Le pays a besoin d’un baril de plus de 100 dollars pour assurer ses équilibres budgétaires, mener à bien les projets de développement économique et assurer la paix sociale.
Le gouvernement a-t-il sous-estimé la dégringolade des prix du pétrole? «Nous avons fait nos calculs, étudié les scénarios les plus pessimistes et toutes les hypothèses, y compris si le pétrole descend à 70 dollars» avait déclaré le Premier ministre, lors de son discours d’ouverture des travaux de la 17e tripartite. On était le 18 septembre. Le baril de pétrole coté à New York affichait un peu plus de 94 dollars.
Hier, dans les échanges électroniques il valait 76,75 dollars. Vers 10h15 GMT, il a même chuté jusqu’à 75,84 dollars, son plus bas niveau en séance depuis le début du mois d’octobre 2011. Nous y sommes pratiquement à cette cote d’alerte fixée par Abdelmalek Sellal. L’Exécutif est sous pression. A-t-il eu les yeux plus gros que le ventre en élaborant sa loi de finances? La question de savoir si certains projets prévus dans le cadre du plan d’investissements publics dont l’enveloppe financière s’élève à 262 milliards de dollars ne seront pas remis en cause, ne relève plus d’une simple vue de l’esprit.
Comme il sera question de se demander si l’incidence financière, sur le trésor public suite à la suppression de l’article 87 bis du Code du travail qui prévoit des augmentations de salaires massives ne pèsera pas lourd dans la balance. Elle devra coûter au bas mot 10 milliards de dollars selon les experts. Les hausses de salaires que doivent occasionner les mouvements de revendications des policiers, des agents de la Protection civile…corseront encore un peu plus l’addition.
Si leur légitimité est avérée, la mise en oeuvre d’une telle mesure dans une conjoncture économique et financière fragilisée par des niveaux faibles de prix du pétrole demeure aléatoire. Les conséquences peuvent s’avérer désastreuses pour un pays porté à bout de bras par une économie dont les revenus en devises sont assurés à 97% par le secteur des hydrocarbures.
«Si des cours pétroliers bas devaient perdurer et devenir la nouvelle norme, il pourrait en résulter une difficile période de transition pour des pays dont les soldes budgétaires dépendent du maintien des prix au-dessus de 100-110 dollars le baril et une agitation sociale, voire des défaillances» préviennent les analystes de J.P. Morgan Asset Management.
Une alerte qui date depuis plus de deux ans maintenant. «L’équilibre budgétaire requiert des niveaux de prix des hydrocarbures supérieurs à 112 dollars le baril», avait prévenu la Banque d’Algérie dans un rapport présenté par Djamel Benbelkacem, son directeur-conseiller, au début du mois de juillet 2012. Hormis le recours à ce que rapportent les ventes du pétrole et du gaz l’Algérie demeure sans autre alternative. Le secteur hors hydrocarbures collecte bon an mal an 2 milliards de dollars. Juste de quoi honorer la facture des importations du pays en médicaments!
«En outre, dans le secteur non pétrolier, un climat des affaires difficile freine le développement du secteur privé, ce qui compromet les chances de parvenir à une croissance forte, durable, et à la création rapide d’emplois. Les principaux défis auxquels est confrontée la gouvernance de l’économie (algérienne, ndlr) – l’amélioration de l’environnement des affaires, la réduction des subventions, la diversification de l’économie et la création d’emplois du secteur privé – restent pratiquement sans réponse» déplore le récent rapport de la Banque mondiale rendu public le 10 octobre dernier.
«Il est nécessaire de mener un travail ambitieux et soutenu de rééquilibrage des finances publiques pour placer la politique sur une trajectoire viable et veiller à épargner la richesse des hydrocarbures pour les générations futures», a conseillé Zeïne Zeïdane, le chef de la mission du Fonds monétaire international qui a séjourné dernièrement en Algérie.
Le moment de réduire le train de vie de certains ministères budgétivores et improductifs de surcroît est-il venu? La question brûle toutes les lèvres alors que les commentaires qu’elle suscite donnent l’impression que l’on radote. Que l’on tourne autour du pot. Qu’on l’admette ou pas. Que l’on tienne des propos rassurants, la réalité est bel et bien là. Le temps de se serrer la ceinture est arrivé.