Les opposants de Amar Saâdani ne comptent pas lâcher prise de sitôt. Forts de la décision du tribunal de Bir Mourad Rais de renvoyer l’affaire au 27 mai prochain, soit le jour de la réunion du comité central, ils envisagent une action musclée demain au siège du parti à Hydra.
Des centaines de personnes sont en effet attendues pour protester contre la ligne actuelle du SG. Belayat et ses alliés veulent ainsi faire pression sur la justice pour obtenir gain de cause. Longtemps affaiblie par des divisions internes, l’opposition tente aujourd’hui de mobiliser contre l’élection attendue du SG.
Le cavalier seul de Saâdani ne fait pas l’unanimité autour de lui au sein du parti. Seuls les courtisans et les proches tentent vaille que vaille de défendre la ligne tracée par leur chef. Ce dernier a évité le recours au comité central – seule instance souveraine entre deux congrès- pour préparer les travaux du 10e congrès comme stipulé par les textes.
Mais cette fois-ci, Saâdani aura à combattre seul tous ses adversaires qui, pour une fois, se sont rassemblés autour d’une seule et même revendication à savoir le départ du SG et éviter une victoire de ce dernier au 10e congrès. Comme au bon vieux temps, des alliances se font et se défont au gré des circonstances entre des parties qui n’ont en commun ni l’objectif ni la finalité. Plus on s’approche de la date du congrès, plus les alliances se multiplient au sein de l’opposition. Mais, une fois que l’enjeu disparaît, l’alliance s’écroule comme un château des cartes.
Cela n’empêche nullement une autre alliance de prendre forme, soit en fonction d’un énième enjeu, soit simplement pour briguer le très convoité poste de SG. C’est un cercle vicieux qui a longtemps fait ses preuves au point même de prendre les militants en otage.
Des alliances de circonstance parce que non basées sur
le programme
Mais au fond, qu’est-ce qui lie les partenaires dans ce genre d’alliance ? En tout cas, pas l’idéologie ou le programme. Mais certains enjeux politiques tels qu’un poste ministériel ou une chancellerie. On durcit le ton que l’on avait baissé pour les besoins de la cause. Chose curieuse, depuis la prise de contrôle du FLN par Saâdani, on assiste à des alliances de circonstance où les uns comme les autres font bon ménage.
Bref, aucune idéologie n’est mise en pratique. Le seul programme en vigueur, c’est de s’opposer à Saâdani. Et à son programme néo-libéral-conservateur. Si Amar Saâdani a décidé de passer à l’offensive contre ses opposants, c’est qu’il se sent en position de force.
Il est vrai que le temps lui a donné raison, lui qui a été le premier à déclarer la candidature de Bouteflika et à lui assurer le soutien des structures du parti. Mais vu l’obstination du groupe Belayat et son fort soutien au sein des structures organiques du parti, il paraît difficile pour Saâdani de s’en débarrasser si facilement. Saâdani, fragilisé un peu plus par les révélations de la presse française concernant ses supposés biens immobiliers et ses comptes en devises en France, a éliminé un à un tous ses opposants à commencer par Belkhadem, Belayat, Abada, Goudjil et Ziari.
Avec le nouveau découpage organique créé par le SG du FLN, -création de sept nouvelles mouhafadhas- Saâdani a voulu échapper à deux périls : celui de la base traditionnelle des militants au niveau des kasmas qui n’en finissent pas avec leur grogne et leur colère, et ensuite celui des anciennes têtes ou membres qui gèrent les mouhafadhas ou bureaux de wilaya. Tout le monde sait que la composante humaine de ces deux structures échappe à Saâdani. Elles sont autonomes, libres et généralement nommées depuis une décennie, soit du temps de Benflis, soit de celui de Belkhadem.
Les responsables locaux et régionaux sont devenus de vrais capitaines, qui imposent leurs vues, leurs visions, maintiennent des réseaux de clientélisme ou des liens de solidarité tribale ou clanique. Ce sont eux qui dressent les listes des candidats aux APC et autres APW. Ce sont eux qui tranchent pour les P/APC et font du lobbying pour désigner leurs sénateurs lors du renouvellement, faisant fi des recommandations et autres instructions de leur direction nationale.
Ce sont encore ces capitaines qui désignent leurs représentants lors des congrès du parti, et ce sont eux qui imposent les noms au niveau du comité central. Généralement, le bureau politique fait mine de décider et de désigner, mais en fait, il ne fait qu’accepter un fait accompli selon des « partages énigmatiques » et des calculs d’équilibres.
C’est cette « faille organique » que Saâdani veut éviter à tout prix, et qui explique la trouvaille du nouveau découpage qu’il a imposé sur le terrain, confiant la mission à son responsable de l’organique, Mustapha Mazouzi. Partout, c’est le démembrement : trois mouhafadhas à Batna (pour satisfaire trois tribus), à Oran, Constantine, Djelfa et ailleurs, deux autres dans d’autres wilayas.
De nouvelles structures qui se créent avec des bureaux ou assemblées de quinze personnes avec un chef et des assistants, loin de toute transparence. Saâdani ne déroge point à la règle. Il joue sa survie, puisque le prochain congrès sera fait par ces mêmes personnes qui sont actuellement installées par Mazouzi. C’est d’ailleurs à cause de ces « dérapages organiques » que des contestations sont signalées un peu partout.