Les cours du pétrole ont grimpé de 10 %, lundi matin en Asie, deux jours après les attaques contre deux installations pétrolières stratégiques saoudiennes par les rebelles yéménites houthis. La tension monte dans le Golfe.
Les cours du pétrole s’envolent, lundi 16 septembre, deux jours après les attaques de drones contre des infrastructures pétrolières en Arabie saoudite, qui ont entraîné une réduction de moitié de sa production.
Le Brent de mer du Nord a grimpé de 10,08 % à 66,29 dollars le baril après avoir gagné jusqu’à 19,5 %, un niveau sans précédent depuis la guerre du Golfe en 1991, à 71,95 dollars. Le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) est en hausse de 8,97 % à 59,77 dollars après avoir pris jusqu’à 15,5 %, sa plus forte hausse journalière depuis le 22 juin 1998.
L’Arabie saoudite est le plus gros exportateur mondial de pétrole et les attaques contre deux installations stratégiques de la compagnie Aramco ont réduit la production de 5,7 millions de barils par jour, soit l’équivalent de 5 % de la consommation quotidienne mondiale.
Aramco n’a pas fourni de calendrier de retour à la normale, se contentant de déclarer dimanche qu’elle ferait dans environ 48 heures un nouvel état des lieux. Une source au fait de la situation a dit à Reuters qu’un retour à la normale de la production de pétrole saoudienne devrait prendre « des semaines plutôt que des jours ».
Tandis que les marchés surveillent de près la réaction de l’Arabie saoudite, le PDG d’Aramco, Amin Nasser, a déclaré que « des travaux » étaient « en cours » pour rétablir la production.
Le prince saoudien Abdel Aziz ben Salmane, récemment nommé ministre de l’Énergie, a assuré qu’une partie de la baisse de production serait compensée par les stocks.
Les États-Unis prêts à riposter
Sur le plan diplomatique, les États-Unis, alliés stratégiques du royaume wahhabite, se sont déclarés « prêts à riposter » aux attaques de drones revendiquées par les rebelles yéménites houthis, soutenus par l’Iran et qui font face depuis cinq ans à une coalition militaire menée par Riyad.
« L’approvisionnement en pétrole de l’Arabie saoudite a été attaqué. Il y a des raisons de croire que nous connaissons le coupable, sommes prêts à riposter en fonction des vérifications, mais nous attendons que le Royaume (saoudien) nous dise qui il estime être le coupable de cette attaque, et sous quelle forme nous devrons agir ! », a tweeté dimanche Donald Trump, qui faisait ainsi pour la première fois allusion à une éventuelle réponse militaire.
Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a quant à lui accusé l’Iran d’avoir « lancé une attaque sans précédent contre l’approvisionnement énergétique mondial ».
De son côté, le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, dont le pays est le grand rival régional de l’Iran chiite, a assuré que Riyad était « disposé et capable » de réagir à cette « agression terroriste ».
L’envoyé de l’ONU au Yémen, Martin Griffiths s’est déclaré « extrêmement préoccupé » par les attaques, également condamnées par les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Koweït.
La France a de son côté condamné des attaques qui ne peuvent « qu’aggraver les tensions et les risques de conflit dans la région » et assuré l’Arabie saoudite de sa « pleine solidarité », sans pour autant désigner de coupable.
Des ministres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), réunis à Jeddah, ont aussi condamné l’attaque. Il n’était pas clair si l’Iran était présent à la réunion de l’OCI, convoquée initialement pour examiner le plan du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu d’annexer des pans de la Cisjordanie occupée.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a condamné les attaques et appelé toutes les parties à « la retenue pour prévenir toute escalade », selon son porte-parole.
L’Iran réfute les accusations américaines
Pointé du doigt, l’Iran a qualifié dimanche d' »insensées » les accusations du secrétaire d’État américain Mike Pompeo tenant la République islamique pour responsable de l’attaque de drones.
« Des accusations et remarques aussi stériles et aveugles sont incompréhensibles et insensées », a déclaré le porte-parole des Affaires étrangères iraniennes, Abbas Moussavi. Selon lui, ces remarques sont destinées à « écorner la réputation d’un pays afin de créer un cadre pour de futures actions contre lui ».
Faisant référence à la politique de « pression maximale » menée par les États-Unis contre l’Iran, il a estimé dans un communiqué transmis à la presse que Washington avait « apparemment transformé (celle-ci en politique de) ‘mensonge maximum’ du fait de ses échecs ».
« Si nous voulons qu’il y ait une réelle sécurité dans la région, la solution est de faire cesser l’agression américaine », a déclaré le président iranien Hassan Rohani.
Les tensions entre les deux pays sont exacerbées depuis que les États-Unis se sont retirés unilatéralement en 2018 de l’accord international sur le nucléaire iranien conclu en 2015, avant de rétablir des sanctions économiques contre Téhéran.
La situation a menacé de tourner à l’affrontement militaire direct en juin, après que la République islamique eut abattu un drone américain. Selon Téhéran, l’appareil avait violé l’espace aérien iranien, ce que Washington dément.
Amirali Hajizadeh, commandant de la branche aérospatiale des Gardiens de la révolution, l’armée idéologique de la République islamique, a pour sa part estimé dimanche que les tensions actuelles, « avec des forces qui se font face sur le terrain », pouvaient contribuer au déclenchement d’un conflit armé, selon l’agence Tasnim, proche des ultraconservateurs.
Le général de brigade a ajouté que l’Iran était « toujours préparé pour une guerre totale ». Mais « ni nous, ni les Américains ne voulons une guerre », a-t-il dit, reprenant le discours officiel iranien.
Avec AFP et Reuters