Avec plus d’un million d’étudiants à transporter, le transport universitaire est un marché des plus juteux. L’entreprise Tahkout en détient quasiment le monopole. L’Office des œuvres universitaires en a fait son principal partenaire. La paralysie qu’a connue le transport lundi poussera certainement ses responsables à réviser leurs choix.
Nawal Imès – Alger (Le Soir) – Lundi, le transport universitaire était quasiment paralysé. Les étudiants ont été surpris et l’opinion nationale ouvrait les yeux sur une réalité : le transport universitaire est entre les mains d’une seule entreprise qui jouit d’une situation de quasi-monopole.
Les œuvres universitaires n’ont pour partenaire que l’entreprise Tahkout et tout récemment, à un degré moindre, l’Etusa. Pourtant, cela n’a pas toujours été le cas. Les anciens étudiants se souviennent encore des bus verts estampillés à l’effigie des centres des œuvres universitaires, les fameux Cous. Ils étaient peu nombreux, toujours en retard et il fallait jouer des coudes pour pouvoir y avoir une place. De restructuration en restructuration, c’est actuellement à l’Office national des œuvres universitaires qu’est dévolue la mission de garantir le transport universitaire.
Il s’agit d’un établissement public à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Ses ressources proviennent essentiellement des subventions de l’Etat. Face à la pression du nombre et à l’incapacité de l’Onou à y faire face, le transport universitaire était alors ouvert aux opérateurs. C’est ainsi que l’entreprise Tahkout s’est retrouvée détentrice exclusive du transport universitaire dans plusieurs régions du pays, avant d’obtenir un permis d’exploitation de 1 000 lignes pour le transport urbain dans la capitale en 2015 via un contrat dont le montant s’élèverait à plus de
3 milliards de dinars.
Avec une flotte de plus de 3 500 bus, l’entreprise s’est imposée comme premier opérateur du transport universitaire, offrant ses services à la famille estudiantine estimée à un million d’étudiants. Si ces derniers pouvaient enfin bénéficier d’un service un peu plus aux normes, c’est surtout à l’entreprise que le marché a le plus profité. Ce n’est que récemment que l’entreprise publique Etusa a pu rafler une petite part d’un marché juteux. Ironie du sort, l’entreprise publique, ne pouvant remplir les clauses du contrat, a dû se tourner vers l’entreprise Tahkout pour la location des bus. Une situation totalement inédite. Avec les problèmes judiciaires que connaît actuellement le premier responsable de l’entreprise, il est légitime de s’interroger au sujet de l’avenir du transport universitaire.
Sa pérennité sera-t-elle mise en cause ? L’entreprise survivra-t-elle aux déboires judiciaires ? Rien n’est moins sûr. Ce qui l’est, par contre, c’est que le service ne doit nécessairement pas souffrir des difficultés que connaît l’entreprise. Cette dernière est liée par des clauses claires à l’Onou : elle doit en toutes circonstances assurer le transport universitaire.
Lundi, au moment où Mahieddine Tahkout était entendu par la justice, puis mis en détention, les bus de l’entreprise sont restés au niveau des régies. Des milliers d’étudiants se sont retrouvés otages, ne pouvant se rendre aux universités. Beaucoup d’entre eux avaient ce jour-là des examens. Une situation qui fera certainement réfléchir à l’avenir l’Office des œuvres universitaires au moment d’octroyer le marché.
Le monopole n’a jamais été un signe de bonne santé et l’Onou va devoir certainement revoir la manière dont sont octroyés les marchés pour éviter de retomber, une fois de plus, dans le piège du monopole.
N. I.