Les mêmes cassandres

Les mêmes cassandres

On savait depuis longtemps que les experts du FMI aillaient réitérer les mêmes recommandations au gouvernement algérien.

Des recommandations qu’on peut résumer en quatre grands chapitres, ou une sorte de feuille de route globale : dévaluation de la monnaie nationale, diversification de l’économie, privatisation des entreprises publiques et refonte du système fiscal national.

Or, ces quatre grands chantiers comportent d’énormes risques, non pas politiques mais sociaux, et exigent des expertises et des assistances que le gouvernement algérien ne possède pas dans l’immédiat.

Ce dernier appelle l’opinion publique à « accepter » ce genre de réformes, car nécessaires, à « valoriser » le nouveau modèle économique qu’il préconise, alors que le grand problème réside dans cette « inexistence » d’une capacité managériale et d’une « insuffisance » criante dans les compétences chargées justement de mener ces réformes dans l’urgence.

Le constat est fait déjà par certains économistes algériens, qui pensent que l’équipe actuelle manque encore de « lucidité » et, de « volonté politique ». Ils citent comme meilleur exemple la « paralysie du système bancaire et financier et sa propension à rechigner à appliquer toute réforme », la « bureaucratie ambiante qui mine sa gestion » et le caractère « monopolistique » de certaines activités industrielles et commerciales, dont la tendance va vers des comportements de « mafias ».

Depuis des années, la dynamique tant recherchée pour cette économie asphyxiée par la mono-exportation du pétrole est une opération difficile, voire impossible, alors qu’il suffit de prendre l’exemple de certains gouvernants sous d’autres cieux, qui ont déclenché « une guerre totale » pour imposer les nouvelles règles économiques et acculer l’informel à des proportions négligeables.

Car la réforme de l’économie exige avant tout une réforme de l’Etat, pour que ce dernier devienne réellement un Etat régulateur, contrôleur et au-dessus des contingences de toutes sortes. Le FMI évite, bien sûr, de dire ces vérités, se contentant de faire des rappels, des recommandations et de publier des constats sous forme de rapports ou de synthèses de visites.

Caressant dans le sens du poil, le chef de division du département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI explique que l’Algérie « fait face à un choc de grande ampleur avec la dégringolade des prix du pétrole depuis deux ans et qui est probablement appelée à durer. Mais quand ce choc est arrivé, le pays n’était pas démuni ».

Trois chances ont permis à notre pays, selon le FMI, de juguler les périls et d’atténuer le choc : le matelas des réserves de change, le remboursement anticipé de la dette extérieure et l’épargne budgétaire.

L’institution internationale préconise ainsi une « croissance plus diversifiée et tirée davantage par le secteur privé », suggérant l’engagement de réformes structurelles sur différents fronts, comme l’amélioration du climat des affaires, les facilitations dans l’investissement et le financement des PME, l’encouragement à la création des entreprises en misant sur la débureaucratisation, la protection des règles de la concurrence, de la transparence économique et financière, et ouverture du capital des entreprises publiques, la modernisation de la gestion de ces entreprises, le management et la gouvernance dans le système du service public et, surtout, le développement des cursus de l’enseignement, de l’éducation et de la formation professionnelle.

En lançant que l’Algérie « n’a pas besoin d’argent », le FMI veut dire que notre pays a plus besoin de compétences, d’assistance et de conseillers experts dans la mise en route de ces réformes. C’est sans doute l’objet de cette récente visite d’une délégation d’experts du FMI et des entretiens qu’ils ont eus avec nos responsables.