La Chambre des députés a approuvé mercredi un projet de loi attribuant à l’Etat le contrôle de la production et de la vente de cannabis…
Pour lutter contre le trafic de cannabis, l’Uruguay a décidé de prendre la production en main. La Chambre des députés a approuvé mercredi soir la légalisation de la marijuana. La mesure doit être encore ratifiée par le Sénat. Si la loi était promulguée, cela ferait de ce petit pays sud-américain le premier du monde où l’Etat contrôlerait la production et la vente du cannabis.
Le texte a été approuvé par 50 voix sur 96 après quatorze heures de débats, grâce aux voix du Frente amplio (FA, gauche, au pouvoir), également majoritaire au Sénat. Les résultats du vote ont été accueillis par les applaudissements d’une centaine de partisans de la légalisation, présents à l’assemblée.
«Minimiser les risques et réduire les dommages de l’usage du cannabis»
Le projet de loi prévoit notamment que l’État «assume le contrôle et la régulation de l’importation, de l’exportation, de la plantation, de la culture, de la récolte, de la production, de l’acquisition, du stockage, de la commercialisation et de la distribution du cannabis et de ses dérivés».
L’objectif avoué de ce texte déposé à l’été 2012 par la présidence mais élaboré par le Parlement, où sont majoritaires les élus du FA, est de «minimiser les risques et réduire les dommages de l’usage du cannabis». La consommation n’est actuellement pas pénalisée en Uruguay, contrairement à son commerce.
Si le texte était approuvé, un organisme serait créé -l’Institut de régulation et de contrôle du cannabis (IRCCA)- afin de gérer la production et la distribution, et de veiller à l’application de la loi. Les consommateurs, résidents en Uruguay majeurs et inscrits dans un Registre des usagers, pourraient acheter jusqu’à 40 grammes par mois dans des pharmacies autorisées.
Le but «n’est pas de promouvoir la consommation, la consommation existe déjà», avait déclaré mercredi en début de séance le député Sebastian Sabini en présentant cette loi défendue par le président Jose Mujica.
Selon lui, le texte vise principalement à couper les consommateurs des réseaux mafieux et à lutter contre le trafic de drogue qui «finance le crime organisé et des activités illicites comme la traite de personnes, la vente d’armes ou le blanchiment d’argent».
De son côté, le député du Parti National (opposition) Gerardo Amarilla avait estimé que cette loi revenait à «jouer avec le feu». «Sommes-nous disposés à sacrifier une génération pour nous rendre ensuite compte que nous nous trompons, que nous n’allons pas en finir avec le marché noir (…) qu’il va y avoir une hausse de la consommation?», a-t-il protesté.
L’état vendeur: une première mondiale
La loi prévoit aussi de permettre la culture à usage personnel à hauteur de six plants. La création de clubs de consommateurs de 15 à 45 membres serait également permise, avec une limite autorisée de 99 plans. La vente par l’État uruguayen de cannabis aux consommateurs enregistrés constituerait une première mondiale selon les experts.
Un récent sondage de l’institut Cifra révèle que 62% des Uruguayens sont opposés à cette loi, contre seulement 26% de partisans.