L’évolution de l’économie mondiale, avec une croissance révisée à la baisse puisqu’elle devrait être de 3% en 2019 et de 3,4% en 2020, alors qu’il était prévu qu’elle atteigne 3,7% pour les deux années, le ralentissement de l’activité tout particulièrement des partenaires commerciaux incontournables, notamment l’Europe et la Chine, conjugué à l’état des lieux propre à chaque pays, tout cela, entre autres raisons, explique le Fonds monétaire international (FMI), augure des lendemains pas très enchanteurs pour la croissance pour les pays exportateurs de pétrole de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, dont l’Algérie, où la tension politique risque de ne pas arranger les choses.
La croissance à court terme reste faible pour les pays exportateurs de pétrole de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, dans un contexte de volatilité des prix du pétrole, de croissance mondiale précaire, de forte vulnérabilité budgétaire et de montée des tensions géopolitiques, constate le FMI qui préconise que soit repris l’assainissement des finances publiques et que ces pays s’appuient sur de meilleurs cadres budgétaires à moyen terme, et ce, pour réduire la dépendance à l’égard des prix du pétrole et ouvrir la voie à une croissance plus durable.
Dans le même temps, des réformes structurelles et un développement plus poussé du secteur financier stimuleraient l’investissement direct étranger (IDE) et l’investissement privé intérieur, assure l’institution dans son rapport sur les perspectives économiques régionales et mondiales, publié la semaine dernière.
Dans ce contexte de ralentissement de la croissance mondiale, de tensions commerciales et du retour des risques géopolitiques, les prix du pétrole demeurent instables, fluctuant entre 55 et 75 dollars le baril depuis le début de l’année (voir Évolution de l’économie mondiale). Contexte difficile auquel ont contribué, dans une grande mesure, les tensions commerciales sino-américaines, représentant un risque considérable pour la région. Il faudrait rappeler, en effet, qu’en septembre, les États-Unis ont instauré des droits de douane supplémentaires sur les produits chinois et devraient en établir d’autres en décembre, cela devrait, selon le FMI, impacter des pays, à l’instar de l’Algérie, qui entretiennent des liens commerciaux particulièrement étroits avec la Chine. Et enfin, il y a le facteur aggravant que constituent les tensions locales, comme celles qui secouent le pays depuis neuf mois maintenant.
«L’évolution de ces événements met en évidence la nécessité impérieuse de procéder à des réformes pour parvenir à une croissance plus forte et plus inclusive», juge l’institution de Bretton Woods. Globalement, pour les pays exportateurs de pétrole de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, la croissance à court terme reste faible dans le contexte actuel. Une conjoncture qui fait et fera que, pour l’Algérie, le FMI s’attend à ce que la croissance atteigne 2,6% en 2019, contre 1,4% en 2018, grâce à la hausse de la production pétrolière, avant de ralentir à 2,4% en 2020, en raison de l’incertitude actuelle dans le pays.
Globalement pour les pays exportateurs de pétrole de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, dans le contexte actuel, l’activité devrait rester modérée à moyen terme. La croissance du PIB réel devrait s’établir en moyenne à environ 2,3% pour les pays de notre région. «Ces taux de croissance sont trop faibles pour créer chaque année les quelque 1 million de nouveaux emplois nécessaires pour absorber les nouveaux arrivants sur le marché du travail», atteste le FMI. Sur les conditions financières qui prévalent dans les pays de la région, il est dit dans le rapport que le financement monétaire des déficits budgétaires et l’inflation due aux tensions sur les taux de change ont réduit la croissance réelle du crédit au secteur privé dans trois pays dont l’Algérie. «Tout en maîtrisant leurs déficits budgétaires, ces pays doivent redoubler d’efforts pour éponger les liquidités déjà injectées par des opérations de financement monétaire afin de contenir les tensions inflationnistes et les pressions sur les taux de change, ainsi que d’en limiter les effets négatifs sur l’activité économique», recommande le FMI.
Afin de parvenir à une croissance plus forte et inclusive, des réformes structurelles, comme le conseille souvent, depuis plusieurs années, le FMI, doivent être engagées et ceci «même si la poursuite de l’assainissement des finances publiques demeure une priorité, il est urgent de créer des emplois dans toute la région. À cette fin, la poursuite du développement financier et des réformes structurelles contribuerait à accroître le potentiel d’offre dans ces pays. C’est important, car la croissance doit être tirée par le secteur privé pour alléger le fardeau que représente l’assainissement indispensable des finances publiques».
Pour ce qui concerne l’Algérie, si elle partage avec l’ensemble des pays de la région beaucoup de paramètres à revoir sur le plan macroéconomique, le pays a tout de même des spécificités comme par exemple «l’amélioration du climat des affaires dans lequel le secteur privé peut prospérer», chapitre dans lequel le FMI conseille que «l’assouplissement des restrictions à la participation étrangère contribuerait à attirer des investissements directs étrangers» pour faire allusion à la règle 51-49, ou encore «confier un rôle plus ciblé pour le secteur public, des lois sur la concurrence plus larges et mieux appliquées, et une uniformité de traitement entre le secteur privé et les entreprises et fondations publiques».
C’est en tous les cas une conjoncture qui s’annonce chargée en incertitudes pour les pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, notamment les exportateurs de pétrole dont l’Algérie, pays qui s’est mis, plus que d’autres sans doute, en demeure d’opérer, comme le préconise le FMI, des réformes structurelles qui soutiennent la croissance non pétrolière tirée par le secteur privé et accroissent la productivité. Des réformes pour de vrai, cette fois, pas celles qui reviennent de façon quasi-cyclique depuis des années dans le discours officiel.
Azedine Maktour