Si certains enseignants estiment que tous les sujets proposés pour les candidats du bac sont abordables, il n’en demeure pas moins que les parents d’élèves soulignent que certains examens sont loin d’être ainsi.

C’est du moins le constat que nous avons établis hier lors d’une tournée effectuée dans certains établissements de la capitale. 12h00. Au lycée Abane- Ramdhane sis à El Harrach (Alger). Les quelques candidats dans la filière gestion, qui se sont rassemblés devant l’entrée dudit établissement, n’ont pas caché leur joie pour dire que le sujet de la comptabilité était abordable.

«C’est un sujet qui était à la portée de tous mes camarades», s’est réjouie Hanane, une jeune fille qui a été accompagnée par ses deux copines Souad et Nawel. «Les questions n’ont pas été vraiment difficiles», a-t-elle ajouté. Cependant, notre interlocutrice a avoué que l’examen des mathématiques qu’elle a passé avant-hier (lundi, ndlr) n’était pas à la portée des tous les candidats, y compris les excellents.

À ce propos, les parents d’élèves qui ont été présents sur les lieux, n’ont pas manqué l’occasion pour tirer sur le ministre de tutelle qui, ont-ils dit, a «coulé l’école algérienne» ainsi que les représentants des syndicats qui font des déclarations qui ne reflètent guère la réalité. «Nos enfants ne savent plus sur quelle pied danser à cause d’une politique qui a pourtant prouvé ses échecs !», fulmine une dame, la soixantaine.

L’oratrice qui arrivait difficilement à contenir sa colère a déploré aussi le fait que les élèves n’ont pas le droit à des feuilles d’examens supplémentaires, et ce, bien qu’ils aient payé les frais y afférents. «Nous avons payé 1 500 DA et enfin de compte, les enseignants-surveillants refusent de donner des feuilles supplémentaires à nos enfants qui, parfois sous le trac, font des erreurs», s’est-elle indignée.

Par ailleurs, un autre parent d’un certain âge a «fustigé » les représentants de certains syndicats de l’Éducation qui, d’après lui, ne défendent que leurs intérêts. «Lorsqu’il s’agit des intérêts des enseignants, ceux-ci font des pieds et des mains pour les défendre, mais lorsqu’il s’agit des problèmes et des préoccupations des élèves, ces derniers se contentent seulement de faire des déclarations qui ne reflètent guère la réalité en disant que les sujets, dont celui des mathématiques ont été abordables», a-t-il fulminé.

Aux lycées El Idrissi et Delacroix qui se trouvent, respectivement, à la place du 1er- Mai et la place Audin, au centre de la ville d’Alger, c’est le même son de cloche. En effet, les parents d’élèves accostés ont indiqué que certains examens n’ont pas été abordables.

LE SUJET DES MATHÉMATIQUES : C’EST POUR LES «EINSTEIN» !

Tous les élèves et les parents que nous avons apostrophés hier ont été unanimes à dire que le sujet des mathématiques qui a été proposé, surtout pour les candidats de gestion et les scientifiques, est loin d’être abordable. «Le sujet des mathématiques ! C’est pour les Einsteins !», a ironisé la dame que nous avons rencontrée devant le lycée Abane- Ramdane d’El Harrach. D’ailleurs, a-t-elle poursuivi, mon fils a été perturbé et il n’avait même pas le courage de réviser ses cours pour les autres examens, si ce n’étaient pas mes encouragements».

«L’examen a été très difficile même pour les excellents», ajoute Kamel, la quarantaine, un père d’une candidate. «Un porte-parole d’une entité syndicale, qui a déclaré hier (avanthier, ndlr) sur les ondes de la Radio nationale, que le sujet des mathématiques est abordable est complètement déconnecté », a-t-il lâché, non sans colère. «C’est faux ! L’examen a été très difficile et même les élèves excellents ont avoué cette réalité», a-t-il encore grommelé.

LE SOUTIEN PSYCHOLOGIQUE DES PARENTS D’ÉLÈVES

La chose qui a attiré notre attention lors de la tournée effectuée hier était surtout la forte présence des parents d’élèves devant les centres d’examens.

Au lycée El Idrissi implanté à la place du 1er-Mai (Alger-Centre), à titre d’exemple, le nombre des parents était très important. « e viens avec ma fille à cet établissement depuis le début des examens du bac et j’y reste jusqu’à ce qu’elle termine ses épreuves, et ce, afin de la soutenir psychologiquement », nous déclare une quinquagénaire.

Selon elle, le soutien psychologique est plus qu’indispensable surtout lorsque le candidat sort un peu déçu de la salle d’examen. Par ailleurs, un autre père de famille a avoué qu’il a pris un congé rien que pour accompagner ses deux enfants candidats tout au long des jours de l’examen.

LES SYNDICATS DE L’ÉDUCATION SATISFAITS

Les représentants des syndicats de l’éducation estiment que les examens du baccalauréat se déroulent dans de bonnes conditions et que les sujets se sont portés sur les cours dispensés durant l’année scolaire qui vient de s’écouler.

C’est le cas du coordinateur du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), Meziane Meriane qui souligne qu’aucune «bavure» n’a été jusque-là enregistrée au niveau des établissements implantés à travers les différentes wilayas du pays.

«Les épreuves du bac se déroulent dans de bonnes conditions et les sujets proposés pouvaient être abordés par des élèves moyens », a déclaré le coordinateur du Snapest, joint hier au téléphone. S’agissant des rumeurs faisant état de la fuite de sujets, notre interlocuteur a tenu à démentir cette information en précisant que cela est impossible. «La fuite des sujets est impossible, et ce, vu les conditions dans lesquelles ceux-ci ont été préparés», a-t-il dit.

Dans ce sens, Meziane Meriane a précisé que les «arnaqueurs » profitent, par la publication des sujets sur les sites internet, de l’innocence des élèves. Une chose qui, a-t-il enchaîné, les déconcentrent et les paniquent davantage. C’est pourquoi, il appelle les candidats à ne pas croire ce genre de rumeurs et à entrer aux centres d’examens avec un moral du fer.

Par ailleurs, le coordinateur du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique a estimé que le ministre de l’Éducation a tenu ses promesses par rapport aux sujets qui devaient être proposés lors de la session de cette année. «Aucun sujet hors programme n’a été jusquelà proposé», a-t-il déclaré. Et d’ajouter : «le seuil des cours a été respecté». En revanche, le même orateur a signalé que des pressions énormes ont été exercées dans la matinée d’hier (mardi, ndlr) sur les surveillants au niveau du lycée Makhbouch dans la wilaya de Skikda.

«Dans la commune de zitouna, relevant de la daïra de Kolo, et plus précisément au niveau du lycée Makhbouch, les surveillants subissent des pressions énormes de la part des candidats et c’est qui est grave dans tous cela, c’est le fait que l’administration n’a rien fait», a-t-il déploré. De son côté, le porteparole du Conseil des lycées d’Alger (CLA), Idir Achour a souligné qu’il n’y a pas de cas «graves» à signaler, mis à part quelques insuffisances et lacunes.

En effet, notre interlocuteur a indiqué que certains surveillants ont déploré la qualité des repas qui leur ont été attribués. «Les enseignants-surveillants ne sont pas bien pris en charge puisque ceux-ci ont eu droit à des repas froids qui ne répondent guère aux normes», a-t-il dit. Le porteparole du CLA a aussi estimé qu’il y a un excédent de surveillants cette année. Plus explicite, Idir Achour a souligné qu’ «à force de vouloir trop surveiller, on perturbe les candidats psychologiquement».

D’autre part, notre interlocuteur a, lui aussi, estimé que les sujets qui ont été, jusque-là, proposés ont été abordables pour les élèves moyens. Toujours dans le même ordre idées, Idir Achour a précisé, à propos de la fuite des sujets, que les «spéculateurs» exploitent les technologies de l’information et de la communication pour gagner de l’argent sur le dos des élèves. Il a également ajouté que les sujets se sont portés sur les 50 % du programme dispensé au cours de l’année précédente.

Pour sa part, le chargé de communication du Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest), Messaoud Boudina a soulevé le problème relatif à la mauvaise qualité des repas froid attribués aux surveillants. Il a aussi demandé d’ouvrir une enquête sur cette affaire inhérente à la fuite des sujets qui, d’après lui, porte atteinte à la crédibilité d’un examen national important, à savoir le baccalauréat. «Il faut d’une manière ou d’une autre condamner ces personnes qui sont en train de porter atteinte à la crédibilité de cet examen», a-t-il préconisé.

UNE BONNE ORGANISATION

Pour ce qui est du volet relatif au déroulement des examens du baccalauréat, il faut dire que ceux-ci ont été marqués par une bonne organisation, et cela, à travers les différents établissements de la capitale.

D’ailleurs, même les parents d’élèves qui ont déversé toute leur colère sur le ministère de l’Éducation et les représentants des différentes entités syndicales ont reconnu que les examens se sont déroulés dans les meilleures conditions. «On n’a rien à dire sur le déroulement du bac», a laissé entendre l’un d’entre eux.

Soufiane Dadi