Les jeunes algériens veulent tous fuir

Les jeunes algériens veulent tous fuir

Les boat-people ne cessent «d’accoster» les plages de l’Est alors que celles de l’ouest du pays se transforment en salles d’embarquement à ciel ouvert.

«A la faveur de plusieurs paramètres, j’embarquais à partir des plages de Aïn Témouchent depuis 2003».

C’est ce qu’affirme Noureddine, un harrag multirécidiviste, refoulé sept fois consécutives d’Espagne pour séjour illégal.

La fièvre des départs collectifs et le sauve-qui-peut ont atteint des points de non-retour.

La harga prend, ces derniers jours, des proportions très graves et ce, à la faveur de l’amélioration des conditions climatiques.

Les bilans des interceptions quotidiennes sont révélateurs d’un grave phénomène eu égard aux dizaines de jeunes, moins jeunes et même des femmes et des mineurs qui prennent le risque de braver les vagues de la haute mer.

Près d’une centaine de harraga ont été interceptés ces quatre derniers jours sur les côtes algériennes.

Les autorités espagnoles, quant à elles, ont constaté une nouvelle vague d’arrivées de clandestins par voie maritime, avec l’interception dimanche et lundi de près de 180 émigrants maghrébins, majoritairement algériens, dans 17 petites embarcations sur la côte méditerranéenne.

Une question se pose alors: pourquoi ces aventuriers préfèrent-ils la voie maritime alors qu’il y a quelques années ils passaient via le territoire marocain ?

Pourquoi ces candidats à un avenir incertain préfèrentils l’Espagne, via les plages de l’Ouest et l’Italie en empruntant les côtes Est du pays ?

Pour Noureddine, la réponse est toute simple : le départ, à partir des plages algériennes, est mieux sécurisé tandis que l’arrivée vers la terre « promise » est certaine et ce, à la faveur de l’amélioration des conditions de transport.

«Contrairement aux premières années où la traversée constituait un coup du hasard, les passeurs actuels se sont ingéniés à mettre au profit des harraga des moyens leur permettant une traversée certaine sans risque de naufrage au large», a encore indiqué Noureddine.

Au vu des moyens mis en place par les passeurs, le voyage est devenu sans risque pour les candidats désireux de regagner le plus tôt possible la terre d’éden.

En effet, de Aïn Témouchent à Almeria ou encore Alicante, le trajet ne dure que quelques heures de «rame tranquille à bord d’un zodiac pneumatique équipé de deux moteurs de grande puissance », a enchainé notre interlocuteur. Idem, à Annaba par les plages qui relient facilement l’Algérie et celles italiennes.

La trajectoire est calculée de Annaba à la Sardaigne (Italie) à quelque six heures par temps de soleil et 10 heures lors de bouleversements climatiques.

Par ailleurs, les candidats algériens, rêvant d’un monde meilleur, ont tiré de grandes leçons vécues par leurs prédécesseurs qui ont tenté la traversée via le sol marocain et la ville espagnole de Melilla.

Le passage par le Maroc représente de gros risques allant jusqu’à la prison avec de longs séjours dans les geôles marocaines.

Les Mekhaznia sont impitoyables envers les Algériens. «Le poste frontalier de Béni Nsar (Nador) constitue un véritable coupe-gorge pour les harraga algériens», a affirmé Noureddine avant d’ajouter que «ceux qui ont réussi à franchir ce point, à la fois décisif et déterminant, se comptent sur les doigts d’une seule main».

«La police marocaine n’est pas tendre avec les Algériens émigrants portant des pièces d’identité marocaines acquises à des prix exorbitants auprès de trafiquants de papiers marocains».

Fini le casse-tête marocain, les candidats à «l’eldorado européen» prennent le large à partir de l’Algérie, le moyen le plus sûr.

Depuis la réussite de la traversée, tentée en 2003 par un groupe de harraga, via les plages de Aïn Témouchent, ces dernières sont devenues l’objectif premier des candidats épris de rallier, coûte que coûte, le sol européen, notamment l’Espagne.

WAHIB AIT OUAKLI