Les échanges commerciaux entre les deux pays sont passés de 200 millions de dollars en 2000 à 10 milliards de dollars en 2014
Une annonce que le vice-président du Cnes (Conseil national économique et social) n’a pas hésité un instant à qualifier «d’excellente nouvelle pour l’Algérie».
Dès le mois en cours, les importations en provenance de la Chine seront réglées en yuan, la monnaie chinoise. C’est une note de la Banque d’Algérie, adressée le 18 novembre dernier à tous les responsables des banques intermédiaires agréées activant en Algérie et rendue publique hier, qui l’annonce. «La Chine étant devenue le premier partenaire commercial de l’Algérie, il est entendu que les règlements des importations en provenance de ce pays ne sauraient être réglées dans une autre monnaie autre que (la sienne)»; c’est là l’essentiel de l’argumentation avancée par les auteurs de ladite note à l’appui de la décision précitée. Une argumentation de poids, il faut le dire, puisque largement corroborée par les chiffres disponibles en la matière qui traduisent également, autre argument justifiant la mesure précitée, le formidable bond qu’ont connu les échanges commerciaux entre les deux pays en un laps de temps relativement court: de 200 millions de dollars en 2000, ceux-ci sont, en effet, passés, en 2014, à 10 milliards de dollars. Un bond qui, faut-il le dire tant les statistiques en la matière sont éloquentes, a, essentiellement, profité à la partie chinoise: premier fournisseur de l’Algérie, l’année précitée, avec un montant de 8,2 milliards de dollars, la Chine n’en est que le 10ème client avec un montant total estimé à 1,8 milliard de dollars. Un solde avantageux que renforce encore plus la présence dans notre pays de pas moins de 790 entreprises chinoises activant, essentiellement, dans les secteurs des travaux publics et de l’habitat.
Et qui, au vu de l’état actuel de notre économie peu tournée vers l’exportation, a toutes les chances de se creuser davantage dans les toutes prochaines années: les deux pays ayant signé en juin 2014 un «Plan quinquennal de coopération stratégique global», couvrant la période 2014-2018, qui a pour objectif de «donner une grande impulsion (à leurs) relations économiques; y compris (aux) investissements directs chinois dans tous les secteurs prioritaires du prochain plan quinquennal (algérien) 2015-2019». D’où, selon les experts que nous avons contactés, l’importance de la mesure annoncée par la note susmentionnée de la Banque d’Algérie. Une annonce que le vice-président du Cnes (Conseil national économique et social) n’a pas hésité un instant à qualifier «d’excellente nouvelle pour l’Algérie».
Surtout que l’Algérie, a-t-il prédit, pourrait, «au vu de la situation qui est aujourd’hui la sienne après la baisse drastique de ses recettes financières, consécutive à la chute non moins drastique des prix du pétrole et aux sombres perspectives faisant état de la prolongation de la morosité du marché pétrolier jusqu’à l’année 2020», être amenée «à aller sur le marché international pour financer son économie». Et d’ajouter, plus explicite: «La Chine est l’un des rares, si ce n’est le seul pays qui peut mettre à la disposition de notre pays des crédits intéressants.» En clair, à des taux d’intérêts vraiment bas. Une disposition que la Chine a, d’ailleurs, annoncé à l’issue du Sommet sino-africain qui vient de se tenir à Johannesburg, en Afrique du Sud. Et ce, en accordant aux pays africains des prêts d’un montant de 60 milliards de dollars à des taux préférentiels; dont 5 milliards (de dollars) à un taux nul. Dans la foulée et tout en rappelant l’excellence des relations politiques entre l’Algérie et la Chine, il a suggéré «la possibilité du financement par des prêts contractés auprès de la Chine de certains projets structurants aujourd’hui gelés».
Tels, a-t-il cité, celui «prévu pour alimenter en eau, à partir d’El Goléa, plusieurs agglomérations des Hauts-Plateaux». Ce plaidoyer pour un rapprochement «financier» avec «l’Empire du Milieu», le vice-président du Cnes l’étaye par trois autres arguments, intimement liés, il faut le dire: le premier ayant trait au fait que la monnaie chinoise est, «présentement, la troisième, après le dollar et l’euro, plus forte devise au monde»; le second, qui découle du premier, au fait que le yuan «a été inclus, depuis le 30 novembre dernier, par le FMI (Fonds monétaire international), dans le panier des devises – comprenant également le dollar, l’euro, le yen et la livre sterling – servant à fixer la valeur des droits de tirage spéciaux (DTS)» que celui-ci émet; et le troisième, à la possibilité que le rapprochement souhaité offre à l’Algérie de lui éviter «les effets négatifs des emprunts contractés dans les autres monnaies».
Abondant dans le même sens, à propos de ce dernier point, Bachir Messaitfa, professeur d’économie et ancien secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre chargé de la Prospective et des Statistiques, nous a déclaré que «la relative stabilité du yuan par rapport au dinar et ce, comparativement, surtout au dollar et à l’euro qui, eux, ne cessent de s’apprécier vis-à-vis de notre monnaie nationale, est un élément qui rend cette mesure intéressante». Surtout que, a-t-il tenu à ajouter, «c’est le marché noir – la Bourse du square Port-Saïd, comme l’appellent les initiés – qui détermine les fluctuations de ces deux devises…».