Foncièrement opposés aux augmentations fiscales contenues dans ce projet de loi de finances, le Parti des travailleurs et le MSP n’y sont pas allés avec le dos de la cuillère.
Si d’aucuns savent que la loi de finances 2016 passera comme une lettre à la poste, du fait de la nature et du fonctionnement de la chambre basse du Parlement, la majorité des groupes parlementaires critique fortement plusieurs dispositions de ce texte de loi. Le fait notable est que contrairement à ceux du RND, les députés du FLN rejoignent les frondeurs. Ces derniers qui n’ont pas encore reçu d’orientations et directives de la direction du parti, laissent libre cours à leurs remarques et critiques des dispositions de la loi de finances 2016, notamment celle relative à la politique d’austérité portant atteinte au pouvoir d’achat des citoyens. Cependant, l’adoption du projet est une autre paire de manches car le vote de la loi sera soumis inévitablement aux directives du secrétaire général, Amar Saâdani. En tout état de cause, grâce au concours des députés du FLN, la commission des finances a pu abroger huit articles, dont les articles 71 et 53, modifier 17 autres et introduire un article supplémentaire.
Les députés du vieux parti estiment que le ministre des Finances n’apporte pas de solutions aux problèmes structurels de l’ économie. Pour compenser la chute brutale de la fiscalité pétrolière, il a décidé de faire payer la facture par le simple citoyen en envisageant d’instaurer des augmentations drastiques dans plusieurs secteurs. Hormis deux députés présents hier à la séance de présentation du PLF 2016, les autres députés du FFS ont boycotté cette séance. Le PT qui a décelé des dérives dans plusieurs dispositions du PLF 2016, s’apprête à proposer une trentaine d’amendements. Pour Mme Hanoune la loi de finances 2016 a été conçue par des hommes d’affaires locaux et étrangers. Le même constat d’échec a été dressé par le MSP, dont le président du parti a souligné que ce texte de loi fait la part belle à une poignée d’hommes d’affaires privilégiés soutenus par leurs homologues étrangers. Lakhdar Benkhellaf, député du parti El Adala estime que le projet de loi de finances 2016 «est dangereux». «C’est un texte dicté par les barons de l’argent sale. Ces derniers ont poussé le gouvernement à recourir aux poches des citoyens pour couvrir le déficit budgétaire.»
L’échec de la politique économique est cuisant, selon l’opposition: «Malgré les dépenses estimées à 800 milliards de dollars depuis 1999, le taux de croissance n’a pas dépassé 4%.» «L’Algérie dépense 30% du PIB pour une croissance de 4%, autrement dit on débourse 7 dollars pour engranger un seul dollar comme bénéfice», indique-t-on. L’année 2016, sera celle des déficits tous azimuts: «Déficit budgétaire de l’ordre de 4747, 4 milliards de dinars, déficit du Trésor de l’ordre de 245, 6 milliards de dinars, déficit de la balance commerciale établi à 21, 7 milliards de dinars et déficit de 30,3 milliards de dollars de la balance des paiements. Les réserves de changes qui s’établissent à 121 milliards de dollars à fin 2016, s’épuiseront totalement en novembre 2018. La facture des importations va crescendo pour atteindre la barre des 70 milliards de dollars. Certains observateurs prédisent que l’Algérie entrera en pleine récession en 2017 ou dans une crise budgétaire très dangereuse. A partir de là il sera pratiquement impossible de couvrir le déficit budgétaire de l’année 2017 en recourant aux avoirs accumulés dans le FRR.
L’Etat sera alors en faillite alors que 70% des salaires sont payés sur le Trésor public. L’Etat ne pourra plus maintenir leur niveau, les transferts sociaux estimés actuellement à 1847 milliards de dinars, soit 9,8% du PIB. Présentement, le budget de fonctionnement dépasse de loin les revenus en devises. Par ailleurs, le ministre des Finances n’a pas du tout apprécié l’abrogation de l’article 71 du PLF 2016 qui permet au gouvernement le transfert des budgets adoptés dans la loi de finances sans retourner au Parlement. Ce mécanisme d’équilibre financier n’est pas une disposition nouvelle ou majeure puisqu’il est contenu dans l’article 22 de la loi de finances complémentaire 2015 et il est déjà opérationnel. Concernant l’article 59 contesté et vu comme une manière de contourner la règle du 51/49%, il a souligné qu’ «il s’agit de donner la priorité au financement local à travers ce qu’il a appelé un mariage entre les IDE(investissements directs) qui accompagnent le financement local après autorisation du gouvernement au cas par cas». «La seule chose qu’ils pourront transférer sont les dividendes. Il est nécessaire que l’ Algérie passe au financement intégré ou composé pour les grands projets», a-t-il ajouté. A la lumière de ce plaidoyer, il n’est pas écarté que le ministre utilisera son droit à proposer le maintien de ces deux articles.