Les maris algériens sont-ils violents ?

Les maris algériens sont-ils violents ?

2 000 femmes ont déjà porté plainte contre leur époux ou fiancé

Le bilan du 1er trimestre 2010 fait ressortir des chiffres inquiétants sur le phénomène de la violence contre les femmes. La violence conjugale prend une ampleur inquiétante, alors que la grande criminalité touche de plus en plus l’enfance.

Près de 2 000 femmes victimes de violence ont été recensées durant le 1er trimestre de l’année 2010 au niveau national, alors que 1 746 enfants ont été victimes de toutes sortes de violences durant les 4 premiers mois de cette année, selon un rapport de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN).

Ces chiffres sont malheureusement encore loin de la réalité, puisque les cas portés à la connaissance des services concernés sont ceux liés uniquement aux dépôts de plainte, alors que de nombreuses victimes souffrent dans le silence de crainte de représailles familiales et hésitent par conséquent à déposer plainte contre leurs agresseurs.

Dans la plupart des cas des violences contre la femme recensés par les services de sécurité, l’auteur de l’agression qui vient en tête de classement est le mari, suivi du frère, du fiancé et du fils envers sa mère.

Ces agressions se caractérisent dans plus de 60% des cas par des coups et blessures volontaires. Mme Kheira Messaoudène, commissaire divisionnaire et chef du bureau de la protection contre la délinquance juvénile et la violence contre la femme, nous a indiqué que “1 987 femmes victimes de violence ont été recensées par les services de police durant le 1er trimestre de l’année en cours au niveau national, notamment parmi la tranche d’âge allant de 25 à 35 ans”. La violence physique est en tête avec 64% des cas.

Les chiffres enregistrés révèlent que “1 332 femmes étaient victimes de violence physique et 72 autres de violence sexuelle. 46% des cas de violence contre les femmes sont commis dans leur milieu familial et 73% en dehors du cadre familial.

Les femmes mariées et les chômeuses plus exposées à la violence

Dans son classement des types de violences dont les femmes ont été la cible, le rapport fait état aussi de quelque 547 plaintes déposées par des femmes qui déclarent avoir été maltraitées et de 32 cas ayant subi un harcèlement sexuel. Le même rapport relève, par ailleurs, un autre aspect de la violence que subit la gent féminine en précisant que dans 46% des cas de violence, l’agresseur est étranger à la famille. Il est soit un voisin, un collègue ou autres.

Dans ces cas de figure, la police a procédé à l’arrestation de 950 personnes coupables de violence. Les conjoints sont des agresseurs dans 22% des cas enregistrés, soit 454 époux coupables, alors que 4,68% des cas d’agression sont le fait d’amants ou de fiancés.

Les frères arrivent en cinquième position des agresseurs avec 5% des cas, soit 106 frères. Il faut également savoir que 2,9% des cas de violence contre les femmes sont le fait de descendants soit 140 fils, auteurs de violence. Les statistiques soulignent que les tranches d’âge varient de 18 à 75 ans et même plus !

Même les femmes âgées ne sont pas épargnées par la violence, selon le rapport de la Sûreté nationale.

Ce sont 38 femmes âgées de plus de 75 ans victimes de violence physique durant les trois mois de cette année, alors que 48 autres sont âgées entre 66 et 75 ans (soit 2%) et 130 victimes recensées sont âgées entre 56 et 65 ans .

Pour la commissaire Messaoudène, “il n’y a pas de profil type de l’agresseur, il peut être cadre supérieur ou chômeur, de même pour les victimes, elles peuvent être des femmes au foyer ou des cadres”. Un constat que corrobore le rapport qui indique que 2% des victimes ont un niveau universitaire, 20% un niveau secondaire, alors que 22% des victimes sont sans niveau et 8% de niveau primaire.

Les femmes chômeuses, par contre, sont les plus exposées à la violence, selon ce rapport qui fournit des détails assez intéressants. 64% des victimes sont sans profession suivies des employées avec 17%, les cadres moyens avec 3%, les cadres supérieurs 1%, les étudiantes 7%, les commerçantes 0,6%, les retraitées 0,5% et les professions libérales avec 1,25%.

Les femmes mariées viennent en tête de liste avec 51% suivies des célibataires avec 30%, les veuves avec 5% et les fiancées avec un taux de 0,5%.

La maison n’est plus un espace d’épanouissement de la famille. Malheureusement, cet endroit vient en tête des lieux des agressions avec 46% des cas, alors que 30% des victimes soit 615 ont été agressées dans la rue et 13% dans des quartiers et 2% dans des lieux isolés et 1% au sein de l’université.

Reste le mobile ? Pour 49% des cas, les agressions sont généralement dues aux problèmes conjugaux et familiaux, selon l’analyse du rapport. Par ailleurs, 38% des cas sont liés à la violence dans les lieux publics, 5% liés aux problèmes d’argent et 7% aux agressions sexuelles.

75 enfants enlevés en 4 mois et 3 tabassés à mort

S’agissant de la violence contre les enfants, plus de 1 746 enfants ont fait l’objet de violence durant les 4 premiers mois de cette année. “942 enfants ont été victimes de violences physiques”, nous a encore indiqué la commissaire divisionnaire Mme Kheira Messaoudène.

S’agissant des violences sexuelles, la même responsable a ajouté que “535 enfants ont été agressés sexuellement dont 259 filles, alors que 187 enfants ont été victimes de maltraitance, 75 autres ont fait l’objet de détournement et 3 autres ont été victimes de coups et blessures qui ont entraîné la mort”.

Concernant les tranches d’âge, Mme Messaoudène a précisé que les mineurs victimes de violences, âgés de 16 à 18 ans, viennent en première position avec 357 victimes, suivis de la tranche d’âge de 13 à 16 ans avec 261 cas.

Pour la tranche d’âge de 10 à 13 ans, les services de police ont enregistré quelque 102 cas de violences et pour les enfants de moins de 10 ans, 142 cas, pour les mois de mars et avril seulement.

Concernant les kidnappings des enfants, la responsable préfère à ce mot “le détournement”. Pour elle, la raison principale de ces enlèvements est généralement d’ordre sexuel. Elle nous a fait aussi remarquer que des cas de fugue sont enregistrés durant la période de fins d’examen.

“Des enfants préfèrent fuguer de la maison par peur de punition mais les parents croient à un kidnapping”, a-t-elle ajouté.

Il faut rappeler que les services de police ont enregistré 5 565 mineurs victimes de toute forme de violence dont 1 968 filles durant l’année 2009 dont 18 cas ont trouvé la mort.

NEÏLA B.