Le général Toufik a bâti son mythe en observant rigoureusement un silence à toute épreuve. Jamais au cours des longues années passées à la tête du DRS, le grand muet qu’il était ne s’était autorisé la moindre “intrusion médiatique”. Aujourd’hui, il décide de parler. Oui, Toufik parle !
C’est incontestablement un événement à résonance sismique dans une Algérie en plein maelstrom. Et s’il a senti le besoin de sortir de son mutisme légendaire, c’est qu’il y est visiblement contraint par une impérieuse obligation morale à l’égard du général Hassan, aux arrêts à la prison militaire d’Oran, depuis le 26 novembre.
En militaire discipliné, le général Toufik a dû épuiser les voies de recours légales, pour se résoudre finalement à s’en remettre au tribunal de la vox populi pour certainement la prendre à témoin de la forfaiture. C’est que sa lettre adressée au président Bouteflika, dont l’existence est révélée dernièrement par le général Khaled Nezzar, est restée sans suite. Serait-elle, peut-être, bloquée au niveau du même barrage qui a empêché la lettre des 19 de parvenir à la bonne destination ?
Toujours est-il que dans sa déclaration, puisqu’il s’agit d’une déclaration écrite, le général Mediène dénonce la condamnation du général Hassan en se disant d’emblée “consterné” (le mot est fort) par le verdict prononcé par le tribunal d’Oran. Ensuite, en avocat, il démonte les accusations pour lesquelles son bras droit s’est retrouvé dans le box des accusés. Cela en expliquant que le service qu’il (Hassan) dirigeait existait en vertu d’un décret. Que la mission dont il est question aujourd’hui était une réussite parfaite. Et qu’enfin, elle avait même permis de sauver des vies humaines.
La vérité des faits ainsi rétablie, l’ex-patron du DRS, qui souligne au passage la bravoure et la compétence de son adjoint, demande alors que l’injustice commise soit réparée, car selon lui, il y va tout à la fois de l’honneur de l’officier, de tous les officiers qui se sont dévoués à l’Algérie, et de département du renseignement, en dernier ressort.
Le général Mediène, en sortant de sa réserve, assigne à sa déclaration un seul objectif : laver l’honneur de l’homme qui a travaillé sous sa coupe. Mais en lecture subliminale, cette déclaration dit beaucoup de choses qui confirment, au demeurant, les lectures faites du procès. À savoir, notamment, que le général Aït Ouarabi est une victime collatérale de la guerre des clans qui continue à faire rage au sommet de l’État sur fond de scénarios de la succession à Bouteflika. Donc un procès politique, pardi !