Le gouvernement décide de mettre fin progressivement aux subventions directes de l’État sur les produits de première nécessité. Si la démarche s’avère déjà assez complexe au vu de la situation du marché, ses retombées risquent de peser lourd sur les ménages de la classe moyenne.
En effet, le projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2022 prévoit la création d’un dispositif national de compensation au profit des ménages nécessiteux. Ce dernier sera mis en place suite à la suppression du système de subventions généralisées.
Lors de la présentation du projet de loi des finances hier devant les membres de l’APN, le Premier ministre affirme que le dispositif national de compensation monétaire au profit des ménages « sera concrétisé à travers un programme de transfert monétaire direct au profit des ménages qui y sont éligibles ».
Autrement dit, la réforme du système de subvention sociale se fera à travers le passage au virement au profit des familles nécessiteuses. Celles-ci bénéficieront donc d’un revenu supplémentaire comme indemnisation de la hausse des prix engendrée par la suppression des subventions directes.
Dans son argumentatif, le gouvernement explique que cette réforme vise un « meilleur ciblage » de la subvention publique « garantissant une justice sociale ». Selon la même source, la majorité des dispositifs généralisés sont « abusifs », du fait qu’ils « profitent essentiellement aux couches des populations aisées ».
Les classes moyennes sont-elles menacées d’appauvrissement ?
Cependant, des spécialistes avancent déjà les difficultés de concrétisation d’une telle démarche, mais aussi des retombées qui pourront fortement nuire à des milliers de ménages. A priori, c’est les critères de sélection des ménages « éligibles » qui pourra poser problème.
Déjà dans la tourmente, du fait des augmentations massives des prix des produits alimentaires, des services, du loyer et de l’énergie, les classes moyennes sont plus que jamais menacées. Ainsi, force est de constater que les classes moyennes risquent d’être à nouveau confrontées à des difficultés semblables à celles des plus pauvres.
Interrogé par le quotidien Liberté, Mourad Ouchichi, enseignant d’économie à l’université de Bejaïa estime que « ce sont les classes moyennes à revenus fixes qui risquent, en effet, de supporter, à nouveau, l’essentiel des sacrifices exigés par la crise ». Pour ce qui est de la classe moyenne libérale, l’intervenant affirme qu’elle a « les moyens d’y faire face ».
Cette démarche « s’annonce aussi complexe que sensible »
Abordant ce qui pourra se mettre comme entraves dans la concrétisation des réformes des subventions de l’État, l’économiste affirme que cette démarche « s’annonce aussi complexe que sensible ». À ce propos, il avance « le poids de l’informel dans l’économie et l’absence d’un système fiscal fiable ».
Outre cela, Mourad Ouchichi explique que la réforme des subventions « va entraîner naturellement une inflation qui, à son tour, viendrait aggraver les inégalités sociales et précipiter les classes moyennes dans les mêmes difficultés auxquelles se heurtent les plus pauvres ».
Et comme solution, « cette réforme doit se faire dans une conjoncture qui permet à l’État de mettre en place des systèmes de compensation aussi bien au bénéfice des pauvres qu’au profit des classes moyennes », préconise le spécialiste.