Les « magouilles ahurissantes » du groupe Amor Benamor

Les « magouilles ahurissantes » du groupe Amor Benamor

Les enquêtes menées autour des anciens oligarques de l’époque de Bouteflika continuent de livrer des détails ahurissants sur les affaires de corruption et de dilapidation organisée des deniers publics.

De nouveaux éléments viennent d’être dévoilés concernant les plans organisés dans l’objectif de casser les sociétés nationales spécialisées dans « l’agroalimentaire et la transformation du blé », pour ensuite accorder d’indus avantages au profit de groupes et entreprises privées s’activant dans le domaine.

Selon les enquêtes menées par la gendarmerie nationale et le rapport de l’inspection générale des finances, il s’agit en principe de détournement de l’argent des subventions de l’État à travers l’obtention de quantités astronomiques du blé subventionné pour ensuite le transformer ou le revendre au marché noir, sous forme de pâtes « Amor Benamor » qui dépassent les 100 DA sur le marché national.

Le dossier de cette affaire se trouvant actuellement au niveau du pôle pénal économique et financier près le tribunal de Sidi M’hamed et qui sera programmé dans les jours à venir, devra lever le voile sur de graves scandales concernant les détournements du blé subventionnés par l’OAIC. Une situation qui a entraîné des hausses exagérées des prix des pâtes alimentaires.

Ce dossier implique les deux anciens premiers ministres Abdelmalek Sellal et Ahmed Ouyahia, l’ancien ministre de l’Agriculture Rachid Ben Aissa, l’ancien ministre de l’Industrie, actuellement en fuite Abdesslam Bouchouareb ainsi que plusieurs autres hauts responsables de l’époque.

Les dessous de dilapidation des subventions de l’État

Selon des éléments de l’enquête, le groupe Amor Benamor, à l’image d’autres groupes privés spécialisés dans l’agroalimentaire et la transformation du blé, bénéficiait de lots plus importants que les transformateurs publics. Les quantités de blé sont estimées à hauteur de 3500 quintaux par jour au niveau de la CCLS de Guelma.

Plus loin encore, les moulins Amor Benamor ne se contentaient pas que de ces quantités astronomiques. Le groupe importait également du blé de l’étranger, ce qui a compliqué davantage les opérations de contrôle des destinations du blé subventionné par l’État. Ce même groupe procédait alors délibérément à mélanger les quantités importées avec celles subventionnées afin de contourner le contrôle.

À cela s’ajoute une panoplie d’avantages mis à la disposition des entreprises du groupe par l’Agence nationale du développement de l’investissement ANDI. Ces avantages sont estimés à 44 arrêtés qui relevaient dans leur intégralité de l’acquisition d’équipements destinés à promouvoir l’investissement et à créer des emplois en Algérie.

L’influente famille à la tête du groupe éponyme a également violé les articles 16 alinéa 2 du code des douanes à travers l’exportation de pâtes et de couscous au profit de l’entreprise familiale CFG SPA en Suisse, qui à son tour est chargée de la commercialisation ces produits vers le reste de l’Europe en raison de la faible densité de la communauté algérienne en Suisse.

À noter que la Suisse n’est pas la seule destination des membres de la famille « Ben Omar », puisque les enquêtes ont permis de découvrir que le dénommé Mohamed El Aid Ben Omar avait obtenu la citoyenneté d’un État dit « Paradis fiscal par excellence », en échange de sa promesse d’y investir. Il s’agit, en effet, de l’Ile méditerranéenne de Malte.

« Finance triangulaire » et blanchiment d’argent

En outre, il a été découvert que les entreprises du groupe « Ben Omar » usaient et de façon régulière de la méthode de transfert appelée « finance triangulaire ». Cela consiste à passer la commande de blé dur canadien expédié depuis le port de Vankouver par la société française CAM Négoce, dont le siège est à Paris.

Le paiement s’effectue sur le compte bancaire de la société française, ouvert au niveau de la banque suisse Vaudoise Cantonale Banque BCV, qui est située Place St François à Lausanne, en Suisse, à quelques mètres du siège de la société Ben Omar Mohamed El Hadi dénommée GFC, qui est soumise au droit suisse.

Quant à l’enquête sur le blanchiment d’argent, les enquêteurs de la Brigade de recherche et d’investigation de la gendarmerie nationale se sont rapprochés de la Cellule de Traitement du Renseignement financier (CTRF), qui s’occupe de la lutte contre le blanchiment d’argent en Algérie.

Cela est intervenu afin de s’enquérir des déclarations suspectes et au caractère frauduleux des transactions des sociétés « Amor Benamor », ainsi que les rapports confidentiels transmis par les Impôts, les douanes et les services financiers d’Algérie poste,

En effet, l’investigation menée sur les opérations de commerce extérieur « opérations d’exportation et d’importation » a révélé que les entreprises appartenant au groupe s’appuyaient, pour le blanchiment d’argent, sur la création d’entreprises fictives qui, hormis le nom de l’entreprise, n’ont aucun siège social.

À ce propos, il s’est avéré que GFC SPA, qu’utilise le groupe notamment dans les opérations d’exportation, n’existe pas réellement. Elle ne possède qu’une adresse qui appartient à l’administrateur de la société nommé Nicolas Gellard, qui est à l’origine le siège d’un cabinet d’avocats et non de la société qui a été créée.