Les réformes limitées pourraient enfoncer le Maroc dans l’instabilité

Les réformes limitées pourraient enfoncer le Maroc dans l’instabilité

Les réformes limitées initiées par le gouvernement marocain pour faire face à la grogne des populations au Rif sont insuffisantes et pourraient enfoncer le pays dans l’instabilité, estime une analyse sur la situation au Maroc, publiée récemment par l’hebdomadaire américain Washington Examiner.

« Le récent tollé contre les peines de prison prononcées à l’encontre des manifestants du Rif montre que ces réformes n’ont pas été assez loin pour regagner la confiance et le soutien de la population et pourraient même continuer de menacer la stabilité du royaume », souligne Erin Dunne, l’auteure de l’analyse.

« Cela aurait non seulement des conséquences sur le Maroc, mais sur toute la région de l’Afrique du Nord où les Etats-Unis et l’Europe ont besoin d’alliés stables pour contrer l’extrémisme religieux », soutient cette analyse publiée jeudi par l’hebdomadaire conservateur de la capitale américaine.

Dunne explique dans cet article les raisons de l’échec du gouvernement Saadeddine El Othmani à contrer les contestations sociales qui prennent de l’ampleur au Maroc, accentuées par les revendications légitimes du mouvement Hirak au Rif.

L’analyse va ainsi au fond du problème en relevant que le Maroc ne peut plus compter sur « le modèle de concessions politiques limitées », utilisée jusqu’ici pour casser les mouvements aspirant au changement.

Ce modèle, basé sur « des tactiques de réformes modestes » a fonctionné dans le passé en épargnant au Maroc les répercussions du Printemps arabe mais cette stratégie a échoué à affaiblir les contestations. Les manifestations qui ont repris en juin après la condamnation des leaders du mouvement Hirak « montrent que les citoyens exigent davantage » de réformes, relève l’analyse.

« La voie actuelle vers la stabilité, fondée sur des réformes modestes et graduelles, pourrait ne pas suffire », poursuit l’auteure, affirmant que « les efforts du roi pour mettre en œuvre des réformes tout en réprimant les manifestants est une voie moyenne qui peut devenir de plus en plus difficile ».

« Alors que les citoyens constatent l’impact des manifestations, ils continueront probablement à se tourner vers la mobilisation politique pour susciter le changement. En même temps, il est peu probable que les défis auxquels le gouvernement doit faire face disparaissent ou résolus par des solutions rapides », précise l’analyse.

Au cœur des protestations au Rif figurent les revendications économiques et sociales et « tant que le gouvernement n’a pas trouvé les moyens de proposer des options économiquement viables à ces régions, les tensions et les manifestations risquent de se reproduire », prévoit l’auteure. Au Maroc, la pauvreté est persistante et le chômage des jeunes est généralisé, constate-t-elle.

L’analyse rappelle la genèse du mouvement Hirak au Rif, né après la mort du poissonnier Mohcine Fikri, broyé dans une benne à ordures, alors qu’il s’opposait à la confiscation de sa marchandise par la police.

La protestation qui s’en est suivi a ébranlé le Rif et le Maroc entier et à laquelle le roi a répondu par « des manœuvres politiques » en limogeant des ministres pour l’échec des programmes de développement, rappelle encore Dunne.