Lutte contre la corruption : Sonatrach verrouille la passation des marchés

Lutte contre la corruption : Sonatrach verrouille la passation des marchés

Les changements à la tête du ministère de l’Energie et de la Sonatrach, entraînent déjà des changements au niveau des pratiques managériales.

La réaction des nouveaux dirigeants se manifeste par la volonté d’endiguer les sources de la corruption, qui ont largement entaché l’activité de leurs prédécesseurs. Ainsi de nombreux contrats hérités de l’ancien staff ont été gelés et une nouvelle procédure de passation de marchés est mise en place.

Le document intitulé «Directive de passation des marchés de Sonatrach (R16)», redéf init les critères de passations et d’attribution de ces marchés par Sonatrach et concerne tous les marchés à l’exception de quatre types d’opération : «les marchés relatifs aux opérations de recherche, développement et exploitation, régis par les contrats d’Association ; l’importation des Hydrocarbures et produits dérivés; les affrètements maritimes au voyage, pour les besoins des ventes et des importations ; la fourniture des services d’électricité, de gaz, d’eau et des carburants ».

Même si la procédure de gré à gré continue à être en vigueur dans des cas exceptionnels et «d’urgence impérieuse», la procédure d’appel d’offres constitue la règle. Il ne sera recouru au gré à gré, selon la Directive, que quand les marchés ne peuvent être exécutés que par un partenaire unique, «qui détient soit une situation monopolistique, soit à titre exclusif, le procédé technologique retenu par la structure contractante».

LA RIGUEUR DANS LES CHOIX DES PARTENAIRES

Autre nouveauté : la publication dans le Baosem est désormais obligatoire pour tous les contrats et non pas, comme auparavant, seulement pour ceux attribués suite à des appels d’offres.

Autre forme de passation de contrats, qui constituait un vivier de la corruption, la consultation est désormais encadrée par la nouvelle Directive qui limite les commandes à «un montant de inférieur ou égal à huit millions de Dinars (…) pour les prestations de travaux ou de fournitures, et quatre millions de Dinars (…), pour les prestations de services ou d’études», encore faut-il que la structure contractante de Sonatrach consulte au moins trois fournisseurs. «Les marchés conclus sont soumis au contrôle à posteriori de la Commission des marchés compétente.

La Structure Contractante présentera à la Commission des marchés compétente un état trimestriel des réalisations au titre de ces contrats ou commandes, le mois suivant la clôture du trimestre concerné», ajoute le document.

Pour faire barrage aux sociétés écran et aux passe-droits, la nouvelle Directive déf init également les critères que devront remplir les entreprises pour répondre aux appels d’offres lancés par la Société Nationale des Hydrocarbures.

Ainsi une entreprise dans une des structures a été engagée pour fournir des études ou des services de Conseil, sur un projet est exclue – elle et ses f iliales- de fait de l’appel d’offres pour la réalisation de ce même projet. Les soumissionnaires sont tenus d’observer les règles d’éthiques établies par Sonatrach.

Ils doivent également signer une déclaration de probité qui sera contenue dans chaque appel d’offres. Une entreprise exclue pour «manquement aux règles d’éthique édictées par Sonatrach », ne pourra pas participer aux appels d’offres et «ne pourra soumissionner ou se voir attribuer un marché pendant toute la période de son exclusion »

Sonatrach peut annuler un appel d’offres avant la fin de la procédure et la présentation des offres f inancières. Mais la Société Nationale se réserve aussi le droit « de mettre fin au processus d’appel d’offres dans le cas où elle considère que le prix de l’offre retenu provisoirement est anormalement supérieur ou inférieur aux prix moyens du marché », précise le texte. Concernent les avenants aux contrats, ils seront soumis à l’examen préalable de la Commission des marchés compétente.

CONTRÔLE DES MARCHÉS

Même si la Directive porte en elle les instruments de verrouillage de toutes les possibilités de fuites, elle tend à alléger les procédures et mettre en place des mécanismes de contrôle intermédiaires. Ainsi, chaque structure doit créer en son sein une Commission d’ouverture des plis (COP) et une Commission ad-hoc d’évaluation des offres (CEO).

«L’ouverture des plis et l’évaluation des offres ainsi que la recommandation d’attribution de marchés, dans les termes et conditions f ixés par la présente Directive, relèvent des Commissions d’ouverture des plis (COP) et des Commissions d’évaluation des offres (CEO) créées à cet effet par la Structure Contractante », selon la directive. Quatre Commissions sont mises en place pour superviser l’attribution des marchés au lieu d’une seule actuellement.

Ces Commissions sont : la Commission des marchés de l’Entreprise (CME); les Commissions des marchés des Activités (CMA); la Commission des marchés Activités Centrales (CMC); les Commissions des marchés décentralisées (CMD). «Les modalités de création, de fonctionnement ainsi que les missions et compétences des Commissions des marchés sont f ixées par décision du Président-Directeur Général », précise la Directive.

PATRIOTISME ÉCONOMIQUE ET « PRÉFÉRENCE NATIONALE »

L’une des critiques les plus virulentes adressée à Sonatrach au temps du couple Khellil – Méziane, était cette préférence accordée dans les contrats de soustraitance, aux entreprises et Bureaux d’études étrangers, sans même prendre la peine de prospecter l’offre nationale.

La nouvelle Directive évoque le sujet mais reste vague sur son application. «Une marge de préférence est accordée aux produits, biens et services d’origine algérienne, suivant le taux et les modalités f ixés par la réglementation en vigueur.

Le dossier d’appel d’offres doit indiquer clairement le taux de la marge de préférence et la méthode d’évaluation et de comparaison des offres qui sera suivie pour appliquer ladite préférence». Sonatrach veut également pousser ses partenaires à utiliser la main d’oeuvre algérienne.

«Le dossier d’appel d’Offres doit indiquer clairement, à travers les dispositions contractuelles, l’obligation faite au cocontractant, d’utiliser en priorité la main d’oeuvre nationale et de ne recourir à la main d’oeuvre étrangère que sur la base d’une production des documents de l’Agence Nationale de l’Emploi, justif iant la non disponibilité de ressources locales», précise le document.

N.Benchaa