvertement reconnu Riyad Mahrez au début de la CAN. L’ancien joueur de l’OM et du PSG a su trancher dans le vif, et joindre les actes aux paroles en alignant les joueurs les plus performants, quitte à écarter et froisser quelques anciens aux statuts importants (Taider, Brahimi, Slimani). « C’est un entraineur juste », avait notamment lancé un joueur durant le tournoi. Une qualité dont ne jouissent pas tous les coachs, et qui l’aide assurément à faire passer son message dans le vestiaire.
Une équipe solide et solidaire
Un grand tournoi international ne se gagne pas sans une base arrière solide, et l’Algérie en possède incontestablement une. Durant cette CAN, et alors qu’ils ont joué 6 matches et aussi une prolongation, les Fennecs n’ont concédé qu’un seul but dans le jeu. Celui pris face à la Côte d’Ivoire.
Au début, ils avaient même aligné quatre clean-sheet consécutifs, ce qui constitue leur deuxième meilleure performance de l’histoire dans ce tournoi.
Raïs M’Bolhi et le quatuor de derrière répondent présents, mais ils ne sont pas les seuls à protéger le temple. Les joueurs offensifs aussi contribuent à cet excellent rendement défensif, à l’instar de Riyad Mahrez et de Youcef Belaili, qui multiplient les courses de repli, ou encore les milieux Adlène Guedioura, Ismaël Bennacer et Sofiane Feghouli, toujours prompts à s’arracher pour préserver l’équilibre général.
Tout le monde fait les efforts pour l’autre, et cela faisait bien longtemps que cette équipe ne s’est pas montrée aussi solidaire et unie pour la cause collective.
Une atmosphère exceptionnelle au sein du groupe
Dans le football moderne, il est difficilement imaginable de voir une équipe bien se comporter lors d’une grande compétition sans qu’il y ait un esprit de famille et de bonhomie dans le vestiaire. La sélection algérienne ne fait bien sûr pas exception. Toutefois, l’expression «le groupe vit bien» s’applique d’autant plus à cette équipe qu’elle dégage beaucoup de sympathie et que tout ce qu’elle a donné à voir jusqu’ici de son intimité traduit une remarquable union, avec une ambiance à part, où les festivités et la joie se mêlent au sérieux à la rigueur dans le travail. Un mélange parfait.
En outre, on voit aussi les remplaçants se mettre au service des titulaires, même si Belmadi se garde d’utiliser les termes en question.
Voir un Yacine Brahimi au premier plan de chaque vidéo de joie alors que son temps de jeu dans cette CAN flirte avec le néant est la meilleure preuve de l’excellent état d’esprit qui caractérise cette équipe. Un état d’esprit qui va de pair avec ce que montre le peuple algérien dans les rues et aussi ceux qui descendent pour militer en faveur d’une Algérie plus grande et meilleure. A leur façon, les joueurs s’associent à cette cause et ils le font de manière très digne, que ça soit à travers ce qu’ils montrent sur le terrain ou en dehors.
Les tauliers de l’équipe qui répondent présents
Son coup franc victorieux à la dernière minute de la demi-finale contre le Nigeria, continue d’agiter la toile et faire le tour de toutes les chaines en Algérie. En scorant le but de la délivrance face aux Super Eagles, Riyad Mahrez a montré qu’il savait prendre ses responsabilités lorsque les évènements l’exigeaient. Et comme tout grand joueur, il s’est montré à la hauteur lors d’un grand rendez-vous. Jusqu’à ce match, sa CAN n’avait pas été grandiose, même s’il avait fait un excellent match contre le Sénégal au premier tour.
La perte de balle qui avait conduit à l’égalisation ivoirienne en quarts est aussi venue, telle une tâche, ternir un peu son bilan personnel. Mais, le capitaine a su bien rebondir, avec cette réalisation qui restera comme l’une des plus mémorables de sa carrière et celle du foot algérien.
Et il n’y a pas que lui, parmi les cadres à l’équipe, à avoir tenu son rang. C’est aussi le cas de Sofiane Feghouli, totalement métamorphosé par rapport à 2017, ou de Raïs M’Bolhi, toujours aussi brillant en sélection alors que sa carrière en club ressemble à un chemin de croix. Enfin, Adlène Guedioura a aussi ébahi tout son monde, en réalisant à 33 ans son meilleur tournoi avec la sélection.
La jeunesse et la faim qui compensent le manque d’expérience
Aucun joueur du groupe algérien n’avait disputé une finale de CAN jusqu’ici. Et seul le remplaçant Rafik Halliche avait connu les joies d’une participation à une demie de ce tournoi. Ce groupe-là manquait de vécu, même si sept d’entre eux faisait partie de la belle aventure en Coupe du Monde au Brésil (2014). Pour compenser ce manque, d’autres atouts nécessaires, tels que la fougue et l’insouciance de la jeunesse ou encore la rage de vaincre et cette détermination à toutes épreuves. La première qualité est incarnée par le séduisant milieu défensif Ismaël Bennacer.
De l’avis de nombreux observateurs, le joueur d’Empoli est la grande révélation de cette CAN.
Alors qu’il est tout sauf un monstre physique, il a rayonné dans l’entrejeu des Verts, avec un style qui ressemble à celui d’un Marco Verratti.
Sa vision de jeu et sa justesse technique en font aujourd’hui un pion essentiel de cette sélection. Et pour ce qui est de la faim et cette envie de se surpasser et triompher de l’adversité, elle est symbolisée par le duo Youcef Belaili-Baghdad Bounedjah. Deux joueurs «locaux» qui ont été confrontés à de nombreux obstacles, et qui ont même été marginalisés du fait qu’ils sont issus du championnat local, mais qui démontrent match après match qu’ils n’ont rien à envier aux meilleures stars du continent. Sans leur contribution, il n’est pas sûr que les Fennecs auraient été aussi étincelants en Egypte.