Pour le collectif d’étudiants d’Instituts et d’Écoles supérieures ainsi que de l’Université Houari Boumediene, de Bab-ezzouar invités hier, avec le chercheur historien Mohamed Rebah à animer le Forum du Courrier d’Algérie sur le 19 Mai, journée de l’Étudiant et le rôle de la communauté estudiantine dans le mouvement populaire pacifique pour le changement du système politique en place, la tâche reconnaissent-ils « est rude » au regard des politiques menées , depuis notamment, ces vingt dernières années, en direction de l’université, ayant plongé celle-ci dans une léthargie la coupant du monde socio-économique et politique du pays.
Pour les intervenants qui, tout au long du Forum, ont affiché une volonté et une détermination à peser pour voir enfin les étudiants jouer « pleinement leur rôle » pour atteindre les objectifs et les revendications exprimées par le peuple, relatives au changement du système politique en place et l’édification d’un État de droit. Après le désintérêt et l’indifférence de l’étudiant de la vie politique, car voyant que la politique a perdu tout son sens, au regard des acteurs de la classe politique, notamment les partis du pouvoir, «médiocres, soucieux de satisfaire leurs intérêts personnels» à l’origine de la dévalorisation de la politique aux yeux des citoyens en général et les étudiants en particulier mais après le 22 février, affirment hier les étudiants, « la politique a retrouvé tout son sens et toute son importance chez l’étudiant». Pour Karima, étudiante à la Fac-Centrale, les raisons qui sont à l’origine de la forte mobilisation et le maintien du mouvement des étudiants dans le sillage du mouvement populaire pacifique «réside dans l’éveil de conscience qu’a engendré la mobilisation du 22 février à travers le pays».
Et c’est de là, poursuit-elle, que la communauté estudiantine «s’est rendue compte non pas seulement qu’elle a un rôle à jouer, dans la dynamique populaire pour le changement, mais que celui-ci est important, pour peser sur le cours des évènements et dans le maintien de la mobilisation». Alors que les étudiants œuvrent, depuis le début du mouvement populaire pacifique pour le changement, l’édification d’un État de droit et une Algérie libre et démocratique. Ils sont dans un rythme de mobilisation soutenue, selon leurs témoignages, hier. Si tout au long de la semaine, ils activent au sein de leurs universités et instituts respectifs, à travers le pays, depuis le 26 février, soit trois jours après le 22 février dernier, la communauté universitaire s’est donnée rendez-vous, chaque mardi, pour manifester, dans les rues et les boulevards des villes algériennes, sa détermination à être «un acteur incontournable pour façonner le destin de notre pays» car étant «conscients de notre rôle important à jouer en cette phase historique de la vie de notre peuple et de notre Algérie» nous dit l’un d’eux, hier.
Pour un des étudiants de l’université Houari Boumediene, présent, hier, au Forum, à l’adresse de ceux qui tentent d’afficher aujourd’hui une posture autre que celle qu’ils ont affichée des années durant «c’est révoltant et c’est de l’opportunisme», pensant qu’«en retournant leur veste, ils arriveront à garder encore certains privilèges ne serait-ce minimes, comme c’est le cas, pour certains dans nos universités ». Ces gens-là, semble dire notre interlocuteur, n’ont rien compris ou ne veulent pas croire que ce mouvement populaire pacifique a sonné la fin d’une étape de pratiques et vision révolues, ayant freiné l’essor et bloqué le développement et l’émancipation de tout un peuple et son pays. Convaincus que la tâche et la mission de l’étudiant est « rude et difficile» au vu de la situation chaotique prévalant dans la vie socio-économique et politique du pays, privant l’université du rôle qui lui est sien à divers domaines, les Étudiants croient, nous ont-ils affirmé hier, « que rien n’est impossible pour bouleverser et changer la situation» comme l’ont fait nos ainés, lors de la guerre de libération ou bien après en des périodes ayant marqué l’histoire du mouvement estudiantin.
C’est une fierté, selon eux de porter, lors de leur rassemblement, l’étendard du martyr Taleb Abderrahmane, «il alimente notre combat d’aujourd’hui et symbolise notre engagement indéfectible à contribuer dans le changement auquel notre peuple aspire» a tenu à souligner, hier, Khaled, étudiant à l’École Polytechnique. Notons que l’auteur de deux ouvrages portant sur la guerre de libération nationale «Des Chemins et des Hommes» (éditions Mille Feuilles/Alger, novembre 2009) et «Taleb Abderrahmane, fils du peuple, guillotiné le 24 avril 1958» (éditions APIC/Alger, avril 2013), le chercheur historien Mohamed Rebbah a déclaré, hier, aux étudiants présents et à leurs camarades à travers le pays : «vous êtes les dignes descendants des étudiants de la guerre de libération». Lui qui dans son livre sur le martyr Taleb Abderrahmane écrit que «c’est dans ce monde en lutte que se développa la conscience politique de Taleb Abderrahmane».
La communauté estudiantine: «Pas d’élections le 4 juillet !»
De sa mobilisation et de son éveil de conscience, dès le 22 févier, le monde estudiantin, après avoir marqué l’empreinte du rôle qu’il doit et continue à jouer, depuis qu’il s’est donné le mardi, comme son jour de mobilisation, pour exprimer, non pas seulement sa parole, mais pour que celle-ci soit entendue et prise en compte, pour aller sur la voie du changement du système politique en place.
Les étudiants s’activent à doter la communauté estudiantine de sa structure représentative , au niveau national. Si dans d’autres secteurs les syndicats autonomes ont réussi à porter la voie des travailleurs, au moment où la Centrale syndicale se soucier davantage de tenir ses réunions avec les patrons, les organisations «satellitaires» des étudiants avant le 22 février, se sont noyées dans la médiocrité régnant dans le monde universitaire, si ce n’est, dans la majorité des cas, ont été crées pour «entraver toutes perspectives de naissance de cadre syndical en bonne et due forme des étudiants». Et c’est dans le sillage du mouvement populaire que les étudiants, rejetant le vote de la présidentielle du 4 juillet prochain, et exigeant le départ des 3B (Bensalah, Bedoui et Bouchareb), le débat sur la période de transition est en cours, et se déroule d’une manière «plus soutenue» notamment ces dernières semaines. Conscients, comme ils nous l’ont affirmé hier, qu’il n’y a que deux principaux acteurs sur la scène nationale, à savoir le mouvement populaire pacifique et l’Institution militaire, nos interlocuteurs saisissent que « le temps était venu » pour amorcer une dynamique pour aller sur la solution de la crise, sans manquer de souligner que l’étape actuelle révèle amplement que « l’heure du dialogue a sonné».
N’excluant aucunement que la solution passera par une période de transition, pour les étudiants intervenants, hier, les débats au niveau des universités algériennes abordent cette question autour d’interrogations «devra-t-elle être courte ? Une transition vers une présidentielle ou constituante ? qui conduira la transition et d’autres questions rythment les débats autant qu’ils éclairent les étudiants, lors de leurs échanges, pour peser, par leur rôle, lors de cette phase, comme ce fut le cas, depuis le 22 février. Interrogés sur le rôle des partis politiques, dont ceux de l’opposition, à travers leurs actions, notamment les feuilles de route de proposition de solution de crise, les étudiants nous ont affirmé, hier, que « les acteurs politiques n’ont pas été à la hauteur des aspirations du peuple, et n’apportent pas de solutions, si ce n’est des déclarations, ici et là » ont –ils précisé.
Karima Bennour