Par Salami Youcef
Les réserves de changes, le seul levier dont dispose le pays pour maintenir un semblant d’ordre et de stabilité dans l’économie, perdent sérieusement de l’élan. En chiffres, elles sont passées à “79,88 milliards de dollars à fin décembre 2018, contre 97,33 milliards de dollars à fin 2017”, ce qui correspond à une chute de “17,45 milliards de dollars”, selon la note de conjoncture juin-décembre 2018 de la Banque d’Algérie. Comme on peut le constater, cette baisse est supérieure au déficit du solde global de la balance des paiements, un document de comptabilité nationale qui retrace l’ensemble des flux économiques (biens, services, capitaux…) entre le pays et le reste du monde. Du point de vue de la Banque centrale, elle est liée à un effet de “valorisation négative” de près de 1,73 milliard de dollars, en rapport avec la dépréciation de l’euro vis-à-vis du dollar entre décembre 2017 et décembre 2018.
Le solde global de la balance des paiements a affiché un déficit de 15,82 milliards de dollars en 2018, contre 21,76 milliards de dollars en 2017. La contraction des réserves de changes, rapportée au problème des déficits du solde global de la balance des paiements, traduit en fait une boulimie de dépenses et d’achats à l’étranger, dans une conjoncture où le revenu national est modeste, le marché pétrolier mal en point. Le revenu national est le revenu perçu par les agents économiques nationaux du fait de leur participation à l’activité de production. Le pays espère, toutefois, que les cours du brut se redresseront et qu’il arrivera à reconstituer ses réserves, mais l’incertitude s’accroît à mesure que l’horizon s’éloigne, le marché donnant des signaux peu encourageant avec des prix qui baissent de nouveau.
Il est vrai que le marché a connu une relative reprise en 2018, mais que cela n’a pas permis de redonner de l’épaisseur aux réserves de change. Dans un contexte de baisse des exportations d’hydrocarbures en volume, l’augmentation du prix moyen du pétrole en 2018 a, néanmoins, exercé un effet haussier sur l’évolution de la fiscalité pétrolière. Celle-ci a atteint 2 755,2 milliards de dollars en 2018, contre 2 177,0 milliards de dollars en 2017. Il est ainsi de la plus haute importance de disposer de mécanismes efficaces agissant comme des soupapes économiques solides, afin d’empêcher l’érosion des réserves de changes, ce à quoi a, d’ailleurs, appelé la Banque d’Algérie, soulignant la “nécessité d’efforts d’ajustement soutenus, notamment budgétaire, pour rétablir la viabilité de la balance des paiements et limiter l’érosion des réserves officielles de changes”.
Ces efforts, poursuit la Banque des banques, devraient s’intégrer dans “un vaste programme de réformes structurelles pour améliorer le recouvrement de la fiscalité ordinaire (y compris par la rationalisation des subventions), libérer le fort potentiel de croissance de l’économie nationale et diversifier l’offre domestique et les exportations de biens et services”. Il est utile de rappeler que les réserves de changes de l’Algérie (or non compris) étaient à 82,12 milliards de dollars à fin novembre 2018, contre 86,08 milliards de dollars à fin septembre et 88,61 milliards de dollars à fin juin 2018. Les gouvernements successifs avaient pris une série de mesures en matière de commerce extérieur dans l’objectif d’en enrayer la chute, mais c’était peine perdue !
Youcef Salami