Malgré un dispositif policier impressionnant : Démonstration de force des étudiants à Alger

Malgré un dispositif policier impressionnant : Démonstration de force des étudiants à Alger

L’Algérie a célébré, hier, à travers la communauté estudiantine, le 63e anniversaire du 19 Mai 1956. La commémoration de cette date a revêtu, cette année, un caractère exceptionnel, puisque les étudiants et enseignants ont improvisé simultanément à travers le pays, des sit-in et organiséplusieurs activités et thématiques pour commémorer cette date historique.

Une date qui rappelle le déclenchement de la grève générale illimitée des étudiants un certain 19 mai 1956. Hier, une marche grandiose, a été organisée par la communauté estudiantine, malgré un dispositif policier impressionnant. Les marcheurs ont offert un beau spectacle aux passants comme ils sont habitués depuis le 26 février dernier, date de la première marche nationale pacifique de la communauté estudiantine, pour le changement du système politique en place et l’édification d’un État de droit.

La marche vers le siège de l’APN avortée
Soixante trois ans après le sursaut des étudiants de l’époque, le 19 mai 1956, qui avait été un « tournant décisif» dans la guerre de libération, les étudiants algériens de notre ère, toujours aussi déterminés que  leur aïeux en leur journée nationale, en attendant leur rendez-vous de demain, (mardi),  étaient hier nombreux à se rassembler à la Capitale. Selon nos estimations, ils étaient plusieurs milliers à répondre présents avant d’entamer une marche pacifique et arpenter les rues d’Alger-centre. Mais, cette marche animée par un sentiment de patriotisme sous les couleurs nationales, qui a drainé des milliers de personnes, qui ont tenu à être présentes malgré la soif, la chaleur et le jeûne, a été réprimée, hélas, par les forces de l’ordre fortement mobilisées à leur tour pour les empêcher d’avancer jusqu’à l’APN.

Chose qui a fait réagir les passants, dont un citoyen nous l’entendions dire à un autre que « pourquoi il aura fallu mettre en place tout ce dispositif sécuritaire face à eux, (les étudiants), pourtant ils ne cessent de forcer le respect, chaque mardi, par leur civisme, maturité politique et leur prise de conscience qui se reflètent par la forme de leur protestation pacifique ? » Ainsi, appuyés par leurs enseignants comme durant leur rendez-vous des mardis, les étudiants, venus de différentes universités et facultés de la capitale et de ses environs tels ceux de Boumerdès, de Tipasa et de Blida, ont improvisé une marche pacifique, peu avant 10h30, depuis la fac centrale en direction de l’esplanade de la Grande Poste, Le tribunal de Sidi M’hamed, avant d’être empêchés d’aller se rassembler devant le siège de l’Assemblée populaire nationale, lieu où ils avaient réussi à mettre les pieds durant leur précédent mardi.

Durant tout le parcours, les étudiants ont exprimé leur « rejet de la présidentielle du 4 juillet prochain», exigeant «une transition démocratique », et le « départ des symboles du système politique en place.» Il est évident de noter que les étudiants, munis « des couleurs nationales, de leur volonté, leur pacifisme et leur détermination -leur marque de fabrique-, ont serpenté les ruelles du centre d’Alger en courant et en se faufilant parmi les voitures, afin de détourner l’attention des policiers mobilisés en nombre important. Devant le tribunal de Sidi M’hamed, les étudiants ont appelé « au jugement des responsables corrompus.»

Un étendard à l’effigie de Taleb Abderrahmane
Au fur et à mesure que nous avançons parmi le cortège, sur nos têtes, et au milieu des centaines de drapeaux rouge vert et blanc, brandies par les étudiants, l’étendard, à l’effigie de Taleb Abderrahmane, est venu flotter durant la mobilisation estudiantine de la journée d’hier, comme durant les mardis à Alger. « Il est présent toujours parmi nous, chaque mardi, pour éclairer notre lutte pacifique à côté du peuple et de ses revendications légitimes. Recevoir la bénédiction de cet héros de la Révolution algérienne et commémorer justement l’engagement des étudiants, le 19 mai 1956  et leur contribution à renforcer les rangs du peuple pour l’indépendance du pays, nous donne de l’espoir et beaucoup de courage» nous a lancé un étudiant.

Un soutien réitéré au mouvement populaire et citoyen
Les étudiants et enseignants universitaires ont spontanément initié, hier, des minis débats, sur la situation du pays, comment traduire les revendications du peuple, visant l’édification d’un État de droit et, notamment, quel rôle va jouer l’université pour hisser le pays : au rang qu’il mérite. D’ailleurs, en plus de la symbolique de la commémoration du 63ème anniversaire du déclenchement de la grève illimitée des étudiants, le 19 mai 1956, la mobilisation estudiantine est intervenue dans une semaine jugée «cruciale», par plusieurs acteurs politiques. Et la lettre de l’ancien diplomate, Ahmed Taleb-Ibrahimi, du militant des droits de l’Homme, Ali Yahia Abdennour, ainsi que le général à la retraite, Rachid Benyellès, qui ont demandé au commandement de l’ANP de «nouer un dialogue franc et honnête avec des figures représentatives du mouvement citoyen », a été au centre des débats universitaires.

Une étudiante nous dira, grosso modo, que cette dernière demeure « une initiative louable », cela avant d’estimer qu’ «elle n’a rien apporté de nouveau puisque tout le monde est d’accord pour aller vers une conférence nationale.» Pour une autre, la lettre précitée est un non évènement. Puisqu’elle nous indique que «la question est déjà tranchée,» poursuit-elle avant de rappeler que « le peuple veut un État civil, avec des figures crédibilisées par la rue. C’est-à-dire, une vraie transition démocratique pour une Algérie nouvelle, et nous, étudiants, nous sommes « le moteur et le cœur battant » du mouvement populaire pacifique.»

Mohamed Amrouni