Fer de lance du mouvement syndical dans la zone industrielle de Rouiba, les travailleurs de la SNVI ont quitté, hier, leurs ateliers et leurs bureaux pour occuper la route durant toute la matinée. Il aura fallu l’intervention musclée des forces de l’ordre, avec des cas regrettables de blessures, pour les repousser dans l’enceinte du complexe, qui est, ces derniers temps, sous tension permanente, avec des hauts et des bas. La raison de la colère : a priori un retard dans le versement des salaires qui serait dû, fait-on croire, à un problème technique de logiciel.
Pourtant, le directeur de l’entreprise s’était engagé, la dernière fois, après une montée de tension similaire il y a quelques semaines, à régler une bonne fois pour toutes ce problème. Sauf que la solution à ce problème récurrent ne dépend pas que de la bonne volonté du directeur, lui-même prisonnier d’une situation inextricable dont il a hérité en prenant les commandes de la SNVI, plus connue pour ses poussées de fièvre syndicale que pour la marque de ses véhicules. Car, à proprement parler, ce problème des salaires, qui est une préoccupation légitime pour les milliers de pères de famille, n’est que la partie visible de l’iceberg de cette entreprise qui, depuis des années, pour ne pas dire des décennies, vit une crise structurelle. Pourtant, on ne peut accuser l’État de n’avoir rien fait, puisque les gouvernements successifs ont eu à mettre en place plusieurs plans de refinancement, à coups de milliards de dinars. Mais, toutes les tentatives de restructuration financière n’ont pas permis à cette entreprise de retrouver le chemin de la compétitivité et de la croissance, dans un marché ouvert à la concurrence qui, faut-il le souligner, n’est d’ailleurs pas toujours loyale. Le recours au partenariat avec l’étranger (Mercedes et Renault) envisagé, encore une fois, par les pouvoirs publics, comme levier à l’effet de faire redémarrer cette entreprise, ne semble pas atteindre ses objectifs en tous points de vue. Cette solution est surtout redoutée par les travailleurs qui soupçonnent, derrière, un plan de liquidation qui ne dit pas son nom. Une chose est néanmoins sûre : ce mastodonte qu’est la SNVI est dans une situation ingérable de l’avis même de ses cadres. Il appartient au gouvernement de trouver la meilleure sortie de crise. Mais, pour cela, le ministre de l’Industrie, qui est concerné en premier chef, devrait réduire un peu ses voyages à l’étranger pour être à l’écoute des convulsions qui secouent son secteur.